L’ORDRE SE MOBILISE POUR PROTÉGER SES MEMBRES DES ACTIONS EN RESPONSABILITÉ
Temps de lecture: 6 min |1 mars 2024 à 05:20
Gérard Delvaux
Président de l'Ordre des Experts-Comptables et Comptables Brevetés de Belgique, Société Royale
Au travers de nombreuses questions et interpellations de nos membres, notre action de défense se porte ce mois-ci sur les dangers de mise en cause de la
Leschambresdesentreprisesendifficultéetlescurateurs mettent systématiquement en causelaresponsabilitédesadministrateursetactionnairesquifontpreuvedemanièrerépétéed’unegestion contraire à l’intérêt de la société.
Eneffet,danslaplupartdesentreprisesendifficulté,lepremierclignotantdétectéparlesjugesprofessionnels comme par les juges consulaires, ce sont l’existence et l’accroissement decomptes courants débiteurs dépassant largement les capacités de remboursement de l’administrateur ou de l’actionnaire en question etmettantàmallesfondspropres(lepatrimoine)de la société.
Ceci constitue une faute de gestion sanctionnable civilement et contractuellement et, danscertaines circonstances, même pénalement,notammentlorsquel’administrateuret/oul’actionnaire régularisent des montants prélevéssans autre pièce justificative probante pour lasociétéparunefichefiscaledesalairesàchargede la société qui n’a effectivement jamais payéle précompte sur ces montants « rétroactivement régularisés ».
Ceciconstitueunefraudefiscaleetsocialeque,trop souvent, les consœurs et confrères enregistrent sans prendre aucune précaution particulière.Orleurresponsabilitépeutêtremiseencause comme complice d’une telle fraude.
Il convient donc de mettre en garde nosmembres face à ces pratiques douteuses etnousalerteronségalementlesbarreauxfrancophonesdupayspouréviterquelesavocatsàlacause n’avalisent de telles pratiques.
Conseilspratiquespournosconsœurset confrères
Dansvotrelettredemission,pourtoutemission (tenue de comptabilité comme missiond’audit), dans le paragraphe « Responsabilitédeladirection»,indiquezclairementqu’enfin d’exercice, l’administrateur-actionnaires’engageàrembourseràchaqueclôtured’exercice les montants repris dans l’historique ducompte 41 « Autres créances ».
La réouverture en début d’exercice suivantesttoutaussirépréhensibleetdémontrela volonté persistante de l’administrateur et/ou de l’actionnaire de mettre en péril les intérêts de la société (cause aggravante).
Faisantréférenceàcetengagement,l’expert-comptable fiscaliste, l’expert-comptable certifié, le conseiller fiscal certifié n’enregistrerontaucune écriture permettant l’existence d’uncomptecourantdébiteuretcertainementpassil’entrepriseaunactifnetquirisqueraitdedevenir négatif ou est déjà largement négatif.
Aucasoùexceptionnellement,etdemanièretout à fait provisoire et occasionnelle, des écrituresseraientpasséesdansuncomptecourantdébiteur, le professionnel doit charger un avocat d’établir une convention de prêt à duréedéterminée et dont l’échéance se clôture auplustardàladatedeclôturedel’exercicecomptable et reprenant un taux d’intérêt applicablesur le marché bancaire.
Si un compte courant débiteur est constatéetnonremboursé,ilrevientauprofessionnelduchiffre de déclarer au précompte mobilier lesintérêtsmentionnésaucontratetl’administrateur doit en effectuer le paiement.
Trimestriellement,lorsdesdéclarationsTVA,ilestrecommandéauprofessionneld’imprimerl’historiquedececomptecourantdébiteuretdelefairesignerauclientdemanièreàcequ’ilnepuisseprendreprétextedesonignoranceoudesanégligencepour,enfind’exercice,contesterle montant de son compte courant débiteur.
Dans les comptes annuels provisoires présentés en conseil d’administration, le comptecourant débiteur doit faire l’objet d’un pointparticulier et d’une mention particulière sur lemontantducomptecourant,lesintérêtscouruset le précompte payé.
Lors de l’assemblée générale annuelle, si cecomptecourantdébiteurpersiste,ilconvientdemettrecepointàl’ordredujourdel’assembléegénéraleannuelledemanièretransparente,defaçon à ce que l’image fidèle soit respectée.
Dans les grandes entreprises, ce point seraévoquédanslerapportdegestionqueleconseil doit établir au titre de l’article 3:6, § 1er, 1°, du CSA qui vise expressément les risques et incertitudes auxquels la société est confrontée et, en cas de pertes avérées, l’article 3:6, § 1er, 6°, du CSA.
Dans les grandes entreprises où un commissaire doit être légalement nommé, ce pointferal’objetd’uncontrôlespécifiqueetpermet-tra au commissaire de se prononcer, comme lanorme générale le prévoit, sur la continuité ounon de la société (en cas de péril sur les fondspropres de la société ).
Danslespetitessociétésoumicro-sociétés,unrapportdegestionn’estpasobligatoire,maisil revient au professionnel de vérifier :
si une mention particulière est bien reprisedans l’annexe des comptes annuels abrégés(ligne9051)duschémaabrégéouligne9500du schéma micro ;
si la page suivante a bien été remplie (schéma abrégé ou schéma micro) :
CONFLITSD’INTÉRÊTSETCONTRATS
Procès-verbal ou rapport spécial sur lesdécisions et/ou la conclusion d’une opération impliquant un intérêt opposé de na-ture patrimoniale entre un administrateuret la société et/ou sur les contrats conclusentre l’administrateur unique étant égale-mentl’actionnaireuniqueetlasociété
(article 5:77, § 1er, article 6:65, § 1er, article 7:96, § 1er, et article 7:103, § 1er, du Code des sociétés et des associations)
OU
Rapportsurlescontratsconclusentrel’actionnaireuniqueetlasociété(article7:231,3ealinéa du Code des sociétés et des associations).
À l’heure où les instituts ont pris l’engagementdemettreàjourlarecommandationcommunedes instituts, dénommée "Recommandationinterinstituts" concernant les missions qui incombent au réviseur d’entreprises, à l’expert-comptable externe, au conseil fiscal externe,au comptable agréé externe ou au comptable-fiscaliste agréé externe dans le cadre de l’article10,alinéa5,del’article12,§1er,alinéa5, et de l’article 17, § 2, 5° et 6°, de la loi relative à la continuité des entreprises », qui date, il est vrai, de 2016, il importera de rester vigilant pour éviter que la responsabilité des consœurs et confrères ne soit mise en cause