Donald Trump redéfinit l’économie mondiale avec une approche qui mêle néolibéralisme et autoritarisme politique, marquant une rupture profonde dans le modèle économique.
Depuis Ronald Reagan, l’économie de marché s’était imposée, prônant l’efficience des marchés comme moteur de prospérité. Ce tournant néolibéral, amorcé au début des années 80, reposait sur l’idée que l’omniscience des marchés, couplée à une déréglementation et à une liberté accrue des facteurs de production, entraînerait une fluidité naturelle des marchés, imposant leur optimalité aux pouvoirs politiques. Certains qualifièrent cela de « tout au marché ». Mais, comme la mobilité du capital excède celle du travail – un constat qui fonda d’ailleurs la conclusion du Manifeste du Parti communiste de Karl Marx –, les gains de productivité furent capturés par le capital au détriment du travail. Aux États-Unis, la mobilité du travail, bien qu’inférieure à celle du capital, est exacerbée par l’absence de protection sociale. Il fallait donc vulnérabiliser le travail pour qu’il s’adapte aux gisements de croissance, une logique qui a creusé les inégalités.
Aujourd’hui, Donald Trump, en exacerbant la vulnérabilité de tous – nations, entreprises, individus –, amplifie une logique néolibérale extrême (que je qualifie d’exolibérale, en inventant un néologisme), où la compétition est reine. Mais, en même temps, il imprime une dimension réaliste à l’économie, en priorisant les intérêts nationaux américains au détriment des équilibres mondiaux.
Par sa politique de droits de douane prohibitifs et d’embargos, notamment contre la Chine, il redessine les rapports de force commerciaux. Ce moment constitue une fracture majeure dans l’économie globale, qui était jusque-là stabilisée par le multilatéralisme commercial. Les marchés, pourtant réputés omniscients, vacillent sous ses décisions, oscillant au gré de sa signature, qui peut faire varier la valeur des actifs de plusieurs trillions de dollars en quelques instants. Cette instabilité, qu’il justifie par la promesse d’un avenir meilleur pour l’Amérique, impose une souffrance conjoncturelle à ses citoyens.
Les plus vulnérables, déjà en détresse économique, sont appelés à endurer cette douleur pour un hypothétique renouveau. Trump, en se posant comme un maître du destin, évoque une figure quasi divine, capable de façonner l’avenir. Mais cette vision politique, où l’Amérique prime sur tout, fragilise les interdépendances mondiales. Les alliances économiques, autrefois stables, sont remises en question. La primauté du dollar, bien que réaffirmée, sera menacée par des négociations monétaires audacieuses.
Ce mélange de politique impérialiste et de néolibéralisme va probablement redéfinir l’économie pour des décennies. Je ne sais pas de quoi le trumpisme sera le symbole, mais Donald Trump est déjà dans les livres d’histoire.