Cette circulaire commente les dispositions transposant en droit belge les directives européennes visant à lutter contre les pratiques d’évasion fiscale en ce qui concerne les dispositifs hybrides.
impôts sur les revenus ; impôt des sociétés ; impôt des non-résidents/sociétés ; dispositifs hybrides ; base imposable à l'ISoc ; base imposable à l’INR/soc. ; bénéfice imposable ; frais professionnels ; frais non déductibles.
SPF Finances, le 22.10.2024
Administration générale de la Fiscalité – Impôt des sociétés
5. Transfert hybride sur le marché
IV. Dispositifs hybrides visés et ajustements prévus
1. Ajustements entraînant un accroissement de la base imposable
1.1. Établissement stable étranger non pris en compte en tant que tel
1.2. Revenus d’une entité belge considérée comme fiscalement transparente en Belgique
1.3. Revenus générés dans le cadre d’un instrument financier hybride
1.4. Paiement par une entité hybride étrangère considérée comme fiscalement transparente en Belgique
2. Ajustements entraînant une dépense non déductible
2.1. Double déduction d’un même paiement
2.2. Déduction d’un paiement en Belgique sans inclusion d’un revenu à l’étranger
2.2.1. Paiement effectué au titre d’un instrument financier
2.2.2. Paiement en faveur d’une entité hybride
2.2.3. Paiement en faveur d’une entité disposant d’une ou de plusieurs implantations
2.2.4. Paiement en faveur d’un établissement stable non pris en compte en tant que tel
2.2.5. Paiement effectué par une entité hybride
2.3. Dispositifs hybrides importés
2.4. Société à double résidence fiscale
3. Limitation de la QFIE à imputer
1. La présente circulaire commente les dispositions suivantes :
- art. 2, § 1er, 16° à 18°, CIR 92, tels qu’introduits par l’art. 3, L 25.12.2017 (1) ;
- art. 185, § 1er, al. 2 à 4, et § 2/1, CIR 92, tels qu’insérés par l’art. 18, 1° et 2°, L 25.12.2017 ;
- art. 198, § 1er, 10°/1 à 10°/4, CIR 92, tels qu’insérés par l’art. 39, 5°, L 25.12.2017 ;
- art. 292, al. 4, CIR 92, tel qu’introduit par l’art. 73, L 25.12.2017 et remplacé par l’art. 34, L 30.07.2018 (2).
(1) Loi du 25.12.2017 portant réforme de l’impôt des sociétés, MB 29.12.2017 et errata dans le MB 26.03.2018.
(2) Loi du 30.07.2018 portant des dispositions diverses en matière d’impôts sur les revenus, MB 10.08.2018.
2. Ces dispositions transposent les directives « ATAD 1 » (3) et « ATAD 2 » (4), adoptées par l’Union Européenne (UE) en vue d’endiguer l’érosion de la base d’imposition des sociétés causée par les dispositifs hybrides (5).
(3) Directive (UE) 2016/1164 du Conseil du 12 juillet 2016 établissant des règles pour lutter contre les pratiques d’évasion fiscale qui ont une incidence directe sur le fonctionnement du marché intérieur.
(4) Directive (UE) 2017/952 du Conseil du 29 mai 2017 modifiant la directive (UE) 2016/1164 en ce qui concerne les dispositifs hybrides faisant intervenir des pays tiers.
(5) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 7.
Ces dispositions s’inscrivent dans le prolongement de l’action 2 du projet de l’OCDE et du G20 sur l’érosion de la base imposable et le transfert de bénéfices (BEPS).
3. La directive « ATAD 1 » prévoyait déjà des mesures visant à lutter contre les dispositifs hybrides. La directive « ATAD 2 » complète celles-ci par des mesures étendues à davantage de formes de dispositifs hybrides, de même qu’aux dispositifs hybrides utilisant des établissements stables et à ceux faisant intervenir des pays tiers (6).
(6) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 7.
4. Ainsi, les présentes dispositions visent les dispositifs hybrides mis en place entre des entreprises associées, entre des intervenants faisant partie de la même entreprise ou entre des intervenants agissant dans le cadre d’un dispositif dont les termes intègrent la valorisation de l’avantage fiscal obtenu ou qui a été conçu en vue de générer cet avantage fiscal.
Sont également visées, les dépenses déductibles par une société dans plusieurs États dans lesquels elle est considérée comme une société résidente, ainsi que l’obtention, dans plusieurs Etats, d’un crédit d’impôt au titre de retenue à la source ayant grevé un revenu (7).
(7) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 12.
5. Les dispositifs hybrides sont donc des dispositifs donnant lieu à des dépenses déductibles dans le chef de plusieurs intervenants, ou dans le chef d’un seul intervenant mais sans que, dans ce cas, à ces dépenses correspondent des revenus figurant parmi les revenus imposables du bénéficiaire. Selon le cas, les ajustements consistent en :
- l’inclusion d’un revenu parmi les bénéfices imposables du bénéficiaire (art. 185, § 1er, al. 2 à 4 et § 2/1, CIR 92), ou
- le refus de déduction d’un paiement (art. 198, § 1er, 10°/1 à 10°/4, CIR 92), ou
- la limitation de l’imputabilité de la quotité forfaitaire d’impôt étranger (QFIE) (art. 292, al. 4, CIR 92) (8).
(8) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 7.
6. Ci-après, les art. 3, 18, 1° et 2° et 39, 5°, L 25.12.2017 :
Art. 3
L'article 2, § 1er, du Code des impôts sur les revenus 1992, remplacé par la loi du 10 août 2001 et modifié par les lois des 17 mai 2004, 15 décembre 2004, 27 décembre 2006, 11 décembre 2008, 30 juillet 2013, 21 décembre 2013, 8 mai 2014, 12 mai 2014, 10 août 2015, 18 décembre 2015, 26 décembre 2015, 3 août 2016 et du 21 juillet 2017, est complété par un 16°, un 17° et un 18°, rédigés comme suit :
« 16° Dispositif hybride
Par dispositif hybride, on entend un dispositif donnant lieu à des dépenses déductibles dans le chef d'une société résidente, ou d'un établissement belge, et d'une entreprise étrangère, ou d'une implantation de celle-ci, ou dans le chef d'un seul de ces intervenants mais sans que, dans ce cas, à ces dépenses correspondent des revenus figurant parmi les revenus imposables du bénéficiaire.
Il ne peut être question de dispositif hybride entre d'une part une société résidente, ou un établissement belge, et d'autre part une entreprise étrangère, ou une implantation de celle-ci, que s'ils sont des entreprises associées, qui font partie de la même entreprise ou qui agissent dans le cadre d'un dispositif structuré.
Une société résidente, ou un établissement belge, et une entreprise étrangère, ou une implantation de celle-ci, sont des entreprises associées :
- lorsque l'entreprise étrangère est une entité dans laquelle la société résidente ou l'établissement belge détient, directement ou indirectement, une participation de 50 p.c. ou plus en matière de droits de vote ou de capital, ou dont il est en droit de recevoir 50 p.c. ou plus des bénéfices; ou
- lorsque l'entreprise étrangère, ou l'implantation de celle-ci, est une personne physique ou une entité qui détient, directement ou indirectement, une participation de 50 p.c. ou plus en matière de droits de vote ou de capital de la société résidente, ou qui est en droit de recevoir 50 p.c. ou plus des bénéfices de la société résidente; ou
- lorsqu'une personne physique ou une entité détient, directement ou indirectement, une participation de 50 p.c. ou plus en matière de droits de vote ou de capital de la société résidente et de l'entreprise étrangère; ou
- lorsque la société résidente, ou l'établissement belge, et l'entreprise étrangère, ou l'implantation de celle-ci, font partie du même groupe consolidé à des fins de comptabilité financière; ou
- lorsque l'un exerce une influence notable sur la gestion de l'autre.
En cas de dispositif impliquant un paiement effectué au titre d'un instrument financier, le seuil de 50 p.c. susmentionné est ramené à 25 p.c.
Une personne qui agit conjointement avec une autre personne au titre des droits de vote ou de la propriété du capital d'une entité est également considérée comme détenant une participation dans l'ensemble des droits de vote ou des capitaux de cette entité qui sont détenus par l'autre personne ou les autres personnes.
Un groupe consolidé à des fins de comptabilité financière est un groupe composé de toutes les entités qui sont pleinement intégrées dans les états financiers consolidés établis conformément aux normes internationales d'information financière ou au système national d'information financière d'un État membre de l'Espace économique européen.
Une société résidente, ou un établissement belge, et une entreprise étrangère, ou une implantation de celle-ci, font partie de la même entreprise lorsque l'un constitue un établissement belge ou stable de l'autre ou que tous deux constituent des établissements belges ou stables de la même entreprise.
Une société résidente, ou un établissement belge, et une entreprise étrangère, ou une implantation de celle-ci, agissent dans le cadre d'un dispositif structuré lorsqu'elles agissent dans le cadre d'un dispositif produisant une déduction dans le chef de chacun d'eux, ou une déduction, dans le chef de l'un, jointe à une absence d'imposition, dans le chef de l'autre, et dont les termes intègrent déjà la valorisation de cet effet, ou dans le cadre d'un dispositif qui a été conçu de manière telle à générer cet effet, à moins que l'on ne puisse pas raisonnablement attendre de la société résidente ou de l'établissement belge ou de l'entreprise étrangère, ou de l'implantation de celle-ci, qu'il soit informé de l'existence de cet effet, et qu'il n'ait pas bénéficié de cet effet.
Il ne peut être question de dispositif hybride donnant lieu à une déduction, dans le chef d'un des intervenants, jointe à une absence d'imposition, dans le chef d'un autre intervenant, lorsque l'absence d'imposition dans le chef de ce dernier n'est due qu'au régime fiscal exorbitant du droit commun qui lui est applicable ou à des différences dans la valeur attribuée à un paiement, y compris par l'application des prix de transfert.
17° Entité hybride
Par entité hybride, on entend toute entité ou tout dispositif qui est considéré comme une entité imposable en vertu des lois d'une juridiction et dont les revenus ou les dépenses sont considérés comme les revenus ou les dépenses d'une ou plusieurs autres personnes en vertu des lois d'une autre juridiction.
18° Transfert hybride
Par transfert hybride, on entend tout dispositif permettant de transférer un instrument financier lorsque le rendement sous-jacent de l'instrument financier transféré est considéré à des fins fiscales comme obtenu simultanément par plusieurs des parties à ce dispositif. ».
Art. 18, 1° et 2°
A l'article 185 du même Code, modifié par les lois des 21 juin 2004 et 11 décembre 2008, les modifications suivantes sont apportées :
1° le paragraphe 1er est complété par trois alinéas, rédigés comme suit :
« Les sociétés sont également imposables sur les bénéfices attribuables à un établissement stable dont une convention préventive de la double imposition conclue avec un Etat membre de l'Union européenne prévoit l'exonération, dans la mesure où ces bénéfices sont générés dans le cadre d'un dispositif hybride et où ils ne sont pas imposables dans la juridiction de l'établissement stable en raison du fait que celui-ci n'y est pas considéré comme tel.
Par dérogation à l'alinéa 1er et à l'article 29, lorsqu'une ou plusieurs entités associées non résidentes détenant globalement un intérêt direct ou indirect de 50 p.c. ou plus des droits de vote, des participations au capital ou des droits de participation aux bénéfices d'une entité visée à l'article 29 constituée ou établie en Belgique se situent dans une juridiction ou des juridictions qui considèrent l'entité comme une personne imposable en Belgique, l'entité est considérée comme une résidente de la Belgique et ses revenus sont imposés dans la mesure où ils ne sont pas par ailleurs imposés selon les lois belges ou celles de toute autre juridiction.
L'alinéa 3 ne s'applique pas aux organismes de placement collectif. ».
2° il est inséré un paragraphe 2/1, rédigé comme suit :
« § 2/1. Par dérogation au paragraphe 1er, et sans préjudice de l'article 203, § 1er, 6°, les revenus générés dans le cadre d'un dispositif hybride qui ne sont pas repris dans les bénéfices des sociétés ou des établissements belges qui en sont les bénéficiaires ou qui sont considérés comme tels en vertu des lois d'un autre Etat, sont imposables ou, selon le cas, non déductibles, dans la mesure où une entreprise étrangère, ou une implantation de celle-ci, est autorisée à les déduire de revenus imposables.
Sont visés les revenus suivants générés dans le cadre d'un dispositif hybride :
a) un revenu généré dans le cadre d'un instrument financier, lorsque la déduction, dans le chef de l'entreprise étrangère, ou d'une implantation de celle-ci, jointe à l'absence d'imposition, dans le chef des sociétés ou des établissements belges qui en sont les bénéficiaires ou qui sont considérés comme tels en vertu des lois d'un autre Etat, est imputable aux différences existant dans la qualification de l'instrument financier ou du revenu généré dans le cadre de cet instrument financier.
Un revenu représentant le rendement sous-jacent d'un instrument financier transféré ne donne pas lieu à un dispositif hybride lorsque le revenu est payé par un négociant financier dans le cadre d'un transfert hybride sur le marché, à condition que la juridiction du payeur exige du négociant financier qu'il inclue dans ses revenus tous les montants reçus en rapport avec l'instrument financier transféré.
Pour l'application de la présente disposition, on entend par :
- instrument financier : tout instrument dans la mesure où il génère un rendement financier ou un rendement de capitaux propres soumis aux règles d'imposition applicables aux titres de dette, titres de participation ou produits dérivés selon les lois belges ou celles de l'Etat de l'entreprise étrangère, ou de l'implantation de celle-ci, y compris tout transfert hybride ;
- transfert hybride sur le marché : tout transfert hybride auquel procède un négociant financier dans le cadre de ses activités habituelles, et non dans le cadre d'un dispositif structuré ;
- négociant financier : toute personne ou entité qui exerce une activité professionnelle consistant à acheter ou vendre régulièrement des instruments financiers pour son propre compte afin de réaliser un bénéfice ;
b) un revenu payé par une entreprise étrangère, ou une implantation de celle-ci, qui est une entité hybride, dans la mesure où ce revenu est, pour cette entité hybride, déductible de revenus imposables qui ne figurent pas également parmi les revenus imposables des sociétés ou des établissements belges à qui ce revenu est payé ou considéré comme tel en vertu des lois d'un autre État. » ;
(…)
Art. 39, 5°
A l'article 198 du même Code, modifié en dernier lieu par la loi du 25 décembre 2016, les modifications suivantes sont apportées :
(…)
5° le paragraphe 1er, alinéa unique, est complété par les 10° /1, 10° /2, 10° /3 et 10° /4, rédigés comme suit :
« 10° /1 les paiements effectués dans le cadre d'un dispositif hybride, dans la mesure où :
- la société résidente ou l'établissement belge qui entend les déduire entend les déduire de revenus professionnels qui ne figurent pas également parmi les revenus imposables d'une entreprise étrangère ou d'une implantation de celle-ci ; et
- une entreprise étrangère, ou une implantation de celle-ci, est autorisée à les déduire de ses revenus imposables.
Les paiements dont la déduction a été refusée en vertu de la présente disposition peuvent être déduits des revenus professionnels des périodes imposables suivantes, dans la mesure où ces revenus professionnels figurent également parmi les revenus imposables d'une entreprise étrangère ou d'une implantation de celle-ci.
10° /2 les paiements suivants effectués dans le cadre d'un dispositif hybride, dans la mesure où ils ne figurent pas parmi les revenus imposables des bénéficiaires :
a) un paiement effectué au titre d'un instrument financier, lorsque :
- le fait que, en l'absence de la présente disposition, ce paiement serait déductible, tout en ne figurant pas parmi les revenus imposables du bénéficiaire, est imputable aux différences existant dans la qualification de l'instrument financier ou du paiement effectué au titre de cet instrument financier ; et
- ce paiement n'est pas inclus dans un délai raisonnable parmi les revenus imposables du bénéficiaire.
Un paiement effectué au titre d'un instrument financier est considéré comme inclus dans les revenus imposables du bénéficiaire dans un délai raisonnable lorsque :
- le paiement est inclus par la juridiction du bénéficiaire dans une période imposable qui commence dans les 12 mois suivant la fin de la période imposable du payeur ; ou
- il est raisonnable de penser que le paiement sera inclus par la juridiction du bénéficiaire dans une période imposable ultérieure et que les conditions du paiement sont celles dont il serait envisageable que des entreprises indépendantes conviennent entre elles.
Un paiement représentant le rendement sous-jacent d'un instrument financier transféré ne donne pas lieu à un dispositif hybride lorsque le paiement est effectué par un négociant financier dans le cadre d'un transfert hybride sur le marché.
Pour l'application de la présente disposition, on entend par :
- instrument financier : tout instrument dans la mesure où il génère un rendement financier ou un rendement de capitaux propres soumis aux règles d'imposition applicables aux titres de dette, titres de participation ou produits dérivés selon la législation belge ou celle de l'Etat de l'entreprise étrangère, ou de l'implantation de celle-ci, y compris tout transfert hybride ;
- transfert hybride sur le marché : tout transfert hybride auquel procède un négociant financier dans le cadre de ses activités habituelles, et non dans le cadre d'un dispositif structuré ; et
- négociant financier : toute personne ou entité qui exerce une activité professionnelle consistant à acheter ou vendre régulièrement des instruments financiers pour son propre compte afin de réaliser un bénéfice ;
b) un paiement en faveur d'une entité hybride ;
c) un paiement en faveur d'une entité disposant d'une ou plusieurs implantations, lorsque le fait que ce paiement ne figure pas parmi les revenus imposables de cette entité résulte de différences dans l'attribution des paiements entre le siège de cette entité et son implantation ou entre deux implantations ou plus de cette entité en vertu des lois des juridictions où l'entité mène ses activités ;
d) un paiement en faveur d'une implantation qui est considérée comme donnant lieu à un établissement stable en vertu des lois de la juridiction du siège de l'entité dont elle fait partie, mais qui n'est pas considéré comme un établissement stable selon les lois de la juridiction où l'implantation est située, sauf si le revenu correspondant à ce paiement est considéré comme imposable en vertu des lois de la juridiction du siège de l'entité dont l'implantation fait partie ;
e) un paiement effectué par une entité hybride, dans la mesure où, en l'absence de la présente disposition, ce paiement serait déduit de revenus imposables qui ne figurent pas également parmi les revenus imposables du bénéficiaire ;
f) un paiement réputé effectué entre le siège et l'implantation ou entre deux implantations ou plus, dans la mesure où, en l'absence de la présente disposition, ce paiement serait déduit de revenus imposables qui ne figurent pas également parmi les revenus imposables du bénéficiaire ;
10° /3 les paiements effectués dans le cadre d'un dispositif hybride, dans la mesure où ils financent, directement ou indirectement, des dépenses déductibles dans le chef de plusieurs entreprises étrangères, dans le chef d'une entreprise étrangère et d'une implantation de celle-ci, dans le chef de plusieurs implantations de la même entreprise étrangère, ou dans le chef d'une entreprise étrangère, ou d'une implantation de celle-ci, mais, dans ce dernier cas, sans qu'à ces dépenses correspondent des revenus figurant parmi les revenus imposables du bénéficiaire. Ces paiements sont néanmoins considérés comme des frais professionnels dans la mesure où l'une des juridictions concernées par le dispositif hybride a procédé à un ajustement équivalent à l'égard de ce dispositif hybride ;
10° /4 les paiements effectués par une société résidente qui est également considérée comme une société résidente par une ou plusieurs autres juridictions dans laquelle, ou dans lesquelles, ces paiements sont déductibles de revenus imposables qui ne figurent pas parmi ses revenus imposables en Belgique. Ces paiements sont néanmoins considérés comme des frais professionnels dans le cas où l'autre juridiction, ou les autres juridictions, sont des États membres de l'Union européenne avec lequel, ou avec lesquels, la Belgique a conclu une convention préventive de la double imposition au regard de laquelle la société est considérée comme un résident de Belgique. » ;
(…)
7. Ci-après, l’art. 34, L 30.07.2018, qui remplace l’art. 73, L 25.12.2017 :
Art. 34
L'article 292 du même Code, modifié par les lois du 22 juillet 1993 et du 4 mai 1999, est complété par deux alinéas, rédigés comme suit :
« Les sommes imputables visées à l'alinéa 1er ne sont pas imputées sur le montant du transfert intra-groupe visé à l'article 185, § 4, alinéa 1er, qui est repris dans la base imposable.
