Contrôle fiscal et informations étrangères : des limites clarifiées par la Cour d’appel d’Anvers

Un arrêt récent de la Cour d’appel d’Anvers apporte une clarification importante sur les limites du contrôle fiscal en matière d’informations obtenues de l’étranger. Cet arrêt met en lumière le cadre temporel et juridique applicable au délai d’imposition spécial prévu par l’article 358, §1, 2° du Code des impôts sur les revenus (ci-après, « CIR »), en rappelant l’obligation de respecter strictement les années couvertes par les renseignements obtenus de l’étranger.

A titre de rappel, la loi fiscale prévoit un délai spécial d’imposition lorsque l’administration fiscale obtient des informations de l’étranger révélant que des revenus n’ont pas été déclarés en Belgique au cours d’une des cinq (ou des sept années en cas d’intention frauduleuse) qui précèdent celle pendant laquelle les informations sont venues à la connaissance de l’administration fiscale.

L’obtention des informations de l’étranger doit cependant reposer sur un texte juridique réglant les échanges d’informations entre États.

Dans ce cas, l’impôt ou le supplément d’impôt doit être établi dans un délai de 24 mois à compter de la date à laquelle les informations sont venues à la connaissance de l’administration fiscale belge.

Par ailleurs, l’article 333/2 du CIR précise que l’administration fiscale peut, lorsqu’elle reçoit des informations de l’étranger, procéder à des investigations durant le délai d’imposition spécial de 24 mois.

Il est fréquent que de nombreux contribuables belges fassent l’objet d’enquêtes fiscales débouchant sur des rectifications portant sur des années autres que celles visées par l’échange d’informations, lorsque les revenus étrangers n’ont pas été déclarés ou l’ont été de manière incorrecte.

L’arrêt de la Cour d’appel d’Anvers illustre parfaitement cette pratique et la sanctionne à juste titre.

Dans l’affaire examinée, le contribuable concerné détenait quatre comptes financiers auprès d’une banque étrangère. Ni l’existence de ces comptes, ni les revenus mobiliers perçus n’avaient été mentionnés dans ses déclarations fiscales.

En 2019, l’administration fiscale avait reçu ces informations de l’étranger uniquement pour les années de revenus 2017 et 2018.

Toutefois, l’administration fiscale avait également tenté de taxer les années de revenus 2013 à 2016, s’appuyant sur une présomption de l’homme. En effet, elle avait déterminé le montant des revenus des années non couvertes par les fiches CRS par analogie sur la base de la moyenne des revenus mentionnés pour les années de revenus 2017 et 2018..

L’administration fiscale appliquait, en outre, un accroissement d’impôt de 50%, soutenant que la non-déclaration constituait une intention frauduleuse.

La Cour d’appel d’Anvers a invalidé cette approche. Selon elle, l’administration fiscale ne peut étendre ses investigations au-delà des années couvertes par les informations obtenues de l’étranger. Ainsi, les cotisations établies pour les années de revenus de 2013 à 2016 ont été annulées.

La Cour a également jugé que l’accroissement d’impôt de 50 % ne pouvait être appliqué sans preuve concrète de l’intention frauduleuse, preuve qui n’a pas été apportée en l’espèce.

Enfin, la Cour a souligné que le délai spécial d’imposition doit être interprété de manière stricte. En effet, le délai d’investigation spécial a pour seul objectif de vérifier l’exactitude des informations obtenues pour les années concernées. Il ne peut être détourné pour étendre les investigations à d’autres périodes non couvertes par les échanges d’informations.

Dans un contexte où les échanges d’informations fiscales entre États se multiplient, cette jurisprudence doit être saluée.

Elle renforce les droits des contribuables en leur offrant une protection accrue contre des investigations fiscales excessives.

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