Production immobilisée en comptabilité et fiscalité belge : que faut-il savoir et connaitre pour en bénéficier correctement?

Qu’est-ce que la production immobilisée ?

Aucune disposition de l’Arrêté Royal CSA ne définit explicitement ce qu’est une production immobilisée.

La production immobilisée désigne la valeur des biens et services produits par une entreprise pour elle-même et destinés à être utilisés durablement dans le cadre de son activité. Cela inclut, par exemple, les constructions réalisées pour les besoins propres de l’entreprise, le développement de logiciels internes, etc.


Pourquoi enregistrer la production immobilisée ?

L’enregistrement de la production immobilisée permet de refléter fidèlement les activités de l’entreprise et de valoriser son patrimoine. Cela a pour effet d’augmenter les actifs du bilan, ce qui peut améliorer les ratios financiers et la perception de la solvabilité de l’entreprise.


Est-ce obligatoire d’enregistrer la production immobilisée en comptabilité?

Oui, conformément au Code des Sociétés et des Associations (CSA) et à l’Arrêté Royal du 30 janvier 2001 portant exécution du Code des Sociétés (AR), les entreprises doivent enregistrer la production immobilisée pour garantir la transparence et la fidélité des états financiers.


Comment la production immobilisée s’active-t-elle ?

  1. Identification : Déterminer les biens et services produits par l’entreprise pour elle-même.
  2. Fixer les règles d'évaluation conformément à la législation :​
    1. La production immobilisée est comptabilisée au coût de revient;
    2. Le coût de revient ne peut excéder la valeur attribuée par l’entreprise à l’actif, basée sur les flux de trésorerie futurs actualisés projetés dans le plan d’entreprise (Avis de la CNC 2012/13);
    3. Les sociétés peuvent choisir de ne pas inclure certains ou tous les frais indirects de production dans le coût de revient. Si cette option est exercée, cela doit être mentionné dans l’annexe des comptes annuels (art. 3:15 AR CSA).
    4. Les immobilisations incorporelles autres que celles acquises de tiers ne sont portées à l’actif pour leur coût de revient que dans la mesure où celui-ci ne dépasse pas une estimation prudemment établie de la valeur d’utilisation de ces immobilisations ou de leur rendement futur pour la société (art. 3:38, al. 1er AR CSA). S’ils sont portés à l’actif, ces frais doivent faire l’objet d’amortissements selon les règles habituelles.
  3. Détermination du coût de production : Inclure toutes les charges directes et indirectes liées à la production :​
    1. Charges directes : Coûts des matériaux, main-d’œuvre directe, frais de sous-traitance.
    2. Charges indirectes : Coûts généraux de production, amortissements des équipements utilisés, frais de gestion.
  4. Comptabilisation :​
    1. Débit : Compte d’immobilisation (par exemple, 2x000 « Immeubles construits »).
    2. Crédit : Compte de production immobilisée (compte 722000 « Production immobilisée – Immeubles construits »).


Sur quelle durée la production immobilisée s’amortit-elle ?

La durée d’amortissement dépend de la nature de l’actif :

  • Constructions : Généralement 33 ans.
  • Logiciels développés en interne : Entre 3 et 5 ans.
  • Autres immobilisations : Selon leur durée de vie utile estimée.

La part de la valeur d’investissement ou du coût de revient correspondant aux coûts indirects de production peut être amortie de deux manières : soit intégralement au cours de la période imposable durant laquelle ces coûts sont engagés, soit par annuités constantes réparties sans interruption sur une durée déterminée par le contribuable (art. 62 CIR 92).

Les arrêts de Bruxelles des 13 février et 20 mars 2018 (Bruxelles (Nl.) (civ.) (6Ne ch.) n° 2013/AF/206, 20 mars 2018) ont précisé que les entreprises peuvent inscrire à l’actif de leurs comptes annuels les constructions réalisées en interne au prix d’acquisition, sans obligation d’inclure les coûts de revient des travaux propres. La Cour a jugé qu’il n’y avait pas d’occultation ou de sous-estimation d’actif car les travaux internes non payés ne constituent pas une dépense à inclure dans la valeur des bâtiments. Les contribuables peuvent donc économiser sur les coûts de revient sans enfreindre les règles fiscales. Cependant, cette interprétation a été critiquée (voir à ce propos S. Van Crombrugge, Fiscologue n°1586, p. 7 & 8), certains estimant que les actifs produits partiellement par l’entreprise doivent être évalués au coût de revient.


Quels sont les types d’éléments qui peuvent être activés dans cette production immobilisée ?

  • Peuvent être activés : Constructions, logiciels développés en interne, machines fabriquées pour usage interne, améliorations locatives.
  • Ne peuvent pas être activés : Charges courantes de fonctionnement, petits outillages et équipements de faible valeur, frais commerciaux tels que publicité et marketing.


Quels effets fiscaux la production immobilisée produit-elle ?

De façon générales, 3 effets sont susceptibles

  • Amortissements : Les amortissements sont déductibles fiscalement, ce qui réduit le bénéfice imposable.
  • Augmentation de la base d’actifs : Cela peut influencer le calcul des déductions pour investissements.
  • Crédits d’impôt : En cas de développement de certains actifs, comme les logiciels, des crédits d’impôt pour recherche et développement peuvent être disponibles.


Quelle est la différence entre une production immobilisée et une commande en cours ?

  • Production immobilisée : Biens ou services produits par l’entreprise pour elle-même, destinés à être utilisés durablement dans son activité. Ils sont comptabilisés comme des immobilisations et amortis sur leur durée de vie utile.
  • Commande en cours : Travaux en cours de réalisation pour des clients, destinés à être facturés une fois terminés. Ils sont enregistrés en stocks ou en commandes en cours d’exécution et non comme des immobilisations.


Comment la production immobilisée diffère-t-elle de l’usage des comptes de régularisation ?

  • Production immobilisée : Représente des biens ou services créés par l’entreprise pour usage interne et est enregistrée comme un actif immobilisé.
  • Comptes de régularisation : Utilisés pour ajuster les charges et les produits à la bonne période comptable, mais ils n’affectent pas la valeur des immobilisations de l’entreprise.


Exemple concret dans le cadre d’un projet immobilier

Une entreprise de construction réalise une extension de son propre bâtiment pour un coût total de 200.000 EUR. Cette valeur est activée comme suit :

  • Débit : Compte 2x000 « Immeubles construits » pour 200.000 EUR.
  • Crédit : Compte 722000 « Production immobilisée – Immeubles construits » pour 200.000 EUR.

Ensuite, cette immobilisation sera amortie sur 33 ans, ce qui donnera lieu à un amortissement annuel de 6.060,60 EUR (200.000 EUR / 33 ans).


Conseils et recommandations

  • Précision et documentation : Assurez-vous de bien documenter les coûts associés à la production immobilisée pour justifier les montants activés.
  • Consultation : Travaillez en étroite collaboration avec votre comptable pour optimiser les avantages fiscaux liés à la production immobilisée.
  • Audit interne : Effectuez régulièrement des audits internes pour vérifier la correcte application des règles d’activation et d’amortissement.

En suivant ces lignes directrices, les entreprises peuvent s’assurer qu’elles tirent le meilleur parti de leurs investissements internes tout en respectant les obligations comptables et fiscales en vigueur en Belgique.

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