L’ORDRE SE MOBILISE POUR PROTÉGER SES MEMBRES DES ACTIONS EN RESPONSABILITÉ

Au travers de nombreuses questions et interpellations de nos membres, notre action de défense se porte ce mois-ci sur les dangers de mise en cause de la

Les chambres des entreprises en difficulté et les curateurs mettent systématiquement en cause la responsabilité des administrateurs et actionnaires qui font preuve de manière répétée d’une gestion contraire à l’intérêt de la société.

En effet, dans la plupart des entreprises en difficulté, le premier clignotant détecté par les juges professionnels comme par les juges consulaires, ce sont l’existence et l’accroissement de comptes courants débiteurs dépassant largement les capacités de remboursement de l’administrateur ou de l’actionnaire en question et mettant à mal les fonds propres (le patrimoine) de la société.

Ceci constitue une faute de gestion sanctionnable civilement et contractuellement et, dans certaines circonstances, même pénalement, notamment lorsque l’administrateur et/ou l’actionnaire régularisent des montants prélevés sans autre pièce justificative probante pour la société par une fiche fiscale de salaires à charge de la société qui n’a effectivement jamais payé le précompte sur ces montants « rétroactivement régularisés ».

Ceci constitue une fraude fiscale et sociale que, trop souvent, les consœurs et confrères enregistrent sans prendre aucune précaution particulière. Or leur responsabilité peut être mise en cause comme complice d’une telle fraude.

Il convient donc de mettre en garde nos membres face à ces pratiques douteuses et nous alerterons également les barreaux francophones du pays pour éviter que les avocats à la cause n’avalisent de telles pratiques.

Conseils pratiques pour nos consœurs et confrères

  1. Dans votre lettre de mission, pour toute mission (tenue de comptabilité comme mission d’audit), dans le paragraphe « Responsabilité de la direction », indiquez clairement qu’en fin d’exercice, l’administrateur-actionnaire s’engage à rembourser à chaque clôture d’exercice les montants repris dans l’historique du compte 41 « Autres créances ».
  2. La réouverture en début d’exercice suivant est tout aussi répréhensible et démontre la volonté persistante de l’administrateur et/ou de l’actionnaire de mettre en péril les intérêts de la société (cause aggravante).
  3. Faisant référence à cet engagement, l’expert- comptable fiscaliste, l’expert-comptable certifié, le conseiller fiscal certifié n’enregistreront aucune écriture permettant l’existence d’un compte courant débiteur et certainement pas si l’entreprise a un actif net qui risquerait de devenir négatif ou est déjà largement négatif.
  4. Au cas exceptionnellement, et de manière tout à fait provisoire et occasionnelle, des écritures seraient passées dans un compte courant débiteur, le professionnel doit charger un avocat d’établir une convention de prêt à durée déterminée et dont l’échéance se clôture au plus tard à la date de clôture de l’exercice comptable et reprenant un taux d’intérêt applicable sur le marché bancaire.
  5. Si un compte courant débiteur est constaté et non remboursé, il revient au professionnel du chiffre de déclarer au précompte mobilier les intérêts mentionnés au contrat et l’administrateur doit en effectuer le paiement.
  6. Trimestriellement, lors des déclarations TVA, il est recommandé au professionnel d’imprimer l’historique de ce compte courant débiteur et de le faire signer au client de manière à ce qu’il ne puisse prendre prétexte de son ignorance ou de sa négligence pour, en fin d’exercice, contester le montant de son compte courant débiteur.
  7. Dans les comptes annuels provisoires présentés en conseil d’administration, le compte courant débiteur doit faire l’objet d’un point particulier et d’une mention particulière sur le montant du compte courant, les intérêts courus et le précompte payé.
  8. Lors de l’assemblée générale annuelle, si ce compte courant débiteur persiste, il convient de mettre ce point à l’ordre du jour de l’assemblée générale annuelle de manière transparente, de façon à ce que l’image fidèle soit respectée.
  9. Dans les grandes entreprises, ce point sera évoqué dans le rapport de gestion que le conseil doit établir au titre de l’article 3:6, § 1er, 1°, du CSA qui vise expressément les risques et incertitudes auxquels la société est confrontée et, en cas de pertes avérées, l’article 3:6, § 1er, 6°, du CSA.
  10. Dans les grandes entreprises où un commissaire doit être légalement nommé, ce point fera l’objet d’un contrôle spécifique et permet- tra au commissaire de se prononcer, comme la norme générale le prévoit, sur la continuité ou non de la société (en cas de péril sur les fonds propres de la société ).
  11. Dans les petites sociétés ou micro-sociétés, un rapport de gestion n’est pas obligatoire, mais il revient au professionnel de vérifier :
  • si une mention particulière est bien reprise dans l’annexe des comptes annuels abrégés (ligne 9051) du schéma abrégé ou ligne 9500 du schéma micro ;
  • si la page suivante a bien été remplie (schéma abrégé ou schéma micro) :

CONFLITS D’INTÉRÊTS ET CONTRATS

  • Procès-verbal ou rapport spécial sur les décisions et/ou la conclusion d’une opération impliquant un intérêt opposé de na- ture patrimoniale entre un administrateur et la société et/ou sur les contrats conclus entre l’administrateur unique étant égale- ment l’actionnaire unique et la société

    (article 5:77, § 1er, article 6:65, § 1er, article 7:96, § 1er, et article 7:103, § 1er, du Code des sociétés et des associations)

    OU
  • Rapport sur les contrats conclus entre l’actionnaire unique et la société (article 7:231, 3e alinéa du Code des sociétés et des associations).

À l’heure où les instituts ont pris l’engagement de mettre à jour la recommandation commune des instituts, dénommée "Recommandation interinstituts" concernant les missions qui incombent au réviseur d’entreprises, à l’expert- comptable externe, au conseil fiscal externe, au comptable agréé externe ou au comptable- fiscaliste agréé externe dans le cadre de l’article 10, alinéa 5, de l’article 12, § 1er, alinéa 5, et de l’article 17, § 2, 5° et 6°, de la loi relative à la continuité des entreprises », qui date, il est vrai, de 2016, il importera de rester vigilant pour éviter que la responsabilité des consœurs et confrères ne soit mise en cause

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