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​Trump et l’héritage de Nixon: dévaluer le dollar pour dominer le commerce mondial

Le privilège d’émettre la monnaie de référence mondiale, le dollar, offre aux États-Unis un avantage unique : celui de ne jamais devoir rembourser leur dette publique dans une devise étrangère, puisque cette dernière est libellée en dollars, une monnaie systémique. Ainsi, lorsque les États-Unis croulent sous une dette excessive, ils organisent une forte dévaluation compétitive. Franklin D. Roosevelt le fit en 1934, Richard Nixon en 1971, et Donald Trump pourrait reproduire cette stratégie en 2025 sous le vocable de « réalignement monétaire ».

C’est pour cette raison qu’il faut revenir sur les événements de 1971. Les États-Unis sabordèrent alors les accords monétaires de Bretton Woods (signés en 1944), découplant la valeur du dollar de son référentiel aurifère. Tous les autres pays durent s’aligner, puisque le dollar était (et reste) la monnaie dominante, plongeant le système monétaire international dans un chaos et un déluge de dévaluations, d’inflation et d’envolées des dettes publiques, conjugués à un chômage structurel de masse. L’artisan de la dévaluation de 1971, John Connally, secrétaire au Trésor de Nixon, avait résumé la situation : « Le dollar est notre monnaie, mais votre problème ».

Les économies développées furent confrontées à une combinaison de stagnation économique et d’inflation, rassemblées sous le terme de stagflation – un scénario qui redevient probable en 2025. Arthur Burns (1904-1987), alors président de la Fed, mena une politique monétaire très proche des intérêts du président Nixon, au point de sacrifier l’indépendance de l’institution. Il assouplit sa politique pour soutenir la croissance, aggravant une inflation qui dépassa 9 % pendant sa présidence. Cette approche entraîna des taux d’intérêt réels négatifs (taux nominaux moins inflation), ce qui accéléra la chute du dollar. Sa politique suscita un cercle vicieux : les marchés anticipaient une inflation élevée, exigeaient donc des taux nominaux plus hauts, et la Fed répondait par une expansion monétaire accrue pour éviter une hausse excessive des coûts d’emprunt.

Dans ce schéma économique, les pays européens furent désorientés. Leurs gouvernements adoptèrent des politiques monétaires et budgétaires qualifiées de « stop and go », alternant phases de stimulation et de rigueur, stratégie qualifiée de « politique de l’escarpolette » .

Je crains que nous ne revivions ce scénario de stagflation et de dépréciation du dollar, selon des modalités qui me sont bien sûr inconnues. Donald Trump pourrait opter pour une course à la croissance inflationniste et une perte de valeur du dollar afin de stimuler les exportations américaines. Si cette voie se confirme, le scénario inflationniste deviendrait mondial. Il n’existe pas de protection contre cette chute du référentiel monétaire, raison pour laquelle le prix de l’or (exprimé en dollars) fut multiplié par 23 entre 1971 et 1980.

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