Bruno Colmant
Professeur, Membre de l'Académie RoyalePlus d'un an après les élections, la situation budgétaire est désopilante/désolante, malgré les discours matamoresques de juin 2024.
Malgré des économies de 260 millions €, la Région Wallonne affichera un déficit budgétaire de 2 milliards € en 2026 (oui, oui, vous avez bien lu), la Communauté Française est au bord de l'asphyxie financière, tandis que le gouvernement fédéral doit faire appel aux douzièmes provisoires car il n'arrive pas à trouver 10 milliards €, soit 1,5 % du PIB (oui, oui, vous avez bien lu).
Tous les rêves de retour à l’équilibre sont des chimères.
Ces situations ne peuvent que s'aggraver car l'arrière-plan de tous les scénarios économiques est une faible croissance, amplifiée par le vieillissement de la population, qui conduit à ce qu'un nombre réduit d'actifs va devoir financer un nombre croissant d'inactifs dans un contexte de morosité économique et de bouleversement technologique.
Le problème était en gestation depuis la fin du baby-boom, en 1965, mais sa solution fut lâchement reportée car elle n'aurait pas été acceptée par la population qui voulait jouir de la croissance, plutôt que de s'assurer contre sa propre vieillesse et éviter de repousser la charge sur les futures générations, ce qui est la situation actuelle.
Il faut certes stimuler l'emploi, et c'est une exigence absolue. Mais cela n'apportera pas une croissance suffisante, et les estimations gouvernementales des effets retours sont complètement fantaisistes. Et c'est cela qui diffère de la situation, si souvent rappelée, qui prévalait sous le gouvernement de Jean-Luc Dehaene. À l'époque, il y avait de la croissance, et même si la dette publique a augmenté, elle l'a fait dans une moindre mesure que le PIB.
Alors ?
Alors il faudra emprunter sur les marchés des capitaux et auprès des banques, notamment belges, en espérant que le taux d'intérêt soit tolérable.
Mais il le sera, car au pire du pire, le gouvernement convaincra les banques, sur lesquelles il peut exercer une pression morale, réglementaire ou actionnariale, de l’ « aider » à financer son déficit budgétaire à un taux d'intérêt bas. Et ce taux d'intérêt bas sera le reflet du taux extrêmement bas auquel les banques rémunèrent les dépôts que nous leur confions. La mécanique de recyclage de notre épargne est donc en place.
Et si cela ne va décidément pas, comme dans d'autres pays, la BCE fera tourner la planche à billets, ce que les États-Unis sont sur le point de relancer.
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