Dans un article précédent, nous avions indiqué que la Cour de cassation avait décidé d’interroger la CJUE sur l’instrument nécessaire qu’un État membre doit mettre en place pour transposer une option de la directive TVA. Cette dernière vient de publier son arrêt. Rappelez-vous : en mars 2022[1], la Cour de cassation avait interrogé la CJUE sur la transposition dans la législation belge de la notion de « bâtiment neuf après rénovation ». Devant la Cour de cassation, les sociétés en cause avaient défendu que seuls les bâtiments neufs (sortis de terre) étaient susceptibles d’être livrés avec application de la TVA.
En effet, selon elles, la possibilité d’appliquer une taxation aux bâtiments anciens transformés n’est ouverte qu’aux États membres ayant opéré une transposition de l’option offerte par la directive[2]. Or, en Belgique, cette « transposition » s’est faite par le biais d’une circulaire administrative[3] et non par une loi. D’où l’interrogation de la Cour de cassation sur la nécessité ou non de transposer une option de la directive TVA par une loi. Cette question s’est révélée être primordiale, car si la CJUE avait décidé qu’une loi était nécessaire, les bâtiments anciens transformés n’auraient jamais pu être soumis à la TVA.
Selon la Cour[4], lors de la transposition d’une directive, il est particulièrement important, afin que soit satisfaite l’exigence de sécurité juridique, que les particuliers bénéficient d’une situation juridique claire et précise, leur permettant de connaître la plénitude de leurs droits et de s’en prévaloir, le cas échéant, devant les juridictions nationales. Cependant, toujours selon la Cour, laisser à un État membre la possibilité, par le biais du choix d’une transposition, de définir les modalités d’application du critère de la 1re occupation aux transformations d’immeubles reviendrait à considérer que ce cette possibilité serait constitutive de l’assujettissement d’un bâtiment à la TVA, alors que ce dernier résulte en réalité du principe fondamental selon lequel c’est la valeur ajoutée qui détermine l’assujettissement et des définitions issues de la jurisprudence de la Cour.
La Cour arrive donc à la conclusion que l’exonération prévue par la directive européenne pour la livraison de bâtiments ou d’une fraction de bâtiment et du sol y attenant, autres que ceux dont la livraison est effectuée avant leur 1re occupation,
s’applique également à la livraison d’un bâtiment ayant fait l’objet d’une 1re occupation avant sa transformation, même si l’État membre concerné n’a pas défini, en droit interne, les modalités d’application du critère de 1re occupation aux transformations d’immeubles.
[1] Voy. Bull. OECCBB n° 39, juin 2022, p. 4.
[2] Art. 12, § 2, de la directive 2006/112/CE.
[3] Circulaire n° 16 du 28 juin 1973.
[4] CJUE, arrêt Promo 54, 9 mars 2023, C-239/22.
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