Dans son arrêt du 3 octobre 2024, la Cour de cassation réaffirme sa jurisprudence du 16 juin 2023 et rappelle avec force les droits du contribuable dans le cadre d’un contrôle fiscal.
Le Code des Impôts sur les revenus et le Code de la TVA prévoient à charge des contribuables et assujettis une « obligation de collaboration ». Il s’agit notamment d’accorder aux agents du fisc le libre accès aux locaux professionnels.
Nul ne remettra en cause l’importance de cette obligation pour permettre à l’administration fiscale d’assurer sa mission, la perception de l’impôt légalement dû.
Ces visites domiciliaires sont toutefois souvent le théâtre de dérives administratives, les agents du fisc répétant inlassablement les principes que leur autorité hiérarchique a gravés dans leur esprit : nous avons le droit, vous pourrez contester après.
Selon la Cour constitutionnelle (arrêts du 12 octobre 2017 et du 27 juin 2019), en cas d’opposition du contribuable, les agents de l’administration fiscale ne peuvent contraindre le contribuable, que ce soit
La Cour de cassation a énoncé les mêmes principes :
Les faits sont les suivants :
Le 27 août 2010, dans le cadre du contrôle fiscal d’une société belge, des agents du fisc se présentent sur place et sollicitent l’accès aux locaux professionnels. L’administrateur-délégué de l’entreprise n’est pas présent sur place mais est contacté par téléphone.
Un agent lui explique l’objet de la visite, par référence à plusieurs dispositions légales mais, selon le procès-verbal de constatations, sans que ne soient mentionnés les articles 319 CIR et 63 CTVA relatifs à la visite domiciliaire.
L’administrateur-délégué consent au contrôle ainsi justifié par les agents du fisc et, par après, contestera avoir donné son consentement sur la visite domiciliaire.
Dans ce contexte factuel particulier, la Cour de cassation a jugé que le consentement de l’administrateur-délégué « n’a pas été donné en connaissance de cause d’une mesure de contrôle visée » aux articles 319 CIR et 63 CTVA. Elle casse l’arrêt de la Cour d’appel de Liège querellé qui, selon la Cour, « viole lesdites dispositions légales ».
L’administration fiscale doit donc avoir expliqué au contribuable ce qu’elle entendait faire pour que celui-ci puisse comprendre ce qui lui est demandé et y consentir.
Il était devenu trop fréquent que l’administration fiscale s’arroge des droits dont elle ne dispose pas et contraigne dans les faits le contribuable à accepter un contrôle, même illégal. Fort heureusement, la jurisprudence récente sanctionne cette tendance, de manière assez récurrente.
Cette jurisprudence est l’occasion de rappeler les droits du contribuable, notamment son droit d’opposition inhérent aux articles 319 CIR et 63 CTVA.
On s’étonne donc de voir le ministre des Finances, dans une réponse à une question parlementaire, s’empresser de rappeler le contribuable à ses seules obligations, alors que le pouvoir judiciaire sanctionne les dérives et excès de son administration.
Si cette dernière respectait la loi, le contribuable ne trouverait aucune justification légale à ne pas collaborer, la gestion des dossiers pourrait être plus efficace et le contentieux judicaire fortement réduit.
Selon l’accord de gouvernement, une « nouvelle charte du contribuable » doit être rédigée. Espérons que, s’inspirant de cette jurisprudence, cette charte permette effectivement de retrouver un équilibre entre les pouvoirs de l’administration fiscale et les droits du contribuable…