Allègement des obligations de reporting en matière de durabilité: ce qui change pour nos entreprises!

La Commission européenne a adopté, le 26 février 2025, un premier paquet de mesures visant à réduire les charges administratives qui pèsent sur les entreprises européennes. Parmi les mesures phares : un important assouplissement des obligations de publication d’informations en matière de durabilité, qui constitue une avancée significative pour de nombreuses entreprises belges, en particulier les PME et les cabinets d’expertise comptable qui les accompagnent.

L’objectif ? Concilier la nécessaire transition durable avec la compétitivité économique.

Voici, sous forme de FAQ, un décryptage pédagogique de cette réforme réglementaire attendue, à destination des experts-comptables et conseillers fiscaux.


1. De quoi parle-t-on exactement ?

Deux textes européens structurent les obligations des entreprises en matière de durabilité :

  • La directive CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) : impose aux entreprises de publier des informations standardisées sur leurs impacts environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG).
  • La directive CS3D ou CSDDD (Corporate Sustainability Due Diligence Directive) : oblige les grandes entreprises à mettre en place un véritable processus de vigilance, tout au long de leur chaîne de valeur.

La Commission européenne, dans le cadre du programme « Omnibus I », propose une série de modifications aux obligations prévues dans ces deux directives.


2. Qu’est-ce qui change concrètement pour la directive CSRD ?

La directive CSRD s’applique actuellement aux grandes entreprises (plus de 250 travailleurs, ou un chiffre d’affaires > 50 millions €, ou un total de bilan > 25 millions €), ainsi qu’aux PME cotées.

Les modifications proposées dans le train de mesures Omnibus I sont les suivantes :

  • Nouveau seuil : seules les entreprises de plus de 1.000 travailleurs seront tenues de publier des informations sur la durabilité. Les autres seuils (50 millions € de chiffre d’affaires ou 25 millions € de total de bilan) restent inchangés.
  • Réduction du nombre d’entreprises concernées de 80 %, selon la Commission.
  • Report de la mise en œuvre : les deuxième et troisième vagues d’application de la CSRD sont repoussées de deux ans, avec une entrée en vigueur généralisée désormais prévue à partir de 2028.
  • Introduction d’un “plafond de la chaîne de valeur” : une norme volontaire est prévue pour les entreprises de moins de 1.000 travailleurs. Elle permettra de limiter les exigences en matière de données que les grandes entreprises soumises à la CSRD peuvent demander à leurs fournisseurs (souvent des PME).
  • Révision des normes ESRS : les normes européennes de reporting de durabilité feront l’objet d’un allègement important, tant sur le nombre de données exigées que sur leur clarté.


3. Et pour la directive CS3D (devoir de vigilance) ?

La directive CS3D (ou CSDDD) impose aux entreprises de mettre effectivement en œuvre un devoir de vigilance environnemental et social.

Les nouveautés apportées sont les suivantes :

  • Report de la transposition au 26 juillet 2027 et de l’entrée en vigueur (phase 1) au 26 juillet 2028 (pour les entreprises de plus de 5.000 travailleurs et 1,5 milliard € de chiffre d’affaires).
  • Réduction du champ d’analyse : seules les relations commerciales directes devront être examinées, sauf s’il existe des informations crédibles sur des risques avérés dans la chaîne d’approvisionnement indirecte.
  • Encadrement des obligations imposables aux PME : les grandes entreprises ne pourront exiger de leurs partenaires commerciaux (PME ou entreprises jusqu’à 500 travailleurs) que les données strictement nécessaires et figurant dans une norme volontaire.


4. Quel impact pour les cabinets comptables et fiscaux ?

  • Pour les experts-comptables accompagnant des entreprises de moins de 1.000 travailleurs, cette réforme réduit drastiquement le risque d’exposition à de nouvelles obligations complexes de reporting.
  • Pour les entreprises encore concernées (essentiellement les groupes ou filiales importantes), la nécessité d’un accompagnement stratégique reste entière.
  • Ces reports offrent un délai précieux pour se préparer : harmoniser les données, cartographier les chaînes de valeur, identifier les processus à documenter, etc.
  • Les cabinets pourront également jouer un rôle de conseil pour les PME fournisseurs de grandes entreprises, en les aidant à répondre efficacement aux demandes de données — en s’appuyant sur la future norme volontaire.


5. Quel calendrier retenir ?


Obligation


Ancienne échéance


Nouvelle échéance

CSRD – 2e et 3e phases

2026

2028

CS3D – transposition

2026

26 juillet 2027

CS3D – entrée en vigueur (phase 1)

2027

26 juillet 2028


6. Est-ce déjà en vigueur ?

Non. Il s’agit encore de propositions de la Commission européenne qui devront être examinées par le Parlement européen et le Conseil. Elles entreront en vigueur après publication au Journal officiel de l’Union européenne, puis devront être transposées dans le droit belge.


Conclusion

Pour les entreprises non cotées de taille moyenne, la publication d’informations en matière de durabilité ne sera plus obligatoire si elles comptent moins de 1.000 travailleurs. Ce recentrage sur les plus grandes structures s’inscrit dans une logique de simplification administrative, tout en maintenant une exigence élevée de transparence pour les grands acteurs économiques.

D’ici là, les experts-comptables auront un rôle central : aider leurs clients à interpréter les seuils, anticiper les obligations, adapter leur stratégie de reporting, ou au contraire, structurer leur communication volontairement pour se démarquer.


Sources :

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