L’égarement d’une taxation des plus-values mobilières : comment tuer l’entrepreneuriat et confondre placements et spéculation ?

Il se trouve que c’est moi qui avais imaginé la taxe sur les comptes-titres à la demande de Charles Michel, alors Premier ministre. Plutôt que de taxer la réalisation d’une plus-value, il s’agissait de taxer le stock de valeurs mobilières. La taxe augmentait proportionnellement en cas d’acquisition de nouveaux titres ou d’une hausse des cours, et diminuait dans le cas inverse. Ainsi, les fluctuations du capital étaient imposées sur base des variations non réalisées des actifs.

L’idée initiale était de taxer tous les comptes-titres à un taux de 5 points de base (0,05 %). Ce taux est finalement devenu 15 points de base (0,15 %) au-delà d’un million d’euros.

Mais aujourd’hui, il est question d’amplifier cette taxe et d’ajouter une taxation des plus-values. Je pourrais démontrer le caractère profondément incorrect de cette dernière mesure d’un point de vue financier, et j’ai toujours dénoncé son iniquité car une taxation sur une plus-value est TOUJOURS une double taxation. Mais le cumul des deux taxes crée une TRIPLE taxation.

Prenons un exemple concret : imaginons un titre acquis pour 1 000 euros, dont le cours augmente à 1 200 euros. La taxe sur les comptes-titres s’applique alors sur 1 200 euros, soit 1,80 euros (0,15 % de 1 200). Ensuite, en cas de vente, si le taux de taxation des plus-values est de 10 %, une seconde taxe de 20 euros s’applique sur les 200 euros de plus-value. Le montant total des taxes s’élève donc à 21,80 euros. Ce calcul illustre bien l’effet cumulatif de ces deux taxes : une double imposition de la même matière, avec une plus-value non réalisée taxée une première fois via la taxe sur les comptes-titres, puis à nouveau lorsqu’elle est réalisée via la taxe sur les plus-values.

Mais il y a pire : seuls les contribuables qui prennent des risques en réalisant des placements cotés (notamment des fondateurs et entrepreneurs de projets) seront taxés, alors qu’un rentier qui n’a pas besoin de vendre ses titres échappera à la taxation des plus-values.

Il en va de même pour les grandes participations de contrôle dans des sociétés belges d’envergure, inscrites au nominatif (et donc non soumises à la taxe sur les comptes-titres), qui peuvent être transmises par donation (dans le meilleur des cas) sans jamais devoir réaliser de plus-values. De nombreux recours seront inévitables, d’autant plus qu’une taxation des plus-values concernera tous les actifs visés (actions, obligations, matières premières, crypto-monnaies, etc.) et même les titres nominatifs. MIEUX VAUT continuer à taxer à 33 % les plus-values spéculatives.

En tout état de cause, il ne faudra pas s’étonner de voir la Bourse de Bruxelles, qui n’a vu AUCUNE mise en bourse en deux ans, devenir moribonde – au point que le Palais de la Bourse, que j’ai eu l’honneur de diriger il y a longtemps-, ne devienne finalement… qu’un musée de la bière.

Mots clés

Articles recommandés