Par dérogation à l'alinéa 1er, la quotité forfaitaire d'impôt étranger n'est imputée qu'à concurrence de la quote-part de l'impôt des sociétés qui se rapporte aux revenus nets imposables générés par un transfert hybride. Ces revenus nets sont constitués de la différence entre les revenus reçus dans le cadre de ce transfert hybride et les éventuels paiements qui ont également dû être effectués dans le cadre de ce transfert hybride. ».
8. Les dispositions de lutte contre l’évasion fiscale en matière de dispositifs hybrides reposent sur une série de nouveaux concepts.
Dans ce cadre, les définitions de « dispositif hybride », « entité hybride » et « transfert hybride » ont été introduites respectivement aux 16°, 17° et 18°, de l’art. 2, § 1er, CIR 92.
D’autres définitions sont reprises directement dans les dispositions traitant des ajustements à opérer. Il s’agit plus particulièrement des notions d’« instrument financier », de « transfert hybride sur le marché » et de « négociant financier » insérées à l’art. 185, § 2/1, al. 2, a), CIR 92, ainsi qu’à l’art. 198, § 1er, 10°/2, a), al. 4, CIR 92.
9. Par dispositif hybride, on entend un dispositif donnant lieu à des dépenses déductibles dans le chef d'une société résidente, ou d'un établissement belge, et d'une entreprise étrangère, ou d'une implantation de celle-ci, ou dans le chef d'un seul de ces intervenants mais sans que, dans ce cas, à ces dépenses correspondent des revenus figurant parmi les revenus imposables du bénéficiaire (9).
(9) Art. 2, § 1er, 16°, al. 1er, CIR 92.
10. Cette définition vise à la fois des mécanismes de « double déduction » (déduction de la même dépense dans le chef de deux contribuables) et des mécanismes de « déduction sans inclusion » (déduction d’une dépense sans imposition du revenu correspondant).
11. Il est noté que le législateur a préféré utiliser le terme « implantation » plutôt que le terme « établissement stable » afin de couvrir les situations où les intervenants sont situés dans des Etats avec lesquels il n’existe pas de convention préventive de la double imposition (ci-après CPDI) en vigueur avec la Belgique et où il ne peut dès lors être question d’établissement stable (10).
(10) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 67.
12. Il est précisé qu’il ne peut être question de dispositif hybride que lorsque les intervenants (une société résidente ou un établissement belge d’une part et, une entreprise étrangère ou une implantation de celle-ci d’autre part) sont des entreprises associées, qui :
- soit font partie de la même entreprise ;
- soit agissent dans le cadre d’un dispositif structuré (11).
(11) Art. 2, § 1er, 16°, al. 2, CIR 92.
13. L’art. 2, § 1er, 16°, al. 3, CIR 92, précise ce qu’il convient d’entendre par entreprise associée. Ainsi, une société résidente, ou un établissement belge, et une entreprise étrangère, ou une implantation de celle-ci, sont des entreprises associées lorsque :
- l'entreprise étrangère est une entité dans laquelle la société résidente ou l'établissement belge détient, directement ou indirectement, une participation de 50 % ou plus en matière de droits de vote ou de capital, ou dont il est en droit de recevoir 50 % ou plus des bénéfices de cette entité ;
- l'entreprise étrangère, ou l'implantation de celle-ci, est une personne physique ou une entité qui détient, directement ou indirectement, une participation de 50 % ou plus en matière de droits de vote ou de capital de la société résidente, ou qui est en droit de recevoir 50 % ou plus des bénéfices de la société résidente ;
- une personne physique ou une entité détient, directement ou indirectement, une participation de 50 % ou plus en matière de droits de vote ou de capital de la société résidente et de l'entreprise étrangère ;
- la société résidente, ou l'établissement belge, et l'entreprise étrangère, ou l'implantation de celle-ci, font partie du même groupe consolidé à des fins de comptabilité financière (voir n° 16 ci-après) ;
- l’un exerce une influence notable sur la gestion de l’autre.
14. L’art. 2, § 1er, 16°, al. 4, CIR 92 précise que le seuil de 50 % susmentionné est ramené à 25 % en cas de dispositif impliquant un paiement effectué au titre d'un instrument financier.
15. Une personne qui agit conjointement avec une autre personne au titre des droits de vote ou de la propriété du capital d'une entité est également considérée comme détenant une participation dans l'ensemble des droits de vote ou des capitaux de cette entité qui sont détenus par l'autre personne ou les autres personnes (12). Dans ce cas, les droits de vote ou de capital de ces personnes doivent être additionnés afin de déterminer les seuils susvisés.
(12) Art. 2, § 1er, 16°, al. 5, CIR 92.
16. L’art. 2, § 1er, 16°, al. 6, CIR 92, précise qu’un groupe consolidé à des fins de comptabilité financière est un groupe composé de toutes les entités qui sont pleinement intégrées dans les états financiers consolidés établis conformément aux normes internationales d'information financière ou au système national d'information financière d'un État membre de l'Espace économique européen.
17. Une société résidente, ou un établissement belge, et une entreprise étrangère, ou une implantation de celle-ci, font partie de la même entreprise lorsque l'un constitue un établissement belge ou stable de l'autre ou que tous deux constituent des établissements belges ou stables de la même entreprise (13).
(13) Art. 2, § 1er, 16°, al. 7, CIR 92.
18. Il ressort de l’art. 2, § 1er, 16°, al. 8, CIR 92, qu’une société résidente, ou un établissement belge, et une entreprise étrangère, ou une implantation de celle-ci, agissent dans le cadre d'un dispositif structuré lorsqu’elles agissent :
- dans le cadre d’un dispositif :
* produisant une déduction dans le chef de chacun d'eux, ou une déduction, dans le chef de l'un, jointe à une absence d'imposition, dans le chef de l'autre, et
* dont les termes intègrent déjà la valorisation de cet effet ;
- dans le cadre d’un dispositif qui a été conçu de manière telle à générer l’effet d’un dispositif hybride.
Cependant, il ne peut s’agir d’un dispositif structuré dans le chef d’un des intervenants au dispositif lorsqu’on ne peut pas raisonnablement attendre de celui-ci qu'il soit informé de l'existence du dispositif hybride et pour autant qu'il n’ait pas bénéficié d’un avantage fiscal en découlant.
19. L’art. 2, § 1er, 16°, al. 9, CIR 92, précise qu’il ne peut être question de dispositif hybride donnant lieu à une déduction dans le chef d’un des intervenants, jointe à une absence d’imposition dans le chef d’un autre intervenant (« déduction sans inclusion »), lorsque l’absence d'imposition dans le chef du bénéficiaire est uniquement due :
- au régime fiscal exorbitant du droit commun qui lui est applicable, ou
- à des différences dans la valeur attribuée à un paiement, y compris par l'application des prix de transfert.
20. Par entité hybride, on entend toute entité ou tout dispositif qui est considéré comme une entité imposable en vertu des lois d'une juridiction et dont les revenus ou les dépenses sont considérés comme les revenus ou les dépenses d'une ou plusieurs autres personnes en vertu des lois d'une autre juridiction (14).
(14) Art. 2, § 1er, 17°, CIR 92.
21. Par transfert hybride, on entend tout dispositif permettant de transférer un instrument financier lorsque le rendement sous-jacent de l'instrument financier transféré est considéré à des fins fiscales comme obtenu simultanément par plusieurs des parties à ce dispositif (15).
(15) Art. 2, § 1er, 18°, CIR 92.
22. On entend par instrument financier, tout instrument dans la mesure où il génère un rendement financier ou un rendement de capitaux propres soumis aux règles d’imposition applicable aux titres de dette, titres de participation ou produits dérivés selon les lois belges ou celles de l’État de l’entreprise étrangère, ou de l’implantation de celle-ci, y compris tout transfert hybride (16). Il convient de noter que cette définition ne s’applique pas pour définir une entreprise associée (voir n° 14).
(16) Art. 185, § 2/1, al. 2, a), CIR 92 et art. 198, § 1er, 10°/2, a), al. 4, CIR 92.
23. On entend par transfert hybride sur le marché, tout transfert hybride auquel procède un négociant financier dans le cadre de ses activités habituelles, et non dans le cadre d’un dispositif structuré (17).
(17) Art. 185, § 2/1, al. 2, a), CIR 92 et art. 198, § 1er, 10°/2, a), al. 4, CIR 92.
24. On entend par négociant financier, toute personne ou entité qui exerce une activité professionnelle consistant à acheter ou vendre régulièrement des instruments financiers pour son propre compte afin de réaliser un bénéfice (18).
(18) Art. 185, § 2/1, al. 2, a), CIR 92 et art. 198, § 1er, 10°/2, a), al. 4, CIR 92.
25. Il appartient à la personne ou à l’entité concernée de démontrer que cette activité d’achat et de vente est son activité professionnelle.
26. Les dispositions mises en place visent donc un certain nombre de dispositifs hybrides dont on peut présumer qu’ils ont été mis en place en vue d’organiser l’érosion de la base imposable des sociétés impliquées. Ces dispositions prévoient en conséquence des ajustements qui consistent, selon le cas, à :
- augmenter les bénéfices imposables (art. 185, § 1er, al. 2 à 4, et § 2/1, CIR 92), ou
- refuser la déduction de certaines dépenses à titre de frais professionnels (art. 198, § 1er, 10°/1 à 10°/4, CIR 92), ou
- limiter l’imputation de la QFIE (art. 292, al. 4, CIR 92) (19).
(19) Voir également n°s 4 et 5.
27. Les ajustements prévus en vue de lutter contre les dispositifs hybrides visent les situations ou ces dispositifs hybrides sont imputables aux différences existant dans la qualification juridique d’un instrument financier ou d’une entité et ils ne sont pas destinés à porter atteinte aux caractéristiques générales du système fiscal d’une juridiction (20).
(20) Voir considérant n° 13, Directive (UE) 2016/1164 du Conseil du 12 juillet 2016 établissant des règles pour lutter contre les pratiques d’évasion fiscale qui ont une incidence directe sur le fonctionnement du marché intérieur ; voir en ce sens n° 19.
28. En outre, ces ajustements ne doivent pas être appliqués lorsque des ajustements neutralisant les effets du dispositif hybride ont déjà été réalisés par la juridiction étrangère. En l’espèce, on ne se trouve plus en présence d’un dispositif hybride visé à l’art. 2, § 1er, 16°, CIR 92, ce qui rend les dispositions commentées ci-après inopérantes (21).
(21) Voir en ce sens Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 68 et Doc. parl., Chambre, session 2019-2020, DOC 55 0828/001, p. 15.
29. Une société résidente dispose d’un établissement stable situé dans un État membre de l’UE avec lequel la Belgique a conclu une CPDI.
30. Le dispositif mis en place permet d’une part, la déduction, dans le chef d’un intervenant étranger, d’un paiement effectué au profit de l’établissement stable étranger, et, d’autre part, l’absence d’inclusion de ce paiement dans les revenus imposables de cet établissement stable en raison du fait que, dans la juridiction où il est situé, il n’est pas considéré comme tel. En revanche, la Belgique reconnaît l’existence d’un tel établissement, et exonère ce paiement dans le chef de la société résidente en application de la CPDI (22).
(22) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 42.
31. Sur base de l’art. 185, § 1er, al. 2, CIR 92, l’exonération prévue par la CPDI est refusée, lorsque celle-ci a été conclue avec un État membre de l’UE (23).
(23) La Belgique ne peut refuser l’exonération prévue dans une CPDI conclue avec un État non-membre de l’UE car celui-ci n’est pas tenu par la transposition des directives européennes (voir en ce sens l’art. 9, point 5, Directive ATAD 1, tel que modifié par l’art. 1, 4), Directive ATAD 2).
32. En d’autres termes, les bénéfices normalement attribuables à l’établissement stable sont imposables dans le chef de la société résidente, dans la mesure où ces bénéfices sont générés dans le cadre d’un dispositif hybride, c’est-à-dire dans la mesure où ils ont pu être déduits des bénéfices dans la juridiction du payeur et où ils n’ont pas été imposés dans la juridiction de l’établissement stable en raison de la non-reconnaissance de celui-ci.
33. Cette disposition n’est pas applicable lorsque l’absence d’imposition dans la juridiction de l’établissement stable n’est pas due à la non-reconnaissance de celui-ci. Ainsi, les revenus en question ne peuvent être considérés comme des bénéfices imposables de la société résidente en vertu de l’art. 185, § 1er, al. 2, CIR 92, lorsque son établissement stable étranger est reconnu comme tel par la juridiction où il est situé et y est soumis à un régime fiscal exorbitant du droit commun (24).
(24) Art. 2, § 1er, 16°, al. 9, CIR 92 ; voir aussi n° 19.
34. Bel Co est une société résidente qui développe des logiciels. Bel Co dispose d’un établissement stable dans le pays A, État Membre de l’UE. Cet établissement de Bel Co octroie une licence de logiciel à B Co, une autre société du groupe résidant dans le pays B, afin qu’elle s’en serve pour son activité de prestations de service aux clients externes. B Co paie une redevance pour licence déductible à l’établissement de Bel Co qui, en vertu du droit belge, est considérée comme un revenu de l’établissement stable dans le pays A (25).
(25) Exemple inspiré du rapport OCDE (2017), « Neutraliser les effets des dispositifs hybrides impliquant une succursale, Action 2 : Cadre inclusif sur le BEPS », Projet OCDE/G20 sur l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices, Éditions OCDE, Paris, exemple 1, pp. 66 et s.
35. Dans ce cas, en principe, la Belgique exonère les revenus provenant de l’établissement stable étranger en vertu de la CPDI conclue avec le pays A, ce qui signifie que la redevance pour licence n’est pas soumise à l’impôt en Belgique. Cependant, l’établissement stable n’est pas reconnu comme tel dans le pays A et n’y est pas non plus soumis à l’impôt.
36. Vu que le dispositif décrit remplit les conditions de l’art. 185, § 1er, al. 2, CIR 92, l’application de la CPDI est refusée et la redevance est imposable en Belgique dans le chef de Bel Co.
37. Un paiement est effectué par un intervenant étranger à une entité constituée ou établie en Belgique et considérée comme fiscalement transparente en vertu de l’art. 29, CIR 92.
38. Le dispositif visé repose sur le fait que les juridictions des partenaires (voir n° 41) de cette entité considèrent celle-ci comme fiscalement non-transparente (26).
(26) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, pp. 42 et 43.
On parle ici d’entité hybride inversée. Il s’agit d’une entité distincte selon les lois de la juridiction de l’investisseur (partenaire) mais fiscalement transparente selon les lois de la juridiction où elle est établie.
39. Dans ce cas, le paiement est déductible dans le chef de celui qui l’a effectué, alors qu’il n’est imposable, ni dans les juridictions des partenaires qui considèrent que ces revenus sont imposables dans le chef de l’entité belge, ni en Belgique qui considère que ces revenus sont imposables dans le chef des partenaires.
40. Sur base de l’art. 185, § 1er, al. 3, CIR 92, l’entité visée à l’art. 29, CIR 92, constituée ou établie en Belgique, est considérée comme une société résidente dont les bénéfices sont imposables dans son propre chef. Ces bénéfices sont imposés dans la mesure où ils ne sont pas, par ailleurs, imposés dans le chef des partenaires (membres) de l’entité, soit en Belgique (en application des art. 29, 228, § 2, 3°, e) ou 229, § 3, CIR 92), soit dans toute autre juridiction (27).
(27) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 43.
41. On entend ici par partenaire, une ou plusieurs entités associées non-résidentes détenant globalement un intérêt direct ou indirect de 50 % ou plus des droits de vote, des participations au capital ou des droits de participation aux bénéfices de l’entité belge (28).
(28) Art. 185, § 1er, al. 3, CIR 92.
42. Cette mesure n’est pas applicable aux organismes de placement collectif (29).
(29) Art. 185, § 1er, al. 4, CIR 92.
43. Deux individus, soit un résident belge (individu belge) et un résident du pays A (individu A), prévoient de consentir un prêt à A Co, une société appartenant entièrement à l'individu A. Plutôt que de consentir le prêt à la société directement, les individus belge et A injectent des fonds propres dans Bel Co, une entité constituée en Belgique et visée par l’art. 29, § 1er, CIR 92. Bel Co accorde un prêt à A Co, laquelle verse des intérêts déductibles.
En vertu de l’art. 29, § 1er, CIR 92, l’entité Bel Co est fiscalement transparente. En conséquence, une moitié du paiement des intérêts est attribuée à l'individu A. L'autre moitié est attribuée à l'individu belge et est incorporée dans sa base imposable à l’IPP.
En revanche, au regard du droit du pays A, Bel Co qualifie de société étrangère (entité non-transparente) et les revenus correspondants sont donc attribués à cette société (30).
(30) Exemple inspiré du rapport OCDE (2017), « Neutraliser les effets des dispositifs hybrides, Action 2 – Rapport final 2015 », Projet OCDE/G20 sur l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices, Éditions OCDE, Paris, exemple 4.2, pp. 324 et s.
44. L’entité Bel Co est une entité hybride inversée visée par l’art. 185, § 1er, al. 3, CIR 92. En conséquence, elle est considérée en ce qui concerne ces revenus comme une société résidente dont les bénéfices sont imposables dans son propre chef. Ces bénéfices sont imposés dans la mesure où ils ne sont pas, par ailleurs, imposés dans le chef des partenaires.
45. Un paiement est effectué au titre d’un instrument financier (voir définition supra n° 22) par une entreprise étrangère ou une implantation de celle-ci en faveur d’une société résidente ou d’un établissement belge. Ce paiement est déduit dans le chef de l’intervenant étranger, sans que le revenu correspondant ne soit inclus dans la base imposable du bénéficiaire belge.
46. Le dispositif hybride est basé sur les différences existant dans la qualification donnée par la Belgique et l’Etat du payeur à l’instrument financier ou au revenu généré dans le cadre de cet instrument financier.
47. Sur base de l’art. 185, § 2/1, al. 1 et 2, a), CIR 92, ce paiement est inclus parmi les revenus imposables du bénéficiaire belge pour autant que ce revenu soit généré dans le cadre d’un dispositif hybride.
48. Cette disposition trouve donc à s’appliquer lorsque les revenus générés dans le cadre d’un instrument financier ne sont pas repris dans les bénéfices de la société résidente ou de l’établissement belge bénéficiaire dans la mesure où l’entreprise étrangère ou une implantation de celle-ci est autorisée à les déduire de ses revenus imposables. Cette « déduction sans inclusion » doit trouver son origine dans les différences existant dans la qualification de l’instrument financier ou du revenu qu’il génère.
49. Ainsi, un revenu généré dans le cadre d'un instrument financier ne devrait pas être considéré comme donnant lieu à un dispositif hybride lorsque l’absence d’imposition en Belgique est uniquement imputable au statut fiscal du bénéficiaire ou au fait que l'instrument est détenu sous réserve des modalités d'un régime spécial (31).
