​Au fil des années, ma vision sociétale a profondément changé.

Enfant de l’Etat-providence, j’ai pu bénéficier d’un enseignement de qualité que j’ai amplifié par de multiples diplômes, mais surtout l’ambition de transmettre cette connaissance par des enseignements, d’abord en promotion sociale, puis au niveau universitaire.

J’avais 20 ans lorsque l’économie de marché s’est diffusée, avec sa fascinante financiarisation.

Jeunes diplômés d’une Ecole de Commerce, nous avions été envoûtés par le film « Wall Street », sorti en 1987, avec le cynique génie financier Gekko. Je ne savais pas que 20 ans plus tard, je serait membre du comité de direction de la bourse de New York, qui donne sur Wall Street.

Un an plus tard, en 1988, j’étudiais aux Etats-Unis. Là-bas, tout était facile et radieux. Certains de mes amis avaient été écouter Ronald Reagan à Chicago. Ils en étaient revenus magnétisés.

Une seule chose m’avait frappée : un camp d’ancien du Viêtnam, barbus, tatoués et drogués. Aux Etats-Unis, on n’aime pas ses propres perdants. Il faudrait attendre un an pour que le film « Né un 4 juillet », illustre l’échec américain.

Puis les années sont passées et ma génération bien formée a surfé sur 40 ans de croissance économique. Bien sûr, il y a eu quelques krachs, mais on est arrivés sans trop d'encombres à la soixantaine. Du col Mao au Rotary pour paraphraser un livre.

Et aujourd’hui, je suis profondément sceptique. Les Etats-Unis sont devenus un pays surarmé et déchiré, qui a frôlé un coup d’Etat. L'espérance de vie américaine a baissé et les opioïdes et les armes à feu font des ravages. Le Royaume-Uni, dont Margareth Thatcher voulait faire l’exemple du capitalisme populaire triomphant en cassant les syndicats, s’est sabordé dans le Brexit avec une pauvreté terrifiante pour les moins nantis.

Tout le fatras du néolibéralisme anglo-saxon a conduit à occulter les inégalités sociales et les drames environnementaux. Et même nos Etats sociaux comptent désormais 20 % de citoyens sous le seuil de pauvreté. Mais le pourcentage de ceux qui frôlent la précarité est peut-être de 40 %. Mais tout cela on en parle pas dans le silence gêné bien-pensant.

Alors je pense que quelque chose ne va plus.

Et je suis très inquiet de ne plus voir de projet de société, et des expressions politiques escamotés par les agitations quotidiennes qui nous distraient. Certes, je suis sans doute passéiste et je peux me reprocher de n’avoir rien vu, ni fait. Mais aujourd’hui, je veux être de ceux qui regardent et contribuent à un monde collectif meilleur.

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