Quel est donc le lien entre le bien-être animal et les discussions fédérales et fiscales ?

C’est en lisant l’article de Stéphane Tassin dans La Libre du 20 juin 2023, relatif à l’amélioration de l’éclairage des routes en Wallonie afin de les batraciens et d’autres petits animaux, que l’idée de cet article à propos de la réforme fiscale en vogue et vague m’est venue. Quel est donc le lien entre le bien-être animal et les discussions fédérales et fiscales ?

En juin, de nombreux experts-comptables certifiés sont focalisés sur le dépôt des déclarations fiscales de leurs clients, dont le délai de rentrée a été raccourci. Lire que le parlement wallon se préoccupe du bien-être des batraciens est une distraction des tâches fiscales et des lectures au sujet de la réforme fiscale tant annoncée. Préserver la biodiversité nous concerne tous, il est normal que nos élus s’en préoccupent. Cependant, j’ai un peu l’impression d’être hypnotisé par les amis des batraciens qui se détournent d’enjeux aux conséquences capitales et qui ne sont plus abordées que de manière superficielle : l’adaptation de la fiscalité et du système des pensions belges au 21e siècle.

Nous sortons de deux années de crises intenses, le changement du monde s’accélère de plus en plus ; la volatilité boursière semble croissante, les investisseurs étrangers sont exigeants, la concurrence internationale se durcit et l’intelligence artificielle détruira des dizaines de milliers d’emplois. En créera-t-elle ? Peut-être. Pendant que certains politiciens se préoccupent du sort des batraciens, d’autres défendent bec et ongles leurs positions et l’ampleur de la réforme fiscale se réduit à peau de chagrin. En attendant les prochaines élections ?

Les mesures actuellement sur la table des négociations, dont La Libre se fait le relai autant que possible ne concernent qu’un rééquilibrage des recettes entre partis marchands de tapis. Si cela aboutit, on prendra un petit peu plus aux riches pour moins prendre aux bas revenus professionnels ; on supprimera quelques excès pour amadouer d’autres sous-secteurs de la classe moyenne. La quotité de revenus exemptée d’impôt pourrait augmenter, à savoir que la taxation réelle commencera à un revenu plus élevé. En contrepartie, l’avantage fiscal sur l’obtention d’options d’actions de son employeur disparaîtrait. On évoque une hausse du taux réduit de la TVA, de 6 à 9 %. En échange de quoi les fruits, légumes etc. ne seraient pas soumis à cette taxe. Ce ne serait que du saupoudrage.

Si par contre vous cherchez une réflexion ou des positions fortes autour du bien-fondé des dépenses de l’Etat, à part à Bruxelles, vous chercherez longtemps. La Belgique est à la détestable première place de la taxation des revenus du travail. Certes, une contrepartie de cette taxation est le régime des soins de santé parmi les meilleurs au monde et certaines retraites sont confortables. Est-ce une raison pour ne pas réfléchir aux principes du système dont on sait qu’il n’est pas tenable à terme, les prévisions démographiques l’attestent.

Un autre cas pratique ? Il n’a échappé à aucun propriétaire que par l’indexation automatique, le précompte immobilier augmente de 9,6 % en 2023. Sauf éventuelle exception, aucune commune n’a réduit cette augmentation. Certes, des services sont rendus aux citoyens en contrepartie de ces impôts communaux, mais ne pourrait-on y faire des économies, créer des synergies entre communes exsangues et réduire la pression fiscale ?

Au lieu de considérer les dépenses comme irréductibles, l’Etat belge devrait s’interroger sur le niveau d’imposition maximale acceptable en contrepartie des services à lui fournir : décider des priorités de dépenses pour les décennies à venir. On imagine que tous les citoyens n’auront pas les mêmes, c’est l’essence de la démocratie.

La Belgique sur le podium fiscal international

Ces thèmes feraient partie de la réflexion : la Justice doit-elle être refinancée, alors qu’en 2023 les tribunaux croulent sous le manque de personnel, que des bâtiments sont insalubres et que nombre de délais sont insupportables ? L’enseignement doit-il être la priorité puisque les écoliers et étudiants d’aujourd’hui feront la richesse économique et culturelle de demain ? Faut-il renforcer ou privatiser les soins de santé, revaloriser les salaires des professionnels du secteur ? Avons-nous besoin d’une armée belge face à la menace russe, sans oublier le futur Iran nucléaire qui est à nos portes ? Voulons-nous maintenir un modèle par répartition des fonds disponibles ou revenir à la capitalisation comme il y a 70 ans ? En synthèse, combien sommes-nous prêts à payer et pour faire quoi ?

On a parfois l’impression que certains parlementaires se préoccupent de sujets périphériques, pas seulement le bien-être des batraciens et chauve-souris, pour ne pas avoir à mettre les mains dans le cambouis sans se demander comment on pourrait mieux ou moins utiliser les impôts, taxes et charges sociales payés par les contribuables. Soyons de bon compte, reconnaissons qu’à Bruxelles, la démarche de Steven Gatz d’inviter les administrations de la Région à réduire leurs dépenses va dans le bon sens, au moins procède-t-il à la démarche.

Au lieu de contempler notre pays sur le podium fiscal international, c’est sur celui de l’innovation, du changement, de la perspective, de l’efficacité et de l’audace qu’on voudrait pouvoir l’admirer. Pour finir sur une note positive, au moins le nouvel éclairage va-t-il aussi réduire les dépenses d’énergie de la Région, ce n’est pas assez, mais c’est aussi déjà positif.

Source : La Libre

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