(31) Voir considérant n° 16, Directive (UE) 2017/952 du Conseil du 29 mai 2017 modifiant la directive (UE) 2016/1164 en ce qui concerne les dispositifs hybrides faisant intervenir des pays tiers.
50. Cette disposition s’applique sans préjudice de l’art. 203, § 1er, 6°, CIR 92 (32). Ce dernier article est seul applicable en présence de revenus susceptibles de bénéficier du régime des revenus définitivement taxés (RDT) (33).
Une telle primauté de l’exclusion du régime RDT s’explique par le fait que lorsque les dispositions d’une autre directive neutralisent l’asymétrie dans les conséquences fiscales, les règles relatives aux dispositifs hybrides ne s’appliquent pas (34).
(32) Art. 185, § 2/1, al. 1er, CIR 92.
(33) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 43.
(34) Considérant n° 30, Directive (UE) 2017/952 du Conseil du 29 mai 2017 modifiant la directive (UE) 2016/1164 en ce qui concerne les dispositifs hybrides faisant intervenir des pays tiers.
51. Pour rappel, en cas de dispositif impliquant un paiement effectué au titre d'un instrument financier, le seuil de 50 % de détention d’une participation aux droits de vote ou au capital ou de participation aux bénéfices est ramené à 25 % (voir également n° 14).
52. Il ne peut être question de dispositif hybride lorsque le revenu représentant le rendement sous-jacent d’un instrument financier transféré est payé :
- par un négociant financier (voir la définition au n° 24) ;
- dans le cadre d’un transfert hybride sur le marché (voir la définition au n° 23) ;
- à condition que la juridiction du payeur exige du négociant financier qu’il inclue dans ses revenus tous les montants reçus en rapport avec l’instrument financier transféré.
53. Il ressort explicitement du texte légal que cette exception n’est applicable que lorsque le transfert hybride a lieu dans le cadre des activités professionnelles habituelles du négociant financier, et non dans le cadre d’un dispositif structuré.
54. Bel Co est une société résidente et détient toutes les actions de A Co, une société qui a sa résidence dans le pays A. Les actions détenues par Bel Co sont traitées comme un titre de dette aux termes des lois du pays A, mais comme un titre de participation (c'est-à-dire une action) aux termes du droit belge. Les sommes payées en rémunération des apports sont considérés comme une dépense déductible aux termes des lois du pays A, mais comme des dividendes aux termes du droit belge (35).
(35) Exemple inspiré du rapport OCDE (2017), « Neutraliser les effets des dispositifs hybrides, Action 2 – Rapport final 2015 », Projet OCDE/G20 sur l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices, Éditions OCDE, Paris, exemple 1.1, pp. 193 et s.
55. Si l’art. 203, § 1er, 6°, CIR 92, est applicable, l’exonération fiscale du dividende sera refusée en Belgique et aucune asymétrie ne se produira aux fins de la règle relative aux instruments financiers hybrides.
En revanche, dans l’hypothèse où l’art. 203, § 1er, 6°, CIR 92, n’était pas applicable, le paiement d’intérêts créerait une asymétrie hybride visée par la règle relative aux instruments financiers hybrides et le montant de ces intérêts devrait être inclus dans les bénéfices imposables de Bel Co.
56. Une entreprise étrangère ou une implantation de celle-ci, qui est une entité hybride (voir n° 20), en l’espèce considérée comme fiscalement transparente par la Belgique mais comme fiscalement non-transparente par la juridiction dans laquelle elle est établie, effectue un paiement en faveur d’une société résidente ou d’un établissement belge.
57. Il résulte de cette divergence de qualification une déduction du paiement dans le chef de l’entité hybride étrangère sans inclusion correspondante parmi les revenus imposables du bénéficiaire belge (36).
(36) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 43.
58. Sur base de l’art. 185, § 2/1, al. 1er et 2, b), CIR 92, le revenu payé ou considéré comme tel en vertu des lois d’un autre État, est inclus dans les revenus imposables de la société résidente ou de l’établissement belge, dans la mesure où il est, pour l’entité hybride, déductible des revenus imposables qui ne figurent pas également parmi les revenus imposables du bénéficiaire belge (37).
(37) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 44.
59. Le paiement ne peut donc être inclus dans les revenus imposables du bénéficiaire belge sur base de l’art. 185, § 2/1, al. 1er et 2, b), CIR 92, si celui-ci est déduit, dans le chef du payeur, des revenus qui sont imposables à la fois par la juridiction étrangère et par la Belgique (revenus soumis à une « double inclusion »).
60. Bel Co constitue A Co 1 comme société holding à l'égard de sa filiale exploitante (A Co 2). A Co 1 est une entité hybride (au sens du n° 20). A Co 2 est réputée être une entité imposable distincte suivant la législation de la Belgique et du pays A.
A Co 1 contracte un emprunt auprès de Bel Co, puis A Co 1 utilise ces fonds pour accorder un prêt hybride à A Co 2. Les paiements d'intérêts au titre de ce dernier prêt sont traités comme revenu ordinaire dans la législation du pays A, mais comme des paiements de dividendes exonérés en droit belge (pour les besoins de cet exemple, il est totalement fait abstraction de l’art. 203, § 1er, 6°, CIR 92).
Puisque A Co 1 est une entité transparente d’un point de vue belge, le paiement d'intérêts au titre du prêt conclu entre Bel Co et A Co 1 n'est pas soumis à l'impôt et ne génère aucun revenu en Belgique. Bien que le paiement d'intérêts au titre du prêt hybride (entre A Co 1 et A Co 2) soit reconnu en Belgique (il est censé avoir lieu entre A Co 2 et Bel Co), il est traité comme un paiement de dividendes exonérés aux fins de l'impôt et n'est pas pris en compte dans le calcul du revenu net enregistré par Bel Co (38).
(38) Exemple inspiré du rapport OCDE (2017), « Neutraliser les effets des dispositifs hybrides, Action 2 – Rapport final 2015 », Projet OCDE/G20 sur l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices, Éditions OCDE, Paris, exemple 3.1, pp. 311 et s.
61. En application de l’art. 185, § 2/1, al. 1er et 2, b), CIR 92, le montant correspondant au paiement d’intérêts au titre du prêt conclu entre Bel Co et A Co 1 est inclus dans les revenus imposables de Bel Co.
62. Sont visés les dispositifs hybrides impliquant la déduction d’un même paiement à la fois par une société résidente ou un établissement belge, de ses revenus imposables en Belgique, et par une entreprise étrangère, ou une implantation de celle-ci, de ses revenus imposables à l’étranger.
63. Sur base de l’art. 198, § 1er, 10°/1, al. 1er, CIR 92, la déduction de tels paiements est refusée aussi bien durant la période imposable à laquelle ils se rattachent que lors de toute période imposable suivante au cours de laquelle leur déduction serait sollicitée, dans la mesure où l’intervenant belge qui entend les déduire, entend les déduire de revenus professionnels qui ne figurent pas également parmi les revenus imposables d’un intervenant étranger (39).
(39) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 65.
64. Ce refus de déduction ne s’applique donc pas si le paiement est déduit des mêmes revenus professionnels qui sont également imposables dans la juridiction étrangère (revenus soumis à une « double inclusion »).
Dans l’hypothèse où les frais exposés par la société résidente ont servi à fournir des biens ou des prestations (dont le prix est déterminé ou non via un cost-plus) en faveur de la société étrangère, qui sont également déduits dans le chef de cette dernière lors de l’intégration de la société résidente par application du principe de transparence fiscale dans la juridiction où est établie la société étrangère (40), la double inclusion est rencontrée si les revenus imposables de la société étrangère comprennent les paiements par un tiers pour une prestation qui inclut les biens ou les prestations fournis par la société résidente à la société étrangère.
(40) Il est postulé que lors de l’intégration, le chiffre d’affaires réalisé en Belgique avec la société étrangère n’est pas reconnu comme bénéfice imposable dans le chef de cette dernière.
65. En outre, l’art. 198, § 1er, 10°/1, al. 2, CIR 92, prévoit que les paiements dont la déduction a initialement été refusée sur base de l’alinéa 1er, peuvent être déduits des revenus professionnels des périodes imposables suivantes, dans la mesure où ces revenus professionnels figurent également parmi les revenus imposables d’un intervenant étranger (entreprise étrangère ou son implantation). En d’autres termes, la déduction est autorisée dans la mesure où elle est imputée sur des revenus soumis à une « double inclusion ».
66. Bel Co constitue une succursale dans le pays A. La succursale contracte un emprunt auprès d'une banque locale. Les intérêts d'emprunt sont déductibles à la fois en Belgique et dans le pays A. La succursale n'a aucune source de revenus. La perte née du paiement d’intérêts est déductible.
Bel Co effectue donc un paiement d'intérêts qui est déductible sous la législation du pays A (juridiction du payeur) et qui déclenche une deuxième déduction en sa faveur en vertu du droit belge (41).
(41) Exemple inspiré du rapport OCDE (2017), « Neutraliser les effets des dispositifs hybrides, Action 2 – Rapport final 2015 », Projet OCDE/G20 sur l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices, Éditions OCDE, Paris, exemple 6.2, pp. 340 et s.
67. En vertu de l’art. 198, § 1er, 10°/1, al. 1er, CIR 92, Bel Co ne peut imputer la déduction des intérêts sur ses autres revenus. Elle peut éventuellement appliquer la déduction excédentaire sur la part de son revenu soumise à une double inclusion dans le cadre du présent dispositif au cours d’une période imposable ultérieure conformément à l’art. 198, § 1er, 10°/1, al. 2, CIR 92.
68. L’art. 198, § 1er, 10°/2, CIR 92 vise à lutter contre 6 types de dispositifs hybrides impliquant la déduction d’un paiement dans le chef d’un intervenant belge, sans inclusion correspondante parmi les revenus imposables du bénéficiaire étranger. La déduction des paiements effectués dans le cadre de ces dispositifs hybrides est refusée en vertu de l’art. 198, § 1er, 10°/2, a) à f), CIR 92 (42).
(42) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, pp. 65 à 68.
69. Est visé le paiement effectué au titre d’un instrument financier (voir définition n° 22) par un intervenant établi en Belgique en faveur d’un bénéficiaire étranger lorsque ce paiement est déduit dans le chef de l’intervenant belge, sans que le revenu correspondant ne soit inclus dans la base imposable du bénéficiaire étranger.
70. Cette situation correspond au premier des deux types de dispositifs hybrides visés à l’art. 185, § 2/1, CIR 92, commenté ci-dessus (voir n° 45 et suivants), mais envisagé, cette fois, du point de vue de l’auteur du paiement et non plus du point de vue du bénéficiaire (43).
(43) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 66.
71. Sur base de l’art. 198, § 1er, 10°/2, a), CIR 92, la déduction d’un tel paiement est refusée :
- dans la mesure où ce paiement ne figure pas dans les revenus imposables du bénéficiaire en raison de différences existant dans la qualification de l’instrument financier ou du paiement effectué au titre de cet instrument, et
- ce paiement n’est pas inclus dans un délai raisonnable parmi les revenus imposables du bénéficiaire.
72. Un paiement effectué dans le cadre d'un instrument financier ne devrait pas être considéré comme donnant lieu à un dispositif hybride lorsque l’absence d’imposition est uniquement imputable au statut fiscal du bénéficiaire ou au fait que l'instrument est détenu sous réserve des modalités d'un régime spécial (44).
(44) Voir considérant n° 16, Directive (UE) 2017/952 du Conseil du 29 mai 2017 modifiant la directive (UE) 2016/1164 en ce qui concerne les dispositifs hybrides faisant intervenir des pays tiers ; voir également le n° 49.
73. Pour rappel, en cas de dispositif impliquant un paiement effectué au titre d'un instrument financier, le seuil de 50 % de détention d’une participation aux droits de vote ou au capital ou de participation aux bénéfices est ramené à 25 % (voir également le n° 14).
74. La déduction des paiements effectués dans le cadre d’un tel dispositif hybride n’est toutefois pas refusée si l’absence d’inclusion correspondante parmi les revenus imposables du bénéficiaire étranger n’est que temporaire. Il n’est en effet pas question d’organisation d’une érosion de base imposable lorsque l’absence d’inclusion correspondante parmi les revenus imposables du bénéficiaire étranger s’explique par le fait que les juridictions concernées utilisent des périodes imposables différentes et appliquent des règles différentes pour la prise en compte du moment où des éléments de revenus ou de dépenses ont été respectivement perçus ou supportés (45).
(45) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 66.
75. L’art. 198, § 1er, 10°/2, a), al. 2, CIR 92, précise le caractère raisonnable du délai. Ainsi, un paiement effectué au titre d’un instrument financier est considéré comme inclus dans les revenus imposables du bénéficiaire dans un délai raisonnable dans les deux situations suivantes :
- le paiement est inclus par la juridiction du bénéficiaire dans une période imposable qui commence dans les 12 mois suivant la fin de la période imposable du payeur ;
- il est raisonnable de penser que le paiement sera inclus par la juridiction du bénéficiaire dans une période imposable ultérieure et les conditions du paiement sont celles dont il serait envisageable que des entreprises indépendantes conviennent entre elles.
76. En revanche, la déduction de paiements qui ne sont pas inclus dans un délai raisonnable parmi les revenus imposables du bénéficiaire doit être refusée (46).
(46) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 66 ; voir n° 71, 2e tiret.
77. En vertu de la même disposition, il ne peut être question de dispositif hybride lorsque le revenu représentant le rendement sous-jacent d’un instrument financier transféré est payé :
- par un négociant financier (voir définition n° 24) ;
- dans le cadre d’un transfert hybride sur le marché (voir définition n° 23).
78. Il ressort du texte légal que cette exception n’est applicable que lorsque le transfert hybride a lieu dans le cadre des activités professionnelles habituelles du négociant financier.
79. A Co est une société résidente du pays A qui détient toutes les actions de Bel Co, société résidente. A Co prête de l’argent à Bel Co. Le prêt porte intérêts au taux du marché, et les intérêts sont payables tous les six mois à terme échu.
Le prêt est traité comme un titre de créance aux termes du droit belge, mais comme un titre de participation en capital (c'est-à-dire une action) aux termes du droit du pays A. Les paiements sont considérés comme des intérêts aux termes du droit belge, mais comme des dividendes aux termes du droit du pays A (47).
(47) Exemple inspiré du rapport OCDE (2017), « Neutraliser les effets des dispositifs hybrides, Action 2 – Rapport final 2015 », Projet OCDE/G20 sur l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices, Éditions OCDE, Paris, exemple 1.1, pp. 193 et s.
80. Dans cette situation, et en vertu de l’art. 198, § 1er, 10°/2, a), CIR 92, la déduction du paiement des intérêts concernés est refusée dans la mesure où ces intérêts ne sont pas inclus en tant que revenus dans la base imposable de A Co.
81. Est visé le paiement effectué par une société résidente ou un établissement belge en faveur d’une entité hybride. Ce paiement est déduit des revenus imposables du payeur, sans être inclus dans les revenus imposables du bénéficiaire dans sa juridiction.
82. Cette situation implique un paiement à une entité hybride dite inversée (voir n° 38), c’est-à-dire une entité hybride qui est considérée comme une entité imposable en vertu des lois belges et comme une entité dont les revenus ou les dépenses sont considérés comme les revenus ou les dépenses d’une ou plusieurs autres personnes en vertu des lois d’une autre juridiction (48). En d’autres termes, cette entité hybride est considérée comme une entité distincte imposable selon le droit belge alors qu’elle est transparente suivant la juridiction étrangère.
(48) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 66.
83. Sur base de l’art. 198, § 1er, 10°/2, b), CIR 92, la déduction d’un tel paiement est refusée. Comme pour les autres ajustements prévus, la déduction sera admise si le revenu correspondant a été inclus dans les revenus imposables du bénéficiaire (49).
(49) Doc. parl., Chambre, session 2019-2020, DOC 55 0828/001, p. 15.
84. Deux individus, soit un résident du pays B (individu B) et un résident du pays A (individu A), prévoient de consentir un prêt à Bel Co, une société appartenant entièrement à l'individu B. Plutôt que de consentir le prêt à la société directement, l’individu B et l’individu A injectent des fonds propres dans A Co, une entité hybride constituée dans le pays A. A Co accorde un prêt à Bel Co, laquelle verse des intérêts.
Dans la législation du pays A, l’entité A Co est transparente. En conséquence, une moitié du paiement est attribuée à l'individu B et est exonérée d'impôt à titre de revenu de source étrangère acquis par un non-résident. L'autre moitié est attribuée à l'individu A et est soumise à l'impôt au taux applicable aux intérêts.
En revanche, au regard du droit belge, A Co qualifie de société étrangère (entité non-transparente) et les revenus correspondants sont donc attribués à cette société (50).
(50) Cet exemple est inspiré du rapport OCDE (2017), « Neutraliser les effets des dispositifs hybrides, Action 2 – Rapport final 2015 », Projet OCDE/G20 sur l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices, Éditions OCDE, Paris, exemple 4.2, pp. 324 et s.
85. Les intérêts sont versés à une entité hybride inversée (A Co). Le paiement d'intérêts est en principe déductible en Belgique, mais le fait que le pays A attribue la moitié de ce paiement à un non-résident (en exonération d’impôt), en l’espèce l’individu B, a pour conséquence que ce revenu n'est pas entièrement soumis à l’impôt du pays A.
Dès lors, sur base de l’art. 198, § 1er, 10°/2, b), CIR 92, la déduction des intérêts correspondant sera refusée dans le chef de Bel Co dans la mesure où ces intérêts ne sont pas imposés dans le pays A (en l’occurrence, pour moitié).
86. Est visé le paiement effectué par une société résidente ou un établissement belge en faveur d’une entité disposant d’une ou plusieurs implantations. Ce paiement est déduit des revenus imposables du payeur mais ne figure pas parmi les revenus imposables de l’entité car la juridiction du siège de l’entité considère que ce paiement est attribuable à une implantation située dans une autre juridiction. En conséquence, la juridiction du siège exonère ces paiements, alors que la juridiction de l’implantation considère qu’il est attribuable au siège de l’entité et ne l’impose donc pas non plus (51).
(51) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, pp. 66 et 67.
87. Sur base de l’art. 198, § 1er, 10°/2, c), CIR 92, la déduction de ce paiement est refusée lorsque le fait que ce paiement ne figure pas parmi les revenus imposables de l’entité résulte de différences dans l’attribution des paiements entre le siège de cette entité et son implantation ou entre deux implantations ou plus de cette entité en vertu des lois des juridictions où l’entité mène ses activités.
88. A Co est une société de conception de logiciels résidant dans le pays A. Elle crée une succursale dans le pays B. A Co octroie une licence de logiciel à Bel Co, une société belge du groupe, afin qu’elle s’en serve pour son activité de prestations de service aux clients externes. Bel Co paie une redevance pour licence à A Co qui, en vertu des lois du pays A, est considérée comme payée à la succursale dans le pays B.
Le pays A prévoit une exemption pour les revenus provenant d’une succursale étrangère, ce qui signifie que la redevance pour licence n’est pas soumise à l’impôt dans le pays A.
Elle n’est pas non plus soumise à l’impôt dans le pays B car ce dernier applique des règles différentes pour l’affectation des revenus à la succursale. En d’autres termes, les revenus sont, du point de vue du pays B, affectés au siège de A Co (52).
