Quand le nouveau régime des astreintes fiscales développe ses premières réalités concrètes!

Depuis une loi du 20 novembre 2022, l’administration fiscale a le droit de demander au juge de condamner un contribuable au paiement d'astreintes lorsqu'il n’exécute pas ses obligations légales, notamment l'accès aux locaux professionnels ou la communication de documents.

Astreintes : loi du 20 novembre 2022

Avant cela, le fisc n'était pas en droit d'appliquer des astreintes à un contribuable rechignant de lui transmettre certains renseignements. On relèvera toutefois une décision de jurisprudence isolée de 2003, dans laquelle une astreinte avait été infligée à une banque par jour de retard, jusqu’au moment de la communication de renseignements relatifs à des mécanismes particuliers permettant la fraude où l’évasion fiscale.

Première application jurisprudentielle : Trib. Bruges, 15 avril 2024

En l'espèce, une société active dans le commerce de détail, qui était entrée dans le collimateur de l'ISI, refusait de transmettre certaines informations.

Dans ses arrêts du 13 juin 2023, la Cour d'appel de Gand a prononcé en référé des mesures conservatoires, à savoir la copie intégrale des boîtes emails et de toutes les données informatiques de l’infrastructure informatique (ICT). Ces données furent conservées par un huissier de justice en sa qualité de séquestre, dans l’attente du jugement sur le fond. Le contribuable avait toutefois refusé de transmettre certaines données stockées dans le cloud.

Dans ses deux jugements du 15 avril 2024, le tribunal de première instance de Bruges s'est prononcé sur le fond à propos de l'utilisation des données "gelées":

  • il a confirmé que le fisc était en droit d’obtenir une copie des données informatiques en question (en ce compris les données stockées dans le cloud). Selon le tribunal, ce n’est pas au contribuable à choisir les données à transmettre au fisc. A noter que certaines données informatiques ont pu être exfiltrées, en particulier les échanges d’emails entre le contribuable et son avocat.
  • Ce qui est remarquable, c’est que le tribunal a aussi condamné le contribuable à payer une astreinte de 2.500 EUR/jour (avec un plafond à 50.000 EUR), aussi longtemps qu’il ne transmettait pas certaines données stockées sur le cloud (relatives notamment à deux programmes comptables, à la plateforme de e-commerce, au webshop,…). Il est piquant de relever que l’ISI avait demandé une astreinte de 3.000 EUR par jour de retard, sans plafond ! Il est loin d’être exclu que d’autres juges se montrent plus féroces, en particulier lorsque les montants en jeu sont substantiels.

On précisera que l’astreinte ne peut pas être réclamée immédiatement si appel est interjeté. Et il semblerait que les contribuables envisagent d’interjeter appel...

Je vous invite à découvrir également mon interview à ce sujet dans l'Echo.

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