(52) Exemple inspiré du rapport OCDE (2017), « Neutraliser les effets des dispositifs hybrides impliquant une succursale, Action 2 : Cadre inclusif sur le BEPS », Projet OCDE/G20 sur l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices, Éditions OCDE, Paris, exemple 1, pp. 66 et s.
89. Dans cette hypothèse, l’art. 198, § 1er, 10°/2, c), CIR 92, doit s’appliquer dans le chef de Bel Co de manière à refuser la déduction de la redevance des revenus imposables en Belgique.
90. Est visé le paiement effectué par une société résidente ou un établissement belge en faveur d’une implantation qui est considérée comme donnant lieu à un établissement stable en vertu des lois de la juridiction du siège de l’entité dont elle fait partie, mais qui n’est pas considéré comme un établissement stable selon les lois de la juridiction où l’implantation est située.
Il résulte d’un tel dispositif hybride que le paiement déduit dans le chef de l’intervenant belge est en principe exonéré dans le chef du siège de l’entité, tout en n’étant pas imposé dans le chef de l’implantation (53).
(53) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 67.
91. Sur base de l’art. 198, § 1er, 10°/2, d), CIR 92, la déduction de ce paiement est refusée, sauf si le revenu correspondant est considéré comme imposable en vertu des lois de la juridiction du siège de l’entité dont l’implantation fait partie.
92. Par exemple, le paiement est déductible si la juridiction précitée recourt au système de l’imputation ou fait application d’une règle comparable à celle de l’article 185, § 1er, al. 2, CIR 92, tel que commentée ci-dessus (voir n° 31 et suivants) (54).
(54) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 67.
93. En d’autres termes, le paiement est déductible en Belgique si le pouvoir d’imposition de la juridiction de l’établissement stable qui n’y est pas reconnu comme tel, est transféré à la juridiction du siège de l’entité, en vertu de la législation de cette dernière.
94. A Co est une société de conception de logiciels résidant dans le pays A. Elle crée une succursale dans le pays B. A Co octroie une licence de logiciel à Bel Co, une société belge du groupe, afin qu’elle s’en serve pour son activité de prestations de service aux clients externes. Bel Co paie une redevance pour licence à A Co qui, en vertu des lois du pays A, est considérée comme payée à la succursale dans le pays B.
Le pays A prévoit une exemption pour les revenus provenant d’une succursale étrangère, ce qui signifie que la redevance pour licence n’est pas soumise à l’impôt dans le pays A.
Elle n’est pas non plus soumise à l’impôt dans le pays B car la succursale ne crée pas de présence imposable de A Co selon le droit du pays B (55).
(55) Exemple inspiré du rapport OCDE (2017), « Neutraliser les effets des dispositifs hybrides impliquant une succursale, Action 2 : Cadre inclusif sur le BEPS », Projet OCDE/G20 sur l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices, Éditions OCDE, Paris, exemple 1, pp. 66 et s.
95. Si aucun ajustement n’est pratiqué en vertu des lois du pays A, l’art. 198, § 1er, 10°/2, d), CIR 92, doit s’appliquer dans le chef de Bel Co de manière à refuser la déduction de la redevance des revenus imposables en Belgique.
96. Est visé le paiement effectué par une entité établie en Belgique en faveur d’un bénéficiaire étranger. L’entité établie en Belgique est considérée comme fiscalement non-transparente par la Belgique mais comme fiscalement transparente par la juridiction du bénéficiaire. Il résulte en principe de cette divergence de vues une déduction dans le chef de l’entité hybride établie en Belgique sans inclusion correspondante parmi les revenus imposables du bénéficiaire étranger (56).
(56) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 67.
97. Ce dispositif correspond au dispositif hybride visé à l’art. 185, § 2/1, al. 2, b), CIR 92, commenté ci-avant au n°s 58 et suivants, envisagé cette fois du point de vue de l’auteur du paiement et non plus du point de vue du bénéficiaire (57).
(57) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 67.
98. Sur base de l’art. 198, § 1er, 10°/2, e), CIR 92, la déduction de ce paiement est refusée, dans la mesure où en l’absence de cette disposition, ce paiement serait déduit de revenus imposables qui ne figurent pas également parmi les revenus imposables du bénéficiaire (58).
(58) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 67.
99. Le paiement reste donc déductible s’il est porté en déduction, dans le chef de l’entité établie en Belgique, des revenus imposables qui figurent également parmi les revenus imposables du bénéficiaire (revenus soumis à une « double inclusion », voir n° 64, al. 2).
100. A Co constitue Bel Co 1 comme société holding à l'égard de sa filiale exploitante (Bel Co 2). Bel Co 1 est une entité hybride (voir n° 20). Elle est donc non-transparente en droit belge mais bien transparente selon le droit du pays A. Bel Co 2 est réputée être une entité imposable distincte dans la législation de la Belgique et du pays A.
Bel Co 1 contracte un emprunt auprès de A Co et ensuite utilise ces fonds pour accorder un prêt hybride à Bel Co 2. Les paiements d'intérêts au titre de ce prêt sont traités comme revenu ordinaire en droit belge, mais comme dividende exonéré par le pays A.
Puisque Bel Co 1 est une entité transparente du point de vue du pays A, le paiement d'intérêts au titre du prêt conclu entre A Co et Bel Co 1 n'est pas soumis à l'impôt et ne génère aucun revenu dans le pays A. Bien que le paiement d'intérêts au titre du prêt hybride (entre Bel Co 1 et Bel Co 2) soit reconnu dans le pays A (il est censé avoir lieu entre Bel Co 2 et A Co), il est traité comme dividende exonéré aux fins de l'impôt du pays A et n'est pas pris en compte dans le calcul du revenu net enregistré par A Co. Par conséquent, A Co ne comptabilise aucun revenu dans le cadre de cette structure (59).
(59) Exemple inspiré du rapport OCDE (2017), « Neutraliser les effets des dispositifs hybrides, Action 2 – Rapport final 2015 », Projet OCDE/G20 sur l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices, Éditions OCDE, Paris, exemple 3.1, pp. 311 et s.
101. En application de l’art. 198, § 1er, 10°/2, e), CIR 92, le montant correspondant au paiement d’intérêts au titre du prêt conclu entre Bel Co 1 et A Co, n’est pas déductible dans le chef de Bel Co 1 de ses revenus imposables.
102. Est visé le paiement réputé effectué entre le siège d’une entreprise et une de ses implantations ou entre deux ou plus de ses implantations. La juridiction du bénéficiaire du paiement ne prend pas en compte ce paiement à titre de revenus imposables alors que ce dernier est déduit des revenus imposables dans la juridiction du payeur.
103. À titre d’exemple, la déduction de ce paiement dans le chef de l’intervenant situé en Belgique (que ce soit le siège ou une implantation), sans inclusion correspondante parmi les revenus imposables du bénéficiaire étranger, peut notamment résulter de différences dans l’attribution d’actifs incorporels (entre le siège de l’entreprise et son implantation ou entre deux implantations ou plus de cette entreprise) au regard des lois des juridictions concernées.
Dans cette hypothèse, la Belgique considère que les actifs en rémunération de l’utilisation desquels le paiement est effectué sont attribuables au bénéficiaire situé à l’étranger, et par conséquent, permet la déduction dudit paiement. En revanche, la juridiction du bénéficiaire considère quant à elle que les actifs sont attribuables à l’intervenant situé en Belgique et que, par conséquent, le paiement n’est pas imposable dans le chef de ce bénéficiaire (60).
(60) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 68.
104. Sur base de l’art. 198, § 1er, 10°/2, f), CIR 92, la déduction de ce paiement est refusée dans la mesure où, en l’absence de cette disposition, ce paiement serait déduit de revenus imposables qui ne figurent pas également parmi les revenus imposables du bénéficiaire.
105. Le paiement reste donc déductible s’il est porté en déduction, dans le chef du siège de l’entreprise ou de l’implantation établie en Belgique, des revenus imposables qui figurent également parmi les revenus imposables du bénéficiaire de ce paiement (revenus soumis à une « double inclusion », voir n° 64, al 2.
106. A Co fournit des services à une société non liée (C Co) par l’intermédiaire d’une succursale située en Belgique. Les prestations fournies par la succursale font appel à des actifs incorporels sous-jacents qui appartiennent à A Co.
La Belgique attribue la propriété de ces actifs incorporels au siège (A Co) et considère en conséquence que la succursale belge effectue un paiement au prix de pleine concurrence afin de rémunérer A Co pour l’utilisation de ces actifs. Ce paiement réputé effectué est en principe déductible en vertu de la législation belge mais n’est pas reconnu par celle du pays A (parce que ce dernier attribue la propriété des actifs incorporels à la succursale).
Dans le même temps, les gains de la succursale rémunérant les prestations fournies sont exonérés d’impôt en vertu de la loi du pays A qui exonère dans ce pays les revenus des succursales ou les exclut du calcul du bénéfice imposable (61).
(61) Exemple inspiré du rapport OCDE (2017), « Neutraliser les effets des dispositifs hybrides impliquant une succursale, Action 2 : Cadre inclusif sur le BEPS », Projet OCDE/G20 sur l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices, Éditions OCDE, Paris, pp. 16 et s.
107. Sur base de l’art. 198, § 1er, 10°/2, f), CIR 92, la déduction de la redevance supposée payée est refusée dans le chef de la succursale belge. La déduction serait en revanche autorisée si les revenus correspondants étaient imposés à la fois en Belgique et dans le pays A.
108. Sont visés les dispositifs hybrides mis en place entre des intervenants localisés dans des juridictions étrangères mais dont les effets se propagent en Belgique (62).
(62) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 68.
109. Un dispositif hybride est mis en place entre deux intervenants étrangers. Ce dispositif hybride a pour conséquence dans les deux juridictions étrangères concernées soit une double déduction soit une déduction sans inclusion. Dans ce cadre, un autre intervenant, situé en Belgique, effectue des paiements en faveur d’un des intervenants étrangers. Ces paiements, déductibles en Belgique, sont inclus par la juridiction du bénéficiaire dans ses revenus imposables mais sont en réalité compensés par la déduction que ce dernier effectue dans le cadre du dispositif hybride mis en place par ailleurs.
110. En d’autres termes, ces dispositifs hybrides engendrent des dépenses déductibles dans le chef de plusieurs intervenants étrangers, ou dans le chef d’un seul intervenant étranger mais sans que, dans ce cas, à ces dépenses correspondent des revenus figurant parmi les revenus imposables du bénéficiaire étranger. Ces effets sont propagés en Belgique en y transférant la déduction au moyen d’un instrument financier ordinaire tel qu’un emprunt classique, que contracte un intervenant belge (également partie au dispositif hybride au sens de l’art. 2, § 1er, 16°, CIR 92) auprès d’un des intervenants étrangers (63).
(63) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 68.
111. En vertu de l’art. 198, § 1er, 10°/3, CIR 92, la déduction des paiements effectués par l’intervenant belge est refusée, à moins que les autres juridictions concernées neutralisent elles-mêmes les effets du dispositif hybride dans le chef des intervenants étrangers (64).
(64) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 68.
112. Un fonds résident du pays A, dont la vocation est d'accorder des prêts aux entreprises de taille moyenne (le Fonds), entame des négociations dans le but de financer, au moyen d'un prêt non garanti, le fonds de roulement de l’Emprunteur Co, société résidente.
Une fois les négociations enclenchées, l’Emprunteur Co et le Fonds reçoivent un avis fiscal les informant du fait que le prêt, en raison des conditions de subordination, sera traité comme instrument de capitaux propres (c'est-à-dire comme une action) sous la législation du pays A, mais comme instrument d'emprunt sous le régime fiscal belge.
Afin d'éviter les effets négatifs des règles applicables aux dispositifs hybrides en Belgique, le Fonds structure le prêt au moyen d'un dispositif en cascade conclu avec une filiale détenue entièrement dans le pays B (B Co). Le pays B traite également ce type de prêt subordonné en tant qu'instrument d'emprunt, mais il n'a pas instauré les règles applicables aux dispositifs hybrides. En conséquence, l’Emprunteur Co peut déduire les intérêts payés en faveur de B Co. B Co peut déduire les intérêts payés au Fonds, dans le chef duquel ces intérêts sont traités comme des dividendes exonérés. En conséquence, il y a bien une déduction au niveau de l’Emprunteur Co sans inclusion au niveau du Fonds (65).
(65) Exemple inspiré du rapport OCDE (2017), « Neutraliser les effets des dispositifs hybrides, Action 2 – Rapport final 2015 », Projet OCDE/G20 sur l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices, Éditions OCDE, Paris, exemple 10.5, pp. 477 et s.
113. Dans cette hypothèse, il est supposé qu’aucun ajustement n’ait été effectué ni par le pays A, ni par le pays B. Dès lors, étant donné que l’Emprunteur Co est partie au dispositif hybride au sens de l’art. 2, § 1er, 16°, CIR 92, et que l’effet du dispositif est importé en Belgique, la déduction des intérêts payés par l’Emprunteur Co à B Co est refusée en vertu de l’art. 198, § 1er, 10°/3, CIR 92.
114. Est visée la situation d’une société résidente au sens de l’art. 2, § 1er, 5°, b), CIR 92, qui est également considérée comme une société résidente par une ou plusieurs autres juridictions en application de leurs législations respectives. En conséquence, un même paiement pourrait être déduit dans chacune des juridictions où la société qualifie comme résidente (66).
(66) Voir en ce sens Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 69.
115. Conformément à l’art. 198, § 1er, 10°/4, CIR 92, la déduction d’un tel paiement est refusée dans la mesure où celui-ci est déductible (dans la juridiction (ou les autres juridictions) qui considère(nt) également la société comme résidente) de revenus imposables qui ne figurent pas parmi les revenus imposables de la société en Belgique (67).
(67) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 69.
116. Le paiement reste cependant déductible si celui-ci est déduit de revenus qui sont imposables aussi bien en Belgique que dans l’autre juridiction (revenus soumis à une « double inclusion », voir n° 64, al. 2).
117. Lorsque la juridiction (ou les autres juridictions) concernée(s) est (sont) un (des) État(s) membre(s) de l’UE, la déduction n’est refusée que dans l’État membre dans lequel la société n’est pas réputée être résidente en application de la CPDI en vigueur entre les États concernés (68). En d’autres termes, si la société est considérée comme une société résidente de la Belgique selon la CPDI en question, la déduction sera autorisée.
(68) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 69.
118. A Co 1 possède toutes les actions de A Co 2. A Co 2 est résidente à la fois du pays A et de la Belgique à des fins fiscales. A Co 1 forme un groupement fiscal avec A Co 2 au regard de la législation du pays A.
Bel Co est constituée par A Co 2 et est une entité hybride inversée, considérée comme entité distincte à des fins fiscales sous la législation du pays A, mais comme entité non distincte sous la législation belge. Les revenus belges sont attribués à Bel Co et A Co 2 ne dispose pas de revenus propres.
A Co 2 contracte un emprunt auprès d’une banque tierce. Du point de vue du pays A, la charge d’intérêt est déduite des revenus réalisés par A Co 1 en raison de la consolidation fiscale appliquée. Du point de vue de la Belgique, étant donné que Bel Co est censée être transparente, la charge d’intérêts payée par A Co 2 est déduite des revenus de Bel Co, lesquels sont imposables dans le chef de A Co 2. Il y a donc une double déduction (69).
(69) Exemple inspiré du rapport OCDE (2017), « Neutraliser les effets des dispositifs hybrides, Action 2 – Rapport final 2015 », Projet OCDE/G20 sur l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices, Éditions OCDE, Paris, exemple 7.1, pp. 360 et s.
119. La déduction des intérêts payés par A Co 2 à la banque est refusée en Belgique en application de l’art. 198, § 1er, 10°/4, CIR 92. Toutefois, la déduction des intérêts resterait autorisée dans la mesure où les revenus belges réalisés via Bel Co seraient imposés à la fois par le pays A et par la Belgique.
120. Sont visés, les transferts hybrides effectués dans le but de bénéficier, dans plusieurs juridictions, de crédits d’impôt pour la même retenue à la source.
Dans le cadre d’un transfert hybride, une société résidente et un intervenant étranger sont tous deux considérés, par leur juridiction respective, comme le bénéficiaire des revenus générés par l’instrument faisant l’objet du transfert hydride. En conséquence, ces deux intervenants réclament, chacun dans leur juridiction respective, un crédit d’impôt au titre de l’unique retenue à la source prélevée sur ces revenus (70).
(70) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 114.
121. L’art. 292, al. 4, CIR 92, n’autorise l’imputation de la QFIE qu’à concurrence de la quote-part de l’impôt des sociétés qui se rapporte aux revenus nets imposables générés par le transfert hybride.
122. Par revenus nets, il faut entendre la différence entre les revenus reçus dans le cadre du transfert hybride et les éventuels paiements qui ont dû être effectués en faveur d’un autre intervenant dans le cadre de ce transfert hybride (71).
(71) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 114.
123. A Co, établie dans le pays A, prête des obligations à Bel Co, établie en Belgique. Bel Co est soumise à certaines contraintes qui incluent le paiement à A Co du montant de tous intérêts versés à l’égard des obligations sous-jacentes (déduction faite de toutes les retenues à la source) pendant la période du prêt (le « paiement de compensation »). Du point de vue économique, l’effet net de ce dispositif est que A Co continue d’être entièrement exposée aux risques et au rendement associés à la détention des titres obligataires, en contrepartie des contraintes imposées à Bel Co à son égard dans le cadre de ce dispositif.
Dans cet exemple, il est supposé que le paiement d’intérêts de 100 euros à l’égard de l’obligation est soumis à une retenue à la source de 10 % et que cette retenue étrangère est imputable sur l’impôt à payer par Bel Co. Cette dernière fait un paiement de compensation à A Co au titre du paiement d’intérêts, déduction faite de la retenue à la source. Ce paiement de compensation est donc égal à 90 euros.
124. A Co et Bel Co sont toutes deux considérées comme ayant reçu un paiement de 100 euros au titre d’intérêts soumis à une retenue d'impôt étranger de 10 %. La Belgique considère que le revenu net de Bel Co, après exécution du paiement de compensation au titre d’intérêts, s’élève à 10 euros (art. 37, CIR 92).
Même si elle soumet à l’impôt seulement un montant de 10 euros de revenu, la Belgique accorde cependant, en principe, la déduction d’une QFIE calculée sur base du montant total des revenus d’intérêts concernés (art. 285 et 286, CIR 92) (72).
(72) Exemple inspiré du rapport OCDE (2017), « Neutraliser les effets des dispositifs hybrides, Action 2 – Rapport final 2015 », Projet OCDE/G20 sur l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices, Éditions OCDE, Paris, exemple 2.2, pp. 303 et s.
125. En vertu de l’art. 292, al. 4, CIR 92, le montant imputable de la QFIE ne peut excéder la quote-part de l’impôt qui se rapporte aux revenus nets générés par le transfert hybride. En l’occurrence, le revenu net en question est égal à 10 euros, soit 100 euros d’intérêts diminués de 90 euros à titre de paiement de compensation. Si l’on applique un taux de 25 % d’impôt, seul un montant maximal de 2,50 euros sera imputable à titre de QFIE.
126. Les dispositions commentées entrent en vigueur le 01.01.2019 et sont applicables à partir de l’exercice d’imposition 2020 se rattachant à une période imposable qui débute au plus tôt le 01.01.2019 (73).
(73) Art. 86.B1., L 25.12.2017.
AU NOM DU MINISTRE :
Pour l’Administrateur général de la Fiscalité,
D. DELVAUX
Conseiller général
Réf. interne : 717.350
circulaire commente les dispositions transposant en droit belge les directives européennes visant à lutter contre les pratiques d’évasion fiscale en ce qui concerne les dispositifs hybrides.
impôts sur les revenus ; impôt des sociétés ; impôt des non-résidents/sociétés ; dispositifs hybrides ; base imposable à l'ISoc ; base imposable à l’INR/soc. ; bénéfice imposable ; frais professionnels ; frais non déductibles.
SPF Finances, le 22.10.2024
Administration générale de la Fiscalité – Impôt des sociétés
5. Transfert hybride sur le marché
IV. Dispositifs hybrides visés et ajustements prévus
1. Ajustements entraînant un accroissement de la base imposable
1.1. Établissement stable étranger non pris en compte en tant que tel
1.2. Revenus d’une entité belge considérée comme fiscalement transparente en Belgique
1.3. Revenus générés dans le cadre d’un instrument financier hybride
1.4. Paiement par une entité hybride étrangère considérée comme fiscalement transparente en Belgique
2. Ajustements entraînant une dépense non déductible
2.1. Double déduction d’un même paiement
2.2. Déduction d’un paiement en Belgique sans inclusion d’un revenu à l’étranger
2.2.1. Paiement effectué au titre d’un instrument financier
2.2.2. Paiement en faveur d’une entité hybride
2.2.3. Paiement en faveur d’une entité disposant d’une ou de plusieurs implantations
2.2.4. Paiement en faveur d’un établissement stable non pris en compte en tant que tel
2.2.5. Paiement effectué par une entité hybride
2.3. Dispositifs hybrides importés
2.4. Société à double résidence fiscale
3. Limitation de la QFIE à imputer
1. La présente circulaire commente les dispositions suivantes :
- art. 2, § 1er, 16° à 18°, CIR 92, tels qu’introduits par l’art. 3, L 25.12.2017 (1) ;
- art. 185, § 1er, al. 2 à 4, et § 2/1, CIR 92, tels qu’insérés par l’art. 18, 1° et 2°, L 25.12.2017 ;
- art. 198, § 1er, 10°/1 à 10°/4, CIR 92, tels qu’insérés par l’art. 39, 5°, L 25.12.2017 ;
- art. 292, al. 4, CIR 92, tel qu’introduit par l’art. 73, L 25.12.2017 et remplacé par l’art. 34, L 30.07.2018 (2).
(1) Loi du 25.12.2017 portant réforme de l’impôt des sociétés, MB 29.12.2017 et errata dans le MB 26.03.2018.
(2) Loi du 30.07.2018 portant des dispositions diverses en matière d’impôts sur les revenus, MB 10.08.2018.
2. Ces dispositions transposent les directives « ATAD 1 » (3) et « ATAD 2 » (4), adoptées par l’Union Européenne (UE) en vue d’endiguer l’érosion de la base d’imposition des sociétés causée par les dispositifs hybrides (5).
(3) Directive (UE) 2016/1164 du Conseil du 12 juillet 2016 établissant des règles pour lutter contre les pratiques d’évasion fiscale qui ont une incidence directe sur le fonctionnement du marché intérieur.
(4) Directive (UE) 2017/952 du Conseil du 29 mai 2017 modifiant la directive (UE) 2016/1164 en ce qui concerne les dispositifs hybrides faisant intervenir des pays tiers.
(5) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 7.
Ces dispositions s’inscrivent dans le prolongement de l’action 2 du projet de l’OCDE et du G20 sur l’érosion de la base imposable et le transfert de bénéfices (BEPS).
3. La directive « ATAD 1 » prévoyait déjà des mesures visant à lutter contre les dispositifs hybrides. La directive « ATAD 2 » complète celles-ci par des mesures étendues à davantage de formes de dispositifs hybrides, de même qu’aux dispositifs hybrides utilisant des établissements stables et à ceux faisant intervenir des pays tiers (6).
(6) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 7.
4. Ainsi, les présentes dispositions visent les dispositifs hybrides mis en place entre des entreprises associées, entre des intervenants faisant partie de la même entreprise ou entre des intervenants agissant dans le cadre d’un dispositif dont les termes intègrent la valorisation de l’avantage fiscal obtenu ou qui a été conçu en vue de générer cet avantage fiscal.
Sont également visées, les dépenses déductibles par une société dans plusieurs États dans lesquels elle est considérée comme une société résidente, ainsi que l’obtention, dans plusieurs Etats, d’un crédit d’impôt au titre de retenue à la source ayant grevé un revenu (7).
(7) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 12.
5. Les dispositifs hybrides sont donc des dispositifs donnant lieu à des dépenses déductibles dans le chef de plusieurs intervenants, ou dans le chef d’un seul intervenant mais sans que, dans ce cas, à ces dépenses correspondent des revenus figurant parmi les revenus imposables du bénéficiaire. Selon le cas, les ajustements consistent en :
- l’inclusion d’un revenu parmi les bénéfices imposables du bénéficiaire (art. 185, § 1er, al. 2 à 4 et § 2/1, CIR 92), ou
- le refus de déduction d’un paiement (art. 198, § 1er, 10°/1 à 10°/4, CIR 92), ou
- la limitation de l’imputabilité de la quotité forfaitaire d’impôt étranger (QFIE) (art. 292, al. 4, CIR 92) (8).
(8) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 7.
6. Ci-après, les art. 3, 18, 1° et 2° et 39, 5°, L 25.12.2017 :
Art. 3
L'article 2, § 1er, du Code des impôts sur les revenus 1992, remplacé par la loi du 10 août 2001 et modifié par les lois des 17 mai 2004, 15 décembre 2004, 27 décembre 2006, 11 décembre 2008, 30 juillet 2013, 21 décembre 2013, 8 mai 2014, 12 mai 2014, 10 août 2015, 18 décembre 2015, 26 décembre 2015, 3 août 2016 et du 21 juillet 2017, est complété par un 16°, un 17° et un 18°, rédigés comme suit :
« 16° Dispositif hybride
Par dispositif hybride, on entend un dispositif donnant lieu à des dépenses déductibles dans le chef d'une société résidente, ou d'un établissement belge, et d'une entreprise étrangère, ou d'une implantation de celle-ci, ou dans le chef d'un seul de ces intervenants mais sans que, dans ce cas, à ces dépenses correspondent des revenus figurant parmi les revenus imposables du bénéficiaire.
Il ne peut être question de dispositif hybride entre d'une part une société résidente, ou un établissement belge, et d'autre part une entreprise étrangère, ou une implantation de celle-ci, que s'ils sont des entreprises associées, qui font partie de la même entreprise ou qui agissent dans le cadre d'un dispositif structuré.
Une société résidente, ou un établissement belge, et une entreprise étrangère, ou une implantation de celle-ci, sont des entreprises associées :
- lorsque l'entreprise étrangère est une entité dans laquelle la société résidente ou l'établissement belge détient, directement ou indirectement, une participation de 50 p.c. ou plus en matière de droits de vote ou de capital, ou dont il est en droit de recevoir 50 p.c. ou plus des bénéfices; ou
- lorsque l'entreprise étrangère, ou l'implantation de celle-ci, est une personne physique ou une entité qui détient, directement ou indirectement, une participation de 50 p.c. ou plus en matière de droits de vote ou de capital de la société résidente, ou qui est en droit de recevoir 50 p.c. ou plus des bénéfices de la société résidente; ou
- lorsqu'une personne physique ou une entité détient, directement ou indirectement, une participation de 50 p.c. ou plus en matière de droits de vote ou de capital de la société résidente et de l'entreprise étrangère; ou
- lorsque la société résidente, ou l'établissement belge, et l'entreprise étrangère, ou l'implantation de celle-ci, font partie du même groupe consolidé à des fins de comptabilité financière; ou
- lorsque l'un exerce une influence notable sur la gestion de l'autre.
En cas de dispositif impliquant un paiement effectué au titre d'un instrument financier, le seuil de 50 p.c. susmentionné est ramené à 25 p.c.
Une personne qui agit conjointement avec une autre personne au titre des droits de vote ou de la propriété du capital d'une entité est également considérée comme détenant une participation dans l'ensemble des droits de vote ou des capitaux de cette entité qui sont détenus par l'autre personne ou les autres personnes.
Un groupe consolidé à des fins de comptabilité financière est un groupe composé de toutes les entités qui sont pleinement intégrées dans les états financiers consolidés établis conformément aux normes internationales d'information financière ou au système national d'information financière d'un État membre de l'Espace économique européen.
Une société résidente, ou un établissement belge, et une entreprise étrangère, ou une implantation de celle-ci, font partie de la même entreprise lorsque l'un constitue un établissement belge ou stable de l'autre ou que tous deux constituent des établissements belges ou stables de la même entreprise.
Une société résidente, ou un établissement belge, et une entreprise étrangère, ou une implantation de celle-ci, agissent dans le cadre d'un dispositif structuré lorsqu'elles agissent dans le cadre d'un dispositif produisant une déduction dans le chef de chacun d'eux, ou une déduction, dans le chef de l'un, jointe à une absence d'imposition, dans le chef de l'autre, et dont les termes intègrent déjà la valorisation de cet effet, ou dans le cadre d'un dispositif qui a été conçu de manière telle à générer cet effet, à moins que l'on ne puisse pas raisonnablement attendre de la société résidente ou de l'établissement belge ou de l'entreprise étrangère, ou de l'implantation de celle-ci, qu'il soit informé de l'existence de cet effet, et qu'il n'ait pas bénéficié de cet effet.
Il ne peut être question de dispositif hybride donnant lieu à une déduction, dans le chef d'un des intervenants, jointe à une absence d'imposition, dans le chef d'un autre intervenant, lorsque l'absence d'imposition dans le chef de ce dernier n'est due qu'au régime fiscal exorbitant du droit commun qui lui est applicable ou à des différences dans la valeur attribuée à un paiement, y compris par l'application des prix de transfert.
17° Entité hybride
Par entité hybride, on entend toute entité ou tout dispositif qui est considéré comme une entité imposable en vertu des lois d'une juridiction et dont les revenus ou les dépenses sont considérés comme les revenus ou les dépenses d'une ou plusieurs autres personnes en vertu des lois d'une autre juridiction.
18° Transfert hybride
Par transfert hybride, on entend tout dispositif permettant de transférer un instrument financier lorsque le rendement sous-jacent de l'instrument financier transféré est considéré à des fins fiscales comme obtenu simultanément par plusieurs des parties à ce dispositif. ».
Art. 18, 1° et 2°
A l'article 185 du même Code, modifié par les lois des 21 juin 2004 et 11 décembre 2008, les modifications suivantes sont apportées :
1° le paragraphe 1er est complété par trois alinéas, rédigés comme suit :
« Les sociétés sont également imposables sur les bénéfices attribuables à un établissement stable dont une convention préventive de la double imposition conclue avec un Etat membre de l'Union européenne prévoit l'exonération, dans la mesure où ces bénéfices sont générés dans le cadre d'un dispositif hybride et où ils ne sont pas imposables dans la juridiction de l'établissement stable en raison du fait que celui-ci n'y est pas considéré comme tel.
Par dérogation à l'alinéa 1er et à l'article 29, lorsqu'une ou plusieurs entités associées non résidentes détenant globalement un intérêt direct ou indirect de 50 p.c. ou plus des droits de vote, des participations au capital ou des droits de participation aux bénéfices d'une entité visée à l'article 29 constituée ou établie en Belgique se situent dans une juridiction ou des juridictions qui considèrent l'entité comme une personne imposable en Belgique, l'entité est considérée comme une résidente de la Belgique et ses revenus sont imposés dans la mesure où ils ne sont pas par ailleurs imposés selon les lois belges ou celles de toute autre juridiction.
L'alinéa 3 ne s'applique pas aux organismes de placement collectif. ».
2° il est inséré un paragraphe 2/1, rédigé comme suit :
« § 2/1. Par dérogation au paragraphe 1er, et sans préjudice de l'article 203, § 1er, 6°, les revenus générés dans le cadre d'un dispositif hybride qui ne sont pas repris dans les bénéfices des sociétés ou des établissements belges qui en sont les bénéficiaires ou qui sont considérés comme tels en vertu des lois d'un autre Etat, sont imposables ou, selon le cas, non déductibles, dans la mesure où une entreprise étrangère, ou une implantation de celle-ci, est autorisée à les déduire de revenus imposables.
Sont visés les revenus suivants générés dans le cadre d'un dispositif hybride :
a) un revenu généré dans le cadre d'un instrument financier, lorsque la déduction, dans le chef de l'entreprise étrangère, ou d'une implantation de celle-ci, jointe à l'absence d'imposition, dans le chef des sociétés ou des établissements belges qui en sont les bénéficiaires ou qui sont considérés comme tels en vertu des lois d'un autre Etat, est imputable aux différences existant dans la qualification de l'instrument financier ou du revenu généré dans le cadre de cet instrument financier.
Un revenu représentant le rendement sous-jacent d'un instrument financier transféré ne donne pas lieu à un dispositif hybride lorsque le revenu est payé par un négociant financier dans le cadre d'un transfert hybride sur le marché, à condition que la juridiction du payeur exige du négociant financier qu'il inclue dans ses revenus tous les montants reçus en rapport avec l'instrument financier transféré.
Pour l'application de la présente disposition, on entend par :
- instrument financier : tout instrument dans la mesure où il génère un rendement financier ou un rendement de capitaux propres soumis aux règles d'imposition applicables aux titres de dette, titres de participation ou produits dérivés selon les lois belges ou celles de l'Etat de l'entreprise étrangère, ou de l'implantation de celle-ci, y compris tout transfert hybride ;
- transfert hybride sur le marché : tout transfert hybride auquel procède un négociant financier dans le cadre de ses activités habituelles, et non dans le cadre d'un dispositif structuré ;
- négociant financier : toute personne ou entité qui exerce une activité professionnelle consistant à acheter ou vendre régulièrement des instruments financiers pour son propre compte afin de réaliser un bénéfice ;
b) un revenu payé par une entreprise étrangère, ou une implantation de celle-ci, qui est une entité hybride, dans la mesure où ce revenu est, pour cette entité hybride, déductible de revenus imposables qui ne figurent pas également parmi les revenus imposables des sociétés ou des établissements belges à qui ce revenu est payé ou considéré comme tel en vertu des lois d'un autre État. » ;
(…)
Art. 39, 5°
A l'article 198 du même Code, modifié en dernier lieu par la loi du 25 décembre 2016, les modifications suivantes sont apportées :
(…)
5° le paragraphe 1er, alinéa unique, est complété par les 10° /1, 10° /2, 10° /3 et 10° /4, rédigés comme suit :
« 10° /1 les paiements effectués dans le cadre d'un dispositif hybride, dans la mesure où :
- la société résidente ou l'établissement belge qui entend les déduire entend les déduire de revenus professionnels qui ne figurent pas également parmi les revenus imposables d'une entreprise étrangère ou d'une implantation de celle-ci ; et
- une entreprise étrangère, ou une implantation de celle-ci, est autorisée à les déduire de ses revenus imposables.
Les paiements dont la déduction a été refusée en vertu de la présente disposition peuvent être déduits des revenus professionnels des périodes imposables suivantes, dans la mesure où ces revenus professionnels figurent également parmi les revenus imposables d'une entreprise étrangère ou d'une implantation de celle-ci.
10° /2 les paiements suivants effectués dans le cadre d'un dispositif hybride, dans la mesure où ils ne figurent pas parmi les revenus imposables des bénéficiaires :
a) un paiement effectué au titre d'un instrument financier, lorsque :
- le fait que, en l'absence de la présente disposition, ce paiement serait déductible, tout en ne figurant pas parmi les revenus imposables du bénéficiaire, est imputable aux différences existant dans la qualification de l'instrument financier ou du paiement effectué au titre de cet instrument financier ; et
- ce paiement n'est pas inclus dans un délai raisonnable parmi les revenus imposables du bénéficiaire.
Un paiement effectué au titre d'un instrument financier est considéré comme inclus dans les revenus imposables du bénéficiaire dans un délai raisonnable lorsque :
- le paiement est inclus par la juridiction du bénéficiaire dans une période imposable qui commence dans les 12 mois suivant la fin de la période imposable du payeur ; ou
- il est raisonnable de penser que le paiement sera inclus par la juridiction du bénéficiaire dans une période imposable ultérieure et que les conditions du paiement sont celles dont il serait envisageable que des entreprises indépendantes conviennent entre elles.
Un paiement représentant le rendement sous-jacent d'un instrument financier transféré ne donne pas lieu à un dispositif hybride lorsque le paiement est effectué par un négociant financier dans le cadre d'un transfert hybride sur le marché.
Pour l'application de la présente disposition, on entend par :
- instrument financier : tout instrument dans la mesure où il génère un rendement financier ou un rendement de capitaux propres soumis aux règles d'imposition applicables aux titres de dette, titres de participation ou produits dérivés selon la législation belge ou celle de l'Etat de l'entreprise étrangère, ou de l'implantation de celle-ci, y compris tout transfert hybride ;
- transfert hybride sur le marché : tout transfert hybride auquel procède un négociant financier dans le cadre de ses activités habituelles, et non dans le cadre d'un dispositif structuré ; et
- négociant financier : toute personne ou entité qui exerce une activité professionnelle consistant à acheter ou vendre régulièrement des instruments financiers pour son propre compte afin de réaliser un bénéfice ;
b) un paiement en faveur d'une entité hybride ;
c) un paiement en faveur d'une entité disposant d'une ou plusieurs implantations, lorsque le fait que ce paiement ne figure pas parmi les revenus imposables de cette entité résulte de différences dans l'attribution des paiements entre le siège de cette entité et son implantation ou entre deux implantations ou plus de cette entité en vertu des lois des juridictions où l'entité mène ses activités ;
d) un paiement en faveur d'une implantation qui est considérée comme donnant lieu à un établissement stable en vertu des lois de la juridiction du siège de l'entité dont elle fait partie, mais qui n'est pas considéré comme un établissement stable selon les lois de la juridiction où l'implantation est située, sauf si le revenu correspondant à ce paiement est considéré comme imposable en vertu des lois de la juridiction du siège de l'entité dont l'implantation fait partie ;
e) un paiement effectué par une entité hybride, dans la mesure où, en l'absence de la présente disposition, ce paiement serait déduit de revenus imposables qui ne figurent pas également parmi les revenus imposables du bénéficiaire ;
f) un paiement réputé effectué entre le siège et l'implantation ou entre deux implantations ou plus, dans la mesure où, en l'absence de la présente disposition, ce paiement serait déduit de revenus imposables qui ne figurent pas également parmi les revenus imposables du bénéficiaire ;
10° /3 les paiements effectués dans le cadre d'un dispositif hybride, dans la mesure où ils financent, directement ou indirectement, des dépenses déductibles dans le chef de plusieurs entreprises étrangères, dans le chef d'une entreprise étrangère et d'une implantation de celle-ci, dans le chef de plusieurs implantations de la même entreprise étrangère, ou dans le chef d'une entreprise étrangère, ou d'une implantation de celle-ci, mais, dans ce dernier cas, sans qu'à ces dépenses correspondent des revenus figurant parmi les revenus imposables du bénéficiaire. Ces paiements sont néanmoins considérés comme des frais professionnels dans la mesure où l'une des juridictions concernées par le dispositif hybride a procédé à un ajustement équivalent à l'égard de ce dispositif hybride ;
10° /4 les paiements effectués par une société résidente qui est également considérée comme une société résidente par une ou plusieurs autres juridictions dans laquelle, ou dans lesquelles, ces paiements sont déductibles de revenus imposables qui ne figurent pas parmi ses revenus imposables en Belgique. Ces paiements sont néanmoins considérés comme des frais professionnels dans le cas où l'autre juridiction, ou les autres juridictions, sont des États membres de l'Union européenne avec lequel, ou avec lesquels, la Belgique a conclu une convention préventive de la double imposition au regard de laquelle la société est considérée comme un résident de Belgique. » ;
(…)
7. Ci-après, l’art. 34, L 30.07.2018, qui remplace l’art. 73, L 25.12.2017 :
Art. 34
L'article 292 du même Code, modifié par les lois du 22 juillet 1993 et du 4 mai 1999, est complété par deux alinéas, rédigés comme suit :
« Les sommes imputables visées à l'alinéa 1er ne sont pas imputées sur le montant du transfert intra-groupe visé à l'article 185, § 4, alinéa 1er, qui est repris dans la base imposable.
Par dérogation à l'alinéa 1er, la quotité forfaitaire d'impôt étranger n'est imputée qu'à concurrence de la quote-part de l'impôt des sociétés qui se rapporte aux revenus nets imposables générés par un transfert hybride. Ces revenus nets sont constitués de la différence entre les revenus reçus dans le cadre de ce transfert hybride et les éventuels paiements qui ont également dû être effectués dans le cadre de ce transfert hybride. ».
8. Les dispositions de lutte contre l’évasion fiscale en matière de dispositifs hybrides reposent sur une série de nouveaux concepts.
Dans ce cadre, les définitions de « dispositif hybride », « entité hybride » et « transfert hybride » ont été introduites respectivement aux 16°, 17° et 18°, de l’art. 2, § 1er, CIR 92.
D’autres définitions sont reprises directement dans les dispositions traitant des ajustements à opérer. Il s’agit plus particulièrement des notions d’« instrument financier », de « transfert hybride sur le marché » et de « négociant financier » insérées à l’art. 185, § 2/1, al. 2, a), CIR 92, ainsi qu’à l’art. 198, § 1er, 10°/2, a), al. 4, CIR 92.
9. Par dispositif hybride, on entend un dispositif donnant lieu à des dépenses déductibles dans le chef d'une société résidente, ou d'un établissement belge, et d'une entreprise étrangère, ou d'une implantation de celle-ci, ou dans le chef d'un seul de ces intervenants mais sans que, dans ce cas, à ces dépenses correspondent des revenus figurant parmi les revenus imposables du bénéficiaire (9).
(9) Art. 2, § 1er, 16°, al. 1er, CIR 92.
10. Cette définition vise à la fois des mécanismes de « double déduction » (déduction de la même dépense dans le chef de deux contribuables) et des mécanismes de « déduction sans inclusion » (déduction d’une dépense sans imposition du revenu correspondant).
11. Il est noté que le législateur a préféré utiliser le terme « implantation » plutôt que le terme « établissement stable » afin de couvrir les situations où les intervenants sont situés dans des Etats avec lesquels il n’existe pas de convention préventive de la double imposition (ci-après CPDI) en vigueur avec la Belgique et où il ne peut dès lors être question d’établissement stable (10).
(10) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 67.
12. Il est précisé qu’il ne peut être question de dispositif hybride que lorsque les intervenants (une société résidente ou un établissement belge d’une part et, une entreprise étrangère ou une implantation de celle-ci d’autre part) sont des entreprises associées, qui :
- soit font partie de la même entreprise ;
- soit agissent dans le cadre d’un dispositif structuré (11).
(11) Art. 2, § 1er, 16°, al. 2, CIR 92.
13. L’art. 2, § 1er, 16°, al. 3, CIR 92, précise ce qu’il convient d’entendre par entreprise associée. Ainsi, une société résidente, ou un établissement belge, et une entreprise étrangère, ou une implantation de celle-ci, sont des entreprises associées lorsque :
- l'entreprise étrangère est une entité dans laquelle la société résidente ou l'établissement belge détient, directement ou indirectement, une participation de 50 % ou plus en matière de droits de vote ou de capital, ou dont il est en droit de recevoir 50 % ou plus des bénéfices de cette entité ;
- l'entreprise étrangère, ou l'implantation de celle-ci, est une personne physique ou une entité qui détient, directement ou indirectement, une participation de 50 % ou plus en matière de droits de vote ou de capital de la société résidente, ou qui est en droit de recevoir 50 % ou plus des bénéfices de la société résidente ;
- une personne physique ou une entité détient, directement ou indirectement, une participation de 50 % ou plus en matière de droits de vote ou de capital de la société résidente et de l'entreprise étrangère ;
- la société résidente, ou l'établissement belge, et l'entreprise étrangère, ou l'implantation de celle-ci, font partie du même groupe consolidé à des fins de comptabilité financière (voir n° 16 ci-après) ;
- l’un exerce une influence notable sur la gestion de l’autre.
14. L’art. 2, § 1er, 16°, al. 4, CIR 92 précise que le seuil de 50 % susmentionné est ramené à 25 % en cas de dispositif impliquant un paiement effectué au titre d'un instrument financier.
15. Une personne qui agit conjointement avec une autre personne au titre des droits de vote ou de la propriété du capital d'une entité est également considérée comme détenant une participation dans l'ensemble des droits de vote ou des capitaux de cette entité qui sont détenus par l'autre personne ou les autres personnes (12). Dans ce cas, les droits de vote ou de capital de ces personnes doivent être additionnés afin de déterminer les seuils susvisés.
(12) Art. 2, § 1er, 16°, al. 5, CIR 92.
16. L’art. 2, § 1er, 16°, al. 6, CIR 92, précise qu’un groupe consolidé à des fins de comptabilité financière est un groupe composé de toutes les entités qui sont pleinement intégrées dans les états financiers consolidés établis conformément aux normes internationales d'information financière ou au système national d'information financière d'un État membre de l'Espace économique européen.
17. Une société résidente, ou un établissement belge, et une entreprise étrangère, ou une implantation de celle-ci, font partie de la même entreprise lorsque l'un constitue un établissement belge ou stable de l'autre ou que tous deux constituent des établissements belges ou stables de la même entreprise (13).
(13) Art. 2, § 1er, 16°, al. 7, CIR 92.
18. Il ressort de l’art. 2, § 1er, 16°, al. 8, CIR 92, qu’une société résidente, ou un établissement belge, et une entreprise étrangère, ou une implantation de celle-ci, agissent dans le cadre d'un dispositif structuré lorsqu’elles agissent :
- dans le cadre d’un dispositif :
* produisant une déduction dans le chef de chacun d'eux, ou une déduction, dans le chef de l'un, jointe à une absence d'imposition, dans le chef de l'autre, et
* dont les termes intègrent déjà la valorisation de cet effet ;
- dans le cadre d’un dispositif qui a été conçu de manière telle à générer l’effet d’un dispositif hybride.
Cependant, il ne peut s’agir d’un dispositif structuré dans le chef d’un des intervenants au dispositif lorsqu’on ne peut pas raisonnablement attendre de celui-ci qu'il soit informé de l'existence du dispositif hybride et pour autant qu'il n’ait pas bénéficié d’un avantage fiscal en découlant.
19. L’art. 2, § 1er, 16°, al. 9, CIR 92, précise qu’il ne peut être question de dispositif hybride donnant lieu à une déduction dans le chef d’un des intervenants, jointe à une absence d’imposition dans le chef d’un autre intervenant (« déduction sans inclusion »), lorsque l’absence d'imposition dans le chef du bénéficiaire est uniquement due :
- au régime fiscal exorbitant du droit commun qui lui est applicable, ou
- à des différences dans la valeur attribuée à un paiement, y compris par l'application des prix de transfert.
20. Par entité hybride, on entend toute entité ou tout dispositif qui est considéré comme une entité imposable en vertu des lois d'une juridiction et dont les revenus ou les dépenses sont considérés comme les revenus ou les dépenses d'une ou plusieurs autres personnes en vertu des lois d'une autre juridiction (14).
(14) Art. 2, § 1er, 17°, CIR 92.
21. Par transfert hybride, on entend tout dispositif permettant de transférer un instrument financier lorsque le rendement sous-jacent de l'instrument financier transféré est considéré à des fins fiscales comme obtenu simultanément par plusieurs des parties à ce dispositif (15).
(15) Art. 2, § 1er, 18°, CIR 92.
22. On entend par instrument financier, tout instrument dans la mesure où il génère un rendement financier ou un rendement de capitaux propres soumis aux règles d’imposition applicable aux titres de dette, titres de participation ou produits dérivés selon les lois belges ou celles de l’État de l’entreprise étrangère, ou de l’implantation de celle-ci, y compris tout transfert hybride (16). Il convient de noter que cette définition ne s’applique pas pour définir une entreprise associée (voir n° 14).
(16) Art. 185, § 2/1, al. 2, a), CIR 92 et art. 198, § 1er, 10°/2, a), al. 4, CIR 92.
23. On entend par transfert hybride sur le marché, tout transfert hybride auquel procède un négociant financier dans le cadre de ses activités habituelles, et non dans le cadre d’un dispositif structuré (17).
(17) Art. 185, § 2/1, al. 2, a), CIR 92 et art. 198, § 1er, 10°/2, a), al. 4, CIR 92.
24. On entend par négociant financier, toute personne ou entité qui exerce une activité professionnelle consistant à acheter ou vendre régulièrement des instruments financiers pour son propre compte afin de réaliser un bénéfice (18).
(18) Art. 185, § 2/1, al. 2, a), CIR 92 et art. 198, § 1er, 10°/2, a), al. 4, CIR 92.
25. Il appartient à la personne ou à l’entité concernée de démontrer que cette activité d’achat et de vente est son activité professionnelle.
26. Les dispositions mises en place visent donc un certain nombre de dispositifs hybrides dont on peut présumer qu’ils ont été mis en place en vue d’organiser l’érosion de la base imposable des sociétés impliquées. Ces dispositions prévoient en conséquence des ajustements qui consistent, selon le cas, à :
- augmenter les bénéfices imposables (art. 185, § 1er, al. 2 à 4, et § 2/1, CIR 92), ou
- refuser la déduction de certaines dépenses à titre de frais professionnels (art. 198, § 1er, 10°/1 à 10°/4, CIR 92), ou
- limiter l’imputation de la QFIE (art. 292, al. 4, CIR 92) (19).
(19) Voir également n°s 4 et 5.
27. Les ajustements prévus en vue de lutter contre les dispositifs hybrides visent les situations ou ces dispositifs hybrides sont imputables aux différences existant dans la qualification juridique d’un instrument financier ou d’une entité et ils ne sont pas destinés à porter atteinte aux caractéristiques générales du système fiscal d’une juridiction (20).
(20) Voir considérant n° 13, Directive (UE) 2016/1164 du Conseil du 12 juillet 2016 établissant des règles pour lutter contre les pratiques d’évasion fiscale qui ont une incidence directe sur le fonctionnement du marché intérieur ; voir en ce sens n° 19.
28. En outre, ces ajustements ne doivent pas être appliqués lorsque des ajustements neutralisant les effets du dispositif hybride ont déjà été réalisés par la juridiction étrangère. En l’espèce, on ne se trouve plus en présence d’un dispositif hybride visé à l’art. 2, § 1er, 16°, CIR 92, ce qui rend les dispositions commentées ci-après inopérantes (21).
(21) Voir en ce sens Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 68 et Doc. parl., Chambre, session 2019-2020, DOC 55 0828/001, p. 15.
29. Une société résidente dispose d’un établissement stable situé dans un État membre de l’UE avec lequel la Belgique a conclu une CPDI.
30. Le dispositif mis en place permet d’une part, la déduction, dans le chef d’un intervenant étranger, d’un paiement effectué au profit de l’établissement stable étranger, et, d’autre part, l’absence d’inclusion de ce paiement dans les revenus imposables de cet établissement stable en raison du fait que, dans la juridiction où il est situé, il n’est pas considéré comme tel. En revanche, la Belgique reconnaît l’existence d’un tel établissement, et exonère ce paiement dans le chef de la société résidente en application de la CPDI (22).
(22) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 42.
31. Sur base de l’art. 185, § 1er, al. 2, CIR 92, l’exonération prévue par la CPDI est refusée, lorsque celle-ci a été conclue avec un État membre de l’UE (23).
(23) La Belgique ne peut refuser l’exonération prévue dans une CPDI conclue avec un État non-membre de l’UE car celui-ci n’est pas tenu par la transposition des directives européennes (voir en ce sens l’art. 9, point 5, Directive ATAD 1, tel que modifié par l’art. 1, 4), Directive ATAD 2).
32. En d’autres termes, les bénéfices normalement attribuables à l’établissement stable sont imposables dans le chef de la société résidente, dans la mesure où ces bénéfices sont générés dans le cadre d’un dispositif hybride, c’est-à-dire dans la mesure où ils ont pu être déduits des bénéfices dans la juridiction du payeur et où ils n’ont pas été imposés dans la juridiction de l’établissement stable en raison de la non-reconnaissance de celui-ci.
33. Cette disposition n’est pas applicable lorsque l’absence d’imposition dans la juridiction de l’établissement stable n’est pas due à la non-reconnaissance de celui-ci. Ainsi, les revenus en question ne peuvent être considérés comme des bénéfices imposables de la société résidente en vertu de l’art. 185, § 1er, al. 2, CIR 92, lorsque son établissement stable étranger est reconnu comme tel par la juridiction où il est situé et y est soumis à un régime fiscal exorbitant du droit commun (24).
(24) Art. 2, § 1er, 16°, al. 9, CIR 92 ; voir aussi n° 19.
34. Bel Co est une société résidente qui développe des logiciels. Bel Co dispose d’un établissement stable dans le pays A, État Membre de l’UE. Cet établissement de Bel Co octroie une licence de logiciel à B Co, une autre société du groupe résidant dans le pays B, afin qu’elle s’en serve pour son activité de prestations de service aux clients externes. B Co paie une redevance pour licence déductible à l’établissement de Bel Co qui, en vertu du droit belge, est considérée comme un revenu de l’établissement stable dans le pays A (25).
(25) Exemple inspiré du rapport OCDE (2017), « Neutraliser les effets des dispositifs hybrides impliquant une succursale, Action 2 : Cadre inclusif sur le BEPS », Projet OCDE/G20 sur l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices, Éditions OCDE, Paris, exemple 1, pp. 66 et s.
35. Dans ce cas, en principe, la Belgique exonère les revenus provenant de l’établissement stable étranger en vertu de la CPDI conclue avec le pays A, ce qui signifie que la redevance pour licence n’est pas soumise à l’impôt en Belgique. Cependant, l’établissement stable n’est pas reconnu comme tel dans le pays A et n’y est pas non plus soumis à l’impôt.
36. Vu que le dispositif décrit remplit les conditions de l’art. 185, § 1er, al. 2, CIR 92, l’application de la CPDI est refusée et la redevance est imposable en Belgique dans le chef de Bel Co.
37. Un paiement est effectué par un intervenant étranger à une entité constituée ou établie en Belgique et considérée comme fiscalement transparente en vertu de l’art. 29, CIR 92.
38. Le dispositif visé repose sur le fait que les juridictions des partenaires (voir n° 41) de cette entité considèrent celle-ci comme fiscalement non-transparente (26).
(26) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, pp. 42 et 43.
On parle ici d’entité hybride inversée. Il s’agit d’une entité distincte selon les lois de la juridiction de l’investisseur (partenaire) mais fiscalement transparente selon les lois de la juridiction où elle est établie.
39. Dans ce cas, le paiement est déductible dans le chef de celui qui l’a effectué, alors qu’il n’est imposable, ni dans les juridictions des partenaires qui considèrent que ces revenus sont imposables dans le chef de l’entité belge, ni en Belgique qui considère que ces revenus sont imposables dans le chef des partenaires.
40. Sur base de l’art. 185, § 1er, al. 3, CIR 92, l’entité visée à l’art. 29, CIR 92, constituée ou établie en Belgique, est considérée comme une société résidente dont les bénéfices sont imposables dans son propre chef. Ces bénéfices sont imposés dans la mesure où ils ne sont pas, par ailleurs, imposés dans le chef des partenaires (membres) de l’entité, soit en Belgique (en application des art. 29, 228, § 2, 3°, e) ou 229, § 3, CIR 92), soit dans toute autre juridiction (27).
(27) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 43.
41. On entend ici par partenaire, une ou plusieurs entités associées non-résidentes détenant globalement un intérêt direct ou indirect de 50 % ou plus des droits de vote, des participations au capital ou des droits de participation aux bénéfices de l’entité belge (28).
(28) Art. 185, § 1er, al. 3, CIR 92.
42. Cette mesure n’est pas applicable aux organismes de placement collectif (29).
(29) Art. 185, § 1er, al. 4, CIR 92.
43. Deux individus, soit un résident belge (individu belge) et un résident du pays A (individu A), prévoient de consentir un prêt à A Co, une société appartenant entièrement à l'individu A. Plutôt que de consentir le prêt à la société directement, les individus belge et A injectent des fonds propres dans Bel Co, une entité constituée en Belgique et visée par l’art. 29, § 1er, CIR 92. Bel Co accorde un prêt à A Co, laquelle verse des intérêts déductibles.
En vertu de l’art. 29, § 1er, CIR 92, l’entité Bel Co est fiscalement transparente. En conséquence, une moitié du paiement des intérêts est attribuée à l'individu A. L'autre moitié est attribuée à l'individu belge et est incorporée dans sa base imposable à l’IPP.
En revanche, au regard du droit du pays A, Bel Co qualifie de société étrangère (entité non-transparente) et les revenus correspondants sont donc attribués à cette société (30).
(30) Exemple inspiré du rapport OCDE (2017), « Neutraliser les effets des dispositifs hybrides, Action 2 – Rapport final 2015 », Projet OCDE/G20 sur l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices, Éditions OCDE, Paris, exemple 4.2, pp. 324 et s.
44. L’entité Bel Co est une entité hybride inversée visée par l’art. 185, § 1er, al. 3, CIR 92. En conséquence, elle est considérée en ce qui concerne ces revenus comme une société résidente dont les bénéfices sont imposables dans son propre chef. Ces bénéfices sont imposés dans la mesure où ils ne sont pas, par ailleurs, imposés dans le chef des partenaires.
45. Un paiement est effectué au titre d’un instrument financier (voir définition supra n° 22) par une entreprise étrangère ou une implantation de celle-ci en faveur d’une société résidente ou d’un établissement belge. Ce paiement est déduit dans le chef de l’intervenant étranger, sans que le revenu correspondant ne soit inclus dans la base imposable du bénéficiaire belge.
46. Le dispositif hybride est basé sur les différences existant dans la qualification donnée par la Belgique et l’Etat du payeur à l’instrument financier ou au revenu généré dans le cadre de cet instrument financier.
47. Sur base de l’art. 185, § 2/1, al. 1 et 2, a), CIR 92, ce paiement est inclus parmi les revenus imposables du bénéficiaire belge pour autant que ce revenu soit généré dans le cadre d’un dispositif hybride.
48. Cette disposition trouve donc à s’appliquer lorsque les revenus générés dans le cadre d’un instrument financier ne sont pas repris dans les bénéfices de la société résidente ou de l’établissement belge bénéficiaire dans la mesure où l’entreprise étrangère ou une implantation de celle-ci est autorisée à les déduire de ses revenus imposables. Cette « déduction sans inclusion » doit trouver son origine dans les différences existant dans la qualification de l’instrument financier ou du revenu qu’il génère.
49. Ainsi, un revenu généré dans le cadre d'un instrument financier ne devrait pas être considéré comme donnant lieu à un dispositif hybride lorsque l’absence d’imposition en Belgique est uniquement imputable au statut fiscal du bénéficiaire ou au fait que l'instrument est détenu sous réserve des modalités d'un régime spécial (31).
(31) Voir considérant n° 16, Directive (UE) 2017/952 du Conseil du 29 mai 2017 modifiant la directive (UE) 2016/1164 en ce qui concerne les dispositifs hybrides faisant intervenir des pays tiers.
50. Cette disposition s’applique sans préjudice de l’art. 203, § 1er, 6°, CIR 92 (32). Ce dernier article est seul applicable en présence de revenus susceptibles de bénéficier du régime des revenus définitivement taxés (RDT) (33).
Une telle primauté de l’exclusion du régime RDT s’explique par le fait que lorsque les dispositions d’une autre directive neutralisent l’asymétrie dans les conséquences fiscales, les règles relatives aux dispositifs hybrides ne s’appliquent pas (34).
(32) Art. 185, § 2/1, al. 1er, CIR 92.
(33) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 43.
(34) Considérant n° 30, Directive (UE) 2017/952 du Conseil du 29 mai 2017 modifiant la directive (UE) 2016/1164 en ce qui concerne les dispositifs hybrides faisant intervenir des pays tiers.
51. Pour rappel, en cas de dispositif impliquant un paiement effectué au titre d'un instrument financier, le seuil de 50 % de détention d’une participation aux droits de vote ou au capital ou de participation aux bénéfices est ramené à 25 % (voir également n° 14).
52. Il ne peut être question de dispositif hybride lorsque le revenu représentant le rendement sous-jacent d’un instrument financier transféré est payé :
- par un négociant financier (voir la définition au n° 24) ;
- dans le cadre d’un transfert hybride sur le marché (voir la définition au n° 23) ;
- à condition que la juridiction du payeur exige du négociant financier qu’il inclue dans ses revenus tous les montants reçus en rapport avec l’instrument financier transféré.
53. Il ressort explicitement du texte légal que cette exception n’est applicable que lorsque le transfert hybride a lieu dans le cadre des activités professionnelles habituelles du négociant financier, et non dans le cadre d’un dispositif structuré.
54. Bel Co est une société résidente et détient toutes les actions de A Co, une société qui a sa résidence dans le pays A. Les actions détenues par Bel Co sont traitées comme un titre de dette aux termes des lois du pays A, mais comme un titre de participation (c'est-à-dire une action) aux termes du droit belge. Les sommes payées en rémunération des apports sont considérés comme une dépense déductible aux termes des lois du pays A, mais comme des dividendes aux termes du droit belge (35).
(35) Exemple inspiré du rapport OCDE (2017), « Neutraliser les effets des dispositifs hybrides, Action 2 – Rapport final 2015 », Projet OCDE/G20 sur l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices, Éditions OCDE, Paris, exemple 1.1, pp. 193 et s.
55. Si l’art. 203, § 1er, 6°, CIR 92, est applicable, l’exonération fiscale du dividende sera refusée en Belgique et aucune asymétrie ne se produira aux fins de la règle relative aux instruments financiers hybrides.
En revanche, dans l’hypothèse où l’art. 203, § 1er, 6°, CIR 92, n’était pas applicable, le paiement d’intérêts créerait une asymétrie hybride visée par la règle relative aux instruments financiers hybrides et le montant de ces intérêts devrait être inclus dans les bénéfices imposables de Bel Co.
56. Une entreprise étrangère ou une implantation de celle-ci, qui est une entité hybride (voir n° 20), en l’espèce considérée comme fiscalement transparente par la Belgique mais comme fiscalement non-transparente par la juridiction dans laquelle elle est établie, effectue un paiement en faveur d’une société résidente ou d’un établissement belge.
57. Il résulte de cette divergence de qualification une déduction du paiement dans le chef de l’entité hybride étrangère sans inclusion correspondante parmi les revenus imposables du bénéficiaire belge (36).
(36) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 43.
58. Sur base de l’art. 185, § 2/1, al. 1er et 2, b), CIR 92, le revenu payé ou considéré comme tel en vertu des lois d’un autre État, est inclus dans les revenus imposables de la société résidente ou de l’établissement belge, dans la mesure où il est, pour l’entité hybride, déductible des revenus imposables qui ne figurent pas également parmi les revenus imposables du bénéficiaire belge (37).
(37) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 44.
59. Le paiement ne peut donc être inclus dans les revenus imposables du bénéficiaire belge sur base de l’art. 185, § 2/1, al. 1er et 2, b), CIR 92, si celui-ci est déduit, dans le chef du payeur, des revenus qui sont imposables à la fois par la juridiction étrangère et par la Belgique (revenus soumis à une « double inclusion »).
60. Bel Co constitue A Co 1 comme société holding à l'égard de sa filiale exploitante (A Co 2). A Co 1 est une entité hybride (au sens du n° 20). A Co 2 est réputée être une entité imposable distincte suivant la législation de la Belgique et du pays A.
A Co 1 contracte un emprunt auprès de Bel Co, puis A Co 1 utilise ces fonds pour accorder un prêt hybride à A Co 2. Les paiements d'intérêts au titre de ce dernier prêt sont traités comme revenu ordinaire dans la législation du pays A, mais comme des paiements de dividendes exonérés en droit belge (pour les besoins de cet exemple, il est totalement fait abstraction de l’art. 203, § 1er, 6°, CIR 92).
Puisque A Co 1 est une entité transparente d’un point de vue belge, le paiement d'intérêts au titre du prêt conclu entre Bel Co et A Co 1 n'est pas soumis à l'impôt et ne génère aucun revenu en Belgique. Bien que le paiement d'intérêts au titre du prêt hybride (entre A Co 1 et A Co 2) soit reconnu en Belgique (il est censé avoir lieu entre A Co 2 et Bel Co), il est traité comme un paiement de dividendes exonérés aux fins de l'impôt et n'est pas pris en compte dans le calcul du revenu net enregistré par Bel Co (38).
(38) Exemple inspiré du rapport OCDE (2017), « Neutraliser les effets des dispositifs hybrides, Action 2 – Rapport final 2015 », Projet OCDE/G20 sur l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices, Éditions OCDE, Paris, exemple 3.1, pp. 311 et s.
61. En application de l’art. 185, § 2/1, al. 1er et 2, b), CIR 92, le montant correspondant au paiement d’intérêts au titre du prêt conclu entre Bel Co et A Co 1 est inclus dans les revenus imposables de Bel Co.
62. Sont visés les dispositifs hybrides impliquant la déduction d’un même paiement à la fois par une société résidente ou un établissement belge, de ses revenus imposables en Belgique, et par une entreprise étrangère, ou une implantation de celle-ci, de ses revenus imposables à l’étranger.
63. Sur base de l’art. 198, § 1er, 10°/1, al. 1er, CIR 92, la déduction de tels paiements est refusée aussi bien durant la période imposable à laquelle ils se rattachent que lors de toute période imposable suivante au cours de laquelle leur déduction serait sollicitée, dans la mesure où l’intervenant belge qui entend les déduire, entend les déduire de revenus professionnels qui ne figurent pas également parmi les revenus imposables d’un intervenant étranger (39).
(39) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 65.
64. Ce refus de déduction ne s’applique donc pas si le paiement est déduit des mêmes revenus professionnels qui sont également imposables dans la juridiction étrangère (revenus soumis à une « double inclusion »).
Dans l’hypothèse où les frais exposés par la société résidente ont servi à fournir des biens ou des prestations (dont le prix est déterminé ou non via un cost-plus) en faveur de la société étrangère, qui sont également déduits dans le chef de cette dernière lors de l’intégration de la société résidente par application du principe de transparence fiscale dans la juridiction où est établie la société étrangère (40), la double inclusion est rencontrée si les revenus imposables de la société étrangère comprennent les paiements par un tiers pour une prestation qui inclut les biens ou les prestations fournis par la société résidente à la société étrangère.
(40) Il est postulé que lors de l’intégration, le chiffre d’affaires réalisé en Belgique avec la société étrangère n’est pas reconnu comme bénéfice imposable dans le chef de cette dernière.
65. En outre, l’art. 198, § 1er, 10°/1, al. 2, CIR 92, prévoit que les paiements dont la déduction a initialement été refusée sur base de l’alinéa 1er, peuvent être déduits des revenus professionnels des périodes imposables suivantes, dans la mesure où ces revenus professionnels figurent également parmi les revenus imposables d’un intervenant étranger (entreprise étrangère ou son implantation). En d’autres termes, la déduction est autorisée dans la mesure où elle est imputée sur des revenus soumis à une « double inclusion ».
66. Bel Co constitue une succursale dans le pays A. La succursale contracte un emprunt auprès d'une banque locale. Les intérêts d'emprunt sont déductibles à la fois en Belgique et dans le pays A. La succursale n'a aucune source de revenus. La perte née du paiement d’intérêts est déductible.
Bel Co effectue donc un paiement d'intérêts qui est déductible sous la législation du pays A (juridiction du payeur) et qui déclenche une deuxième déduction en sa faveur en vertu du droit belge (41).
(41) Exemple inspiré du rapport OCDE (2017), « Neutraliser les effets des dispositifs hybrides, Action 2 – Rapport final 2015 », Projet OCDE/G20 sur l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices, Éditions OCDE, Paris, exemple 6.2, pp. 340 et s.
67. En vertu de l’art. 198, § 1er, 10°/1, al. 1er, CIR 92, Bel Co ne peut imputer la déduction des intérêts sur ses autres revenus. Elle peut éventuellement appliquer la déduction excédentaire sur la part de son revenu soumise à une double inclusion dans le cadre du présent dispositif au cours d’une période imposable ultérieure conformément à l’art. 198, § 1er, 10°/1, al. 2, CIR 92.
68. L’art. 198, § 1er, 10°/2, CIR 92 vise à lutter contre 6 types de dispositifs hybrides impliquant la déduction d’un paiement dans le chef d’un intervenant belge, sans inclusion correspondante parmi les revenus imposables du bénéficiaire étranger. La déduction des paiements effectués dans le cadre de ces dispositifs hybrides est refusée en vertu de l’art. 198, § 1er, 10°/2, a) à f), CIR 92 (42).
(42) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, pp. 65 à 68.
69. Est visé le paiement effectué au titre d’un instrument financier (voir définition n° 22) par un intervenant établi en Belgique en faveur d’un bénéficiaire étranger lorsque ce paiement est déduit dans le chef de l’intervenant belge, sans que le revenu correspondant ne soit inclus dans la base imposable du bénéficiaire étranger.
70. Cette situation correspond au premier des deux types de dispositifs hybrides visés à l’art. 185, § 2/1, CIR 92, commenté ci-dessus (voir n° 45 et suivants), mais envisagé, cette fois, du point de vue de l’auteur du paiement et non plus du point de vue du bénéficiaire (43).
(43) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 66.
71. Sur base de l’art. 198, § 1er, 10°/2, a), CIR 92, la déduction d’un tel paiement est refusée :
- dans la mesure où ce paiement ne figure pas dans les revenus imposables du bénéficiaire en raison de différences existant dans la qualification de l’instrument financier ou du paiement effectué au titre de cet instrument, et
- ce paiement n’est pas inclus dans un délai raisonnable parmi les revenus imposables du bénéficiaire.
72. Un paiement effectué dans le cadre d'un instrument financier ne devrait pas être considéré comme donnant lieu à un dispositif hybride lorsque l’absence d’imposition est uniquement imputable au statut fiscal du bénéficiaire ou au fait que l'instrument est détenu sous réserve des modalités d'un régime spécial (44).
(44) Voir considérant n° 16, Directive (UE) 2017/952 du Conseil du 29 mai 2017 modifiant la directive (UE) 2016/1164 en ce qui concerne les dispositifs hybrides faisant intervenir des pays tiers ; voir également le n° 49.
73. Pour rappel, en cas de dispositif impliquant un paiement effectué au titre d'un instrument financier, le seuil de 50 % de détention d’une participation aux droits de vote ou au capital ou de participation aux bénéfices est ramené à 25 % (voir également le n° 14).
74. La déduction des paiements effectués dans le cadre d’un tel dispositif hybride n’est toutefois pas refusée si l’absence d’inclusion correspondante parmi les revenus imposables du bénéficiaire étranger n’est que temporaire. Il n’est en effet pas question d’organisation d’une érosion de base imposable lorsque l’absence d’inclusion correspondante parmi les revenus imposables du bénéficiaire étranger s’explique par le fait que les juridictions concernées utilisent des périodes imposables différentes et appliquent des règles différentes pour la prise en compte du moment où des éléments de revenus ou de dépenses ont été respectivement perçus ou supportés (45).
(45) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 66.
75. L’art. 198, § 1er, 10°/2, a), al. 2, CIR 92, précise le caractère raisonnable du délai. Ainsi, un paiement effectué au titre d’un instrument financier est considéré comme inclus dans les revenus imposables du bénéficiaire dans un délai raisonnable dans les deux situations suivantes :
- le paiement est inclus par la juridiction du bénéficiaire dans une période imposable qui commence dans les 12 mois suivant la fin de la période imposable du payeur ;
- il est raisonnable de penser que le paiement sera inclus par la juridiction du bénéficiaire dans une période imposable ultérieure et les conditions du paiement sont celles dont il serait envisageable que des entreprises indépendantes conviennent entre elles.
76. En revanche, la déduction de paiements qui ne sont pas inclus dans un délai raisonnable parmi les revenus imposables du bénéficiaire doit être refusée (46).
(46) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 66 ; voir n° 71, 2e tiret.
77. En vertu de la même disposition, il ne peut être question de dispositif hybride lorsque le revenu représentant le rendement sous-jacent d’un instrument financier transféré est payé :
- par un négociant financier (voir définition n° 24) ;
- dans le cadre d’un transfert hybride sur le marché (voir définition n° 23).
78. Il ressort du texte légal que cette exception n’est applicable que lorsque le transfert hybride a lieu dans le cadre des activités professionnelles habituelles du négociant financier.
79. A Co est une société résidente du pays A qui détient toutes les actions de Bel Co, société résidente. A Co prête de l’argent à Bel Co. Le prêt porte intérêts au taux du marché, et les intérêts sont payables tous les six mois à terme échu.
Le prêt est traité comme un titre de créance aux termes du droit belge, mais comme un titre de participation en capital (c'est-à-dire une action) aux termes du droit du pays A. Les paiements sont considérés comme des intérêts aux termes du droit belge, mais comme des dividendes aux termes du droit du pays A (47).
(47) Exemple inspiré du rapport OCDE (2017), « Neutraliser les effets des dispositifs hybrides, Action 2 – Rapport final 2015 », Projet OCDE/G20 sur l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices, Éditions OCDE, Paris, exemple 1.1, pp. 193 et s.
80. Dans cette situation, et en vertu de l’art. 198, § 1er, 10°/2, a), CIR 92, la déduction du paiement des intérêts concernés est refusée dans la mesure où ces intérêts ne sont pas inclus en tant que revenus dans la base imposable de A Co.
81. Est visé le paiement effectué par une société résidente ou un établissement belge en faveur d’une entité hybride. Ce paiement est déduit des revenus imposables du payeur, sans être inclus dans les revenus imposables du bénéficiaire dans sa juridiction.
82. Cette situation implique un paiement à une entité hybride dite inversée (voir n° 38), c’est-à-dire une entité hybride qui est considérée comme une entité imposable en vertu des lois belges et comme une entité dont les revenus ou les dépenses sont considérés comme les revenus ou les dépenses d’une ou plusieurs autres personnes en vertu des lois d’une autre juridiction (48). En d’autres termes, cette entité hybride est considérée comme une entité distincte imposable selon le droit belge alors qu’elle est transparente suivant la juridiction étrangère.
(48) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 66.
83. Sur base de l’art. 198, § 1er, 10°/2, b), CIR 92, la déduction d’un tel paiement est refusée. Comme pour les autres ajustements prévus, la déduction sera admise si le revenu correspondant a été inclus dans les revenus imposables du bénéficiaire (49).
(49) Doc. parl., Chambre, session 2019-2020, DOC 55 0828/001, p. 15.
84. Deux individus, soit un résident du pays B (individu B) et un résident du pays A (individu A), prévoient de consentir un prêt à Bel Co, une société appartenant entièrement à l'individu B. Plutôt que de consentir le prêt à la société directement, l’individu B et l’individu A injectent des fonds propres dans A Co, une entité hybride constituée dans le pays A. A Co accorde un prêt à Bel Co, laquelle verse des intérêts.
Dans la législation du pays A, l’entité A Co est transparente. En conséquence, une moitié du paiement est attribuée à l'individu B et est exonérée d'impôt à titre de revenu de source étrangère acquis par un non-résident. L'autre moitié est attribuée à l'individu A et est soumise à l'impôt au taux applicable aux intérêts.
En revanche, au regard du droit belge, A Co qualifie de société étrangère (entité non-transparente) et les revenus correspondants sont donc attribués à cette société (50).
(50) Cet exemple est inspiré du rapport OCDE (2017), « Neutraliser les effets des dispositifs hybrides, Action 2 – Rapport final 2015 », Projet OCDE/G20 sur l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices, Éditions OCDE, Paris, exemple 4.2, pp. 324 et s.
85. Les intérêts sont versés à une entité hybride inversée (A Co). Le paiement d'intérêts est en principe déductible en Belgique, mais le fait que le pays A attribue la moitié de ce paiement à un non-résident (en exonération d’impôt), en l’espèce l’individu B, a pour conséquence que ce revenu n'est pas entièrement soumis à l’impôt du pays A.
Dès lors, sur base de l’art. 198, § 1er, 10°/2, b), CIR 92, la déduction des intérêts correspondant sera refusée dans le chef de Bel Co dans la mesure où ces intérêts ne sont pas imposés dans le pays A (en l’occurrence, pour moitié).
86. Est visé le paiement effectué par une société résidente ou un établissement belge en faveur d’une entité disposant d’une ou plusieurs implantations. Ce paiement est déduit des revenus imposables du payeur mais ne figure pas parmi les revenus imposables de l’entité car la juridiction du siège de l’entité considère que ce paiement est attribuable à une implantation située dans une autre juridiction. En conséquence, la juridiction du siège exonère ces paiements, alors que la juridiction de l’implantation considère qu’il est attribuable au siège de l’entité et ne l’impose donc pas non plus (51).
(51) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, pp. 66 et 67.
87. Sur base de l’art. 198, § 1er, 10°/2, c), CIR 92, la déduction de ce paiement est refusée lorsque le fait que ce paiement ne figure pas parmi les revenus imposables de l’entité résulte de différences dans l’attribution des paiements entre le siège de cette entité et son implantation ou entre deux implantations ou plus de cette entité en vertu des lois des juridictions où l’entité mène ses activités.
88. A Co est une société de conception de logiciels résidant dans le pays A. Elle crée une succursale dans le pays B. A Co octroie une licence de logiciel à Bel Co, une société belge du groupe, afin qu’elle s’en serve pour son activité de prestations de service aux clients externes. Bel Co paie une redevance pour licence à A Co qui, en vertu des lois du pays A, est considérée comme payée à la succursale dans le pays B.
Le pays A prévoit une exemption pour les revenus provenant d’une succursale étrangère, ce qui signifie que la redevance pour licence n’est pas soumise à l’impôt dans le pays A.
Elle n’est pas non plus soumise à l’impôt dans le pays B car ce dernier applique des règles différentes pour l’affectation des revenus à la succursale. En d’autres termes, les revenus sont, du point de vue du pays B, affectés au siège de A Co (52).
(52) Exemple inspiré du rapport OCDE (2017), « Neutraliser les effets des dispositifs hybrides impliquant une succursale, Action 2 : Cadre inclusif sur le BEPS », Projet OCDE/G20 sur l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices, Éditions OCDE, Paris, exemple 1, pp. 66 et s.
89. Dans cette hypothèse, l’art. 198, § 1er, 10°/2, c), CIR 92, doit s’appliquer dans le chef de Bel Co de manière à refuser la déduction de la redevance des revenus imposables en Belgique.
90. Est visé le paiement effectué par une société résidente ou un établissement belge en faveur d’une implantation qui est considérée comme donnant lieu à un établissement stable en vertu des lois de la juridiction du siège de l’entité dont elle fait partie, mais qui n’est pas considéré comme un établissement stable selon les lois de la juridiction où l’implantation est située.
Il résulte d’un tel dispositif hybride que le paiement déduit dans le chef de l’intervenant belge est en principe exonéré dans le chef du siège de l’entité, tout en n’étant pas imposé dans le chef de l’implantation (53).
(53) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 67.
91. Sur base de l’art. 198, § 1er, 10°/2, d), CIR 92, la déduction de ce paiement est refusée, sauf si le revenu correspondant est considéré comme imposable en vertu des lois de la juridiction du siège de l’entité dont l’implantation fait partie.
92. Par exemple, le paiement est déductible si la juridiction précitée recourt au système de l’imputation ou fait application d’une règle comparable à celle de l’article 185, § 1er, al. 2, CIR 92, tel que commentée ci-dessus (voir n° 31 et suivants) (54).
(54) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 67.
93. En d’autres termes, le paiement est déductible en Belgique si le pouvoir d’imposition de la juridiction de l’établissement stable qui n’y est pas reconnu comme tel, est transféré à la juridiction du siège de l’entité, en vertu de la législation de cette dernière.
94. A Co est une société de conception de logiciels résidant dans le pays A. Elle crée une succursale dans le pays B. A Co octroie une licence de logiciel à Bel Co, une société belge du groupe, afin qu’elle s’en serve pour son activité de prestations de service aux clients externes. Bel Co paie une redevance pour licence à A Co qui, en vertu des lois du pays A, est considérée comme payée à la succursale dans le pays B.
Le pays A prévoit une exemption pour les revenus provenant d’une succursale étrangère, ce qui signifie que la redevance pour licence n’est pas soumise à l’impôt dans le pays A.
Elle n’est pas non plus soumise à l’impôt dans le pays B car la succursale ne crée pas de présence imposable de A Co selon le droit du pays B (55).
(55) Exemple inspiré du rapport OCDE (2017), « Neutraliser les effets des dispositifs hybrides impliquant une succursale, Action 2 : Cadre inclusif sur le BEPS », Projet OCDE/G20 sur l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices, Éditions OCDE, Paris, exemple 1, pp. 66 et s.
95. Si aucun ajustement n’est pratiqué en vertu des lois du pays A, l’art. 198, § 1er, 10°/2, d), CIR 92, doit s’appliquer dans le chef de Bel Co de manière à refuser la déduction de la redevance des revenus imposables en Belgique.
96. Est visé le paiement effectué par une entité établie en Belgique en faveur d’un bénéficiaire étranger. L’entité établie en Belgique est considérée comme fiscalement non-transparente par la Belgique mais comme fiscalement transparente par la juridiction du bénéficiaire. Il résulte en principe de cette divergence de vues une déduction dans le chef de l’entité hybride établie en Belgique sans inclusion correspondante parmi les revenus imposables du bénéficiaire étranger (56).
(56) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 67.
97. Ce dispositif correspond au dispositif hybride visé à l’art. 185, § 2/1, al. 2, b), CIR 92, commenté ci-avant au n°s 58 et suivants, envisagé cette fois du point de vue de l’auteur du paiement et non plus du point de vue du bénéficiaire (57).
(57) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 67.
98. Sur base de l’art. 198, § 1er, 10°/2, e), CIR 92, la déduction de ce paiement est refusée, dans la mesure où en l’absence de cette disposition, ce paiement serait déduit de revenus imposables qui ne figurent pas également parmi les revenus imposables du bénéficiaire (58).
(58) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 67.
99. Le paiement reste donc déductible s’il est porté en déduction, dans le chef de l’entité établie en Belgique, des revenus imposables qui figurent également parmi les revenus imposables du bénéficiaire (revenus soumis à une « double inclusion », voir n° 64, al. 2).
100. A Co constitue Bel Co 1 comme société holding à l'égard de sa filiale exploitante (Bel Co 2). Bel Co 1 est une entité hybride (voir n° 20). Elle est donc non-transparente en droit belge mais bien transparente selon le droit du pays A. Bel Co 2 est réputée être une entité imposable distincte dans la législation de la Belgique et du pays A.
Bel Co 1 contracte un emprunt auprès de A Co et ensuite utilise ces fonds pour accorder un prêt hybride à Bel Co 2. Les paiements d'intérêts au titre de ce prêt sont traités comme revenu ordinaire en droit belge, mais comme dividende exonéré par le pays A.
Puisque Bel Co 1 est une entité transparente du point de vue du pays A, le paiement d'intérêts au titre du prêt conclu entre A Co et Bel Co 1 n'est pas soumis à l'impôt et ne génère aucun revenu dans le pays A. Bien que le paiement d'intérêts au titre du prêt hybride (entre Bel Co 1 et Bel Co 2) soit reconnu dans le pays A (il est censé avoir lieu entre Bel Co 2 et A Co), il est traité comme dividende exonéré aux fins de l'impôt du pays A et n'est pas pris en compte dans le calcul du revenu net enregistré par A Co. Par conséquent, A Co ne comptabilise aucun revenu dans le cadre de cette structure (59).
(59) Exemple inspiré du rapport OCDE (2017), « Neutraliser les effets des dispositifs hybrides, Action 2 – Rapport final 2015 », Projet OCDE/G20 sur l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices, Éditions OCDE, Paris, exemple 3.1, pp. 311 et s.
101. En application de l’art. 198, § 1er, 10°/2, e), CIR 92, le montant correspondant au paiement d’intérêts au titre du prêt conclu entre Bel Co 1 et A Co, n’est pas déductible dans le chef de Bel Co 1 de ses revenus imposables.
102. Est visé le paiement réputé effectué entre le siège d’une entreprise et une de ses implantations ou entre deux ou plus de ses implantations. La juridiction du bénéficiaire du paiement ne prend pas en compte ce paiement à titre de revenus imposables alors que ce dernier est déduit des revenus imposables dans la juridiction du payeur.
103. À titre d’exemple, la déduction de ce paiement dans le chef de l’intervenant situé en Belgique (que ce soit le siège ou une implantation), sans inclusion correspondante parmi les revenus imposables du bénéficiaire étranger, peut notamment résulter de différences dans l’attribution d’actifs incorporels (entre le siège de l’entreprise et son implantation ou entre deux implantations ou plus de cette entreprise) au regard des lois des juridictions concernées.
Dans cette hypothèse, la Belgique considère que les actifs en rémunération de l’utilisation desquels le paiement est effectué sont attribuables au bénéficiaire situé à l’étranger, et par conséquent, permet la déduction dudit paiement. En revanche, la juridiction du bénéficiaire considère quant à elle que les actifs sont attribuables à l’intervenant situé en Belgique et que, par conséquent, le paiement n’est pas imposable dans le chef de ce bénéficiaire (60).
(60) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 68.
104. Sur base de l’art. 198, § 1er, 10°/2, f), CIR 92, la déduction de ce paiement est refusée dans la mesure où, en l’absence de cette disposition, ce paiement serait déduit de revenus imposables qui ne figurent pas également parmi les revenus imposables du bénéficiaire.
105. Le paiement reste donc déductible s’il est porté en déduction, dans le chef du siège de l’entreprise ou de l’implantation établie en Belgique, des revenus imposables qui figurent également parmi les revenus imposables du bénéficiaire de ce paiement (revenus soumis à une « double inclusion », voir n° 64, al 2.
106. A Co fournit des services à une société non liée (C Co) par l’intermédiaire d’une succursale située en Belgique. Les prestations fournies par la succursale font appel à des actifs incorporels sous-jacents qui appartiennent à A Co.
La Belgique attribue la propriété de ces actifs incorporels au siège (A Co) et considère en conséquence que la succursale belge effectue un paiement au prix de pleine concurrence afin de rémunérer A Co pour l’utilisation de ces actifs. Ce paiement réputé effectué est en principe déductible en vertu de la législation belge mais n’est pas reconnu par celle du pays A (parce que ce dernier attribue la propriété des actifs incorporels à la succursale).
Dans le même temps, les gains de la succursale rémunérant les prestations fournies sont exonérés d’impôt en vertu de la loi du pays A qui exonère dans ce pays les revenus des succursales ou les exclut du calcul du bénéfice imposable (61).
(61) Exemple inspiré du rapport OCDE (2017), « Neutraliser les effets des dispositifs hybrides impliquant une succursale, Action 2 : Cadre inclusif sur le BEPS », Projet OCDE/G20 sur l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices, Éditions OCDE, Paris, pp. 16 et s.
107. Sur base de l’art. 198, § 1er, 10°/2, f), CIR 92, la déduction de la redevance supposée payée est refusée dans le chef de la succursale belge. La déduction serait en revanche autorisée si les revenus correspondants étaient imposés à la fois en Belgique et dans le pays A.
108. Sont visés les dispositifs hybrides mis en place entre des intervenants localisés dans des juridictions étrangères mais dont les effets se propagent en Belgique (62).
(62) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 68.
109. Un dispositif hybride est mis en place entre deux intervenants étrangers. Ce dispositif hybride a pour conséquence dans les deux juridictions étrangères concernées soit une double déduction soit une déduction sans inclusion. Dans ce cadre, un autre intervenant, situé en Belgique, effectue des paiements en faveur d’un des intervenants étrangers. Ces paiements, déductibles en Belgique, sont inclus par la juridiction du bénéficiaire dans ses revenus imposables mais sont en réalité compensés par la déduction que ce dernier effectue dans le cadre du dispositif hybride mis en place par ailleurs.
110. En d’autres termes, ces dispositifs hybrides engendrent des dépenses déductibles dans le chef de plusieurs intervenants étrangers, ou dans le chef d’un seul intervenant étranger mais sans que, dans ce cas, à ces dépenses correspondent des revenus figurant parmi les revenus imposables du bénéficiaire étranger. Ces effets sont propagés en Belgique en y transférant la déduction au moyen d’un instrument financier ordinaire tel qu’un emprunt classique, que contracte un intervenant belge (également partie au dispositif hybride au sens de l’art. 2, § 1er, 16°, CIR 92) auprès d’un des intervenants étrangers (63).
(63) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 68.
111. En vertu de l’art. 198, § 1er, 10°/3, CIR 92, la déduction des paiements effectués par l’intervenant belge est refusée, à moins que les autres juridictions concernées neutralisent elles-mêmes les effets du dispositif hybride dans le chef des intervenants étrangers (64).
(64) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 68.
112. Un fonds résident du pays A, dont la vocation est d'accorder des prêts aux entreprises de taille moyenne (le Fonds), entame des négociations dans le but de financer, au moyen d'un prêt non garanti, le fonds de roulement de l’Emprunteur Co, société résidente.
Une fois les négociations enclenchées, l’Emprunteur Co et le Fonds reçoivent un avis fiscal les informant du fait que le prêt, en raison des conditions de subordination, sera traité comme instrument de capitaux propres (c'est-à-dire comme une action) sous la législation du pays A, mais comme instrument d'emprunt sous le régime fiscal belge.
Afin d'éviter les effets négatifs des règles applicables aux dispositifs hybrides en Belgique, le Fonds structure le prêt au moyen d'un dispositif en cascade conclu avec une filiale détenue entièrement dans le pays B (B Co). Le pays B traite également ce type de prêt subordonné en tant qu'instrument d'emprunt, mais il n'a pas instauré les règles applicables aux dispositifs hybrides. En conséquence, l’Emprunteur Co peut déduire les intérêts payés en faveur de B Co. B Co peut déduire les intérêts payés au Fonds, dans le chef duquel ces intérêts sont traités comme des dividendes exonérés. En conséquence, il y a bien une déduction au niveau de l’Emprunteur Co sans inclusion au niveau du Fonds (65).
(65) Exemple inspiré du rapport OCDE (2017), « Neutraliser les effets des dispositifs hybrides, Action 2 – Rapport final 2015 », Projet OCDE/G20 sur l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices, Éditions OCDE, Paris, exemple 10.5, pp. 477 et s.
113. Dans cette hypothèse, il est supposé qu’aucun ajustement n’ait été effectué ni par le pays A, ni par le pays B. Dès lors, étant donné que l’Emprunteur Co est partie au dispositif hybride au sens de l’art. 2, § 1er, 16°, CIR 92, et que l’effet du dispositif est importé en Belgique, la déduction des intérêts payés par l’Emprunteur Co à B Co est refusée en vertu de l’art. 198, § 1er, 10°/3, CIR 92.
114. Est visée la situation d’une société résidente au sens de l’art. 2, § 1er, 5°, b), CIR 92, qui est également considérée comme une société résidente par une ou plusieurs autres juridictions en application de leurs législations respectives. En conséquence, un même paiement pourrait être déduit dans chacune des juridictions où la société qualifie comme résidente (66).
(66) Voir en ce sens Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 69.
115. Conformément à l’art. 198, § 1er, 10°/4, CIR 92, la déduction d’un tel paiement est refusée dans la mesure où celui-ci est déductible (dans la juridiction (ou les autres juridictions) qui considère(nt) également la société comme résidente) de revenus imposables qui ne figurent pas parmi les revenus imposables de la société en Belgique (67).
(67) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 69.
116. Le paiement reste cependant déductible si celui-ci est déduit de revenus qui sont imposables aussi bien en Belgique que dans l’autre juridiction (revenus soumis à une « double inclusion », voir n° 64, al. 2).
117. Lorsque la juridiction (ou les autres juridictions) concernée(s) est (sont) un (des) État(s) membre(s) de l’UE, la déduction n’est refusée que dans l’État membre dans lequel la société n’est pas réputée être résidente en application de la CPDI en vigueur entre les États concernés (68). En d’autres termes, si la société est considérée comme une société résidente de la Belgique selon la CPDI en question, la déduction sera autorisée.
(68) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 69.
118. A Co 1 possède toutes les actions de A Co 2. A Co 2 est résidente à la fois du pays A et de la Belgique à des fins fiscales. A Co 1 forme un groupement fiscal avec A Co 2 au regard de la législation du pays A.
Bel Co est constituée par A Co 2 et est une entité hybride inversée, considérée comme entité distincte à des fins fiscales sous la législation du pays A, mais comme entité non distincte sous la législation belge. Les revenus belges sont attribués à Bel Co et A Co 2 ne dispose pas de revenus propres.
A Co 2 contracte un emprunt auprès d’une banque tierce. Du point de vue du pays A, la charge d’intérêt est déduite des revenus réalisés par A Co 1 en raison de la consolidation fiscale appliquée. Du point de vue de la Belgique, étant donné que Bel Co est censée être transparente, la charge d’intérêts payée par A Co 2 est déduite des revenus de Bel Co, lesquels sont imposables dans le chef de A Co 2. Il y a donc une double déduction (69).
(69) Exemple inspiré du rapport OCDE (2017), « Neutraliser les effets des dispositifs hybrides, Action 2 – Rapport final 2015 », Projet OCDE/G20 sur l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices, Éditions OCDE, Paris, exemple 7.1, pp. 360 et s.
119. La déduction des intérêts payés par A Co 2 à la banque est refusée en Belgique en application de l’art. 198, § 1er, 10°/4, CIR 92. Toutefois, la déduction des intérêts resterait autorisée dans la mesure où les revenus belges réalisés via Bel Co seraient imposés à la fois par le pays A et par la Belgique.
120. Sont visés, les transferts hybrides effectués dans le but de bénéficier, dans plusieurs juridictions, de crédits d’impôt pour la même retenue à la source.
Dans le cadre d’un transfert hybride, une société résidente et un intervenant étranger sont tous deux considérés, par leur juridiction respective, comme le bénéficiaire des revenus générés par l’instrument faisant l’objet du transfert hydride. En conséquence, ces deux intervenants réclament, chacun dans leur juridiction respective, un crédit d’impôt au titre de l’unique retenue à la source prélevée sur ces revenus (70).
(70) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 114.
121. L’art. 292, al. 4, CIR 92, n’autorise l’imputation de la QFIE qu’à concurrence de la quote-part de l’impôt des sociétés qui se rapporte aux revenus nets imposables générés par le transfert hybride.
122. Par revenus nets, il faut entendre la différence entre les revenus reçus dans le cadre du transfert hybride et les éventuels paiements qui ont dû être effectués en faveur d’un autre intervenant dans le cadre de ce transfert hybride (71).
(71) Doc. parl., Chambre, session 2017-2018, DOC 54 2864/001, p. 114.
123. A Co, établie dans le pays A, prête des obligations à Bel Co, établie en Belgique. Bel Co est soumise à certaines contraintes qui incluent le paiement à A Co du montant de tous intérêts versés à l’égard des obligations sous-jacentes (déduction faite de toutes les retenues à la source) pendant la période du prêt (le « paiement de compensation »). Du point de vue économique, l’effet net de ce dispositif est que A Co continue d’être entièrement exposée aux risques et au rendement associés à la détention des titres obligataires, en contrepartie des contraintes imposées à Bel Co à son égard dans le cadre de ce dispositif.
Dans cet exemple, il est supposé que le paiement d’intérêts de 100 euros à l’égard de l’obligation est soumis à une retenue à la source de 10 % et que cette retenue étrangère est imputable sur l’impôt à payer par Bel Co. Cette dernière fait un paiement de compensation à A Co au titre du paiement d’intérêts, déduction faite de la retenue à la source. Ce paiement de compensation est donc égal à 90 euros.
124. A Co et Bel Co sont toutes deux considérées comme ayant reçu un paiement de 100 euros au titre d’intérêts soumis à une retenue d'impôt étranger de 10 %. La Belgique considère que le revenu net de Bel Co, après exécution du paiement de compensation au titre d’intérêts, s’élève à 10 euros (art. 37, CIR 92).
Même si elle soumet à l’impôt seulement un montant de 10 euros de revenu, la Belgique accorde cependant, en principe, la déduction d’une QFIE calculée sur base du montant total des revenus d’intérêts concernés (art. 285 et 286, CIR 92) (72).
(72) Exemple inspiré du rapport OCDE (2017), « Neutraliser les effets des dispositifs hybrides, Action 2 – Rapport final 2015 », Projet OCDE/G20 sur l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices, Éditions OCDE, Paris, exemple 2.2, pp. 303 et s.
125. En vertu de l’art. 292, al. 4, CIR 92, le montant imputable de la QFIE ne peut excéder la quote-part de l’impôt qui se rapporte aux revenus nets générés par le transfert hybride. En l’occurrence, le revenu net en question est égal à 10 euros, soit 100 euros d’intérêts diminués de 90 euros à titre de paiement de compensation. Si l’on applique un taux de 25 % d’impôt, seul un montant maximal de 2,50 euros sera imputable à titre de QFIE.
126. Les dispositions commentées entrent en vigueur le 01.01.2019 et sont applicables à partir de l’exercice d’imposition 2020 se rattachant à une période imposable qui débute au plus tôt le 01.01.2019 (73).
(73) Art. 86.B1., L 25.12.2017.
AU NOM DU MINISTRE :
Pour l’Administrateur général de la Fiscalité,
D. DELVAUX
Conseiller général
Réf. interne : 